Littérature corse : François-Xavier Dianoux-Stefani, l'héritier

Avec son premier recueil de nouvelles, Le chant des ronces, François-Xavier Dianoux-Stefani fait souffler un vent de fraîcheur bienvenu sur la fiction insulaire. En donnant pour la première fois la parole aux enfants de la Corse des années 80. Ceux qui ont refusé de choisir entre Canta U Populu Corsu et Depeche Mode.

François-Xavier Dianoux-Stefani a grandi entre Bastia et Stazzona, son village de Castagniccia, à l'aube des années 80. Au cœur du bouillonnement culturel insulaire initié par le Riaquistu. À une période où la culture était chargée de symboles, et où les enjeux qu'elle portait allaient bien au-delà des murs des salles de spectacle. 

Mais quand on est enfant, on ne se pose pas encore ce genre de question. On se contente d'aimer, de manière spontanée, gourmande, et candide.
D'autant que les années 80, c'est aussi, au niveau mondial, la décennie de la démocratisation de la culture pop. Une culture plus accessible qu'elle ne l'avait jamais été. Une culture qui, pour la première fois, se faufilait jusque dans les endroits les plus reculés.

François-Xavier s'en rappelle : "comme tant d'autres, je suis un enfant des walkman, des cassettes VHS, des jeux vividéoC'était une révolution. Tout était à portée de main, et le choix était infini"

Je suis l'enfant de Canta, et de Steven Spielberg

François-Xavier Dianoux-Stefani

Dans son livre, Le chant des ronces, le jeune quadragénaire s'est penché, comme personne avant lui, sur cette génération insulaire qui s'est construite à la confluence de ces deux cultures.

"On représente un cas intéressant de névrose culturelle", sourit L'auteur. "On devait se réapproprier la culture qui faisait de nous ce que nous étions, et en même temps, on nous offrait une incroyable ouverture sur le monde. Je pouvais aider mon grand-père à creuser un sillon dans le champ derrière la maison, au village, et puis me précipiter dans le salon pour découvrir Freddy, les griffes de la nuit, que j'avais loué le matin à Bastia au vidéo-club"

Imaginaire fécond

La cohabitation de ces deux mondes, si lointains et pourtant si proches, est au cœur de Le chant des ronces, le premier recueil de nouvelles de François-Xavier Dianoux-Stefani. "Quand j'ai commencé à écrire, j'étais loin d'avoir théorisé tout ça. Je n'y avais même pas pensé ! Mais au fil des pages, c'est ce qui est ressorti, de manière évidente". 

L'une des nouvelles les plus réussies de l'ouvrage, Radio Cosmos, l'illustre à merveille, avec ces gamins, en voiture, qui roulent sans fin sur les sempiternelles mêmes routes, alors qu'au-dessus d'eux volent des avions de ligne, en direction de destinations lointaines, propices à la rêverie.  

Le chant des ronces est un livre qui nouvelle après nouvelle prend son envol, et fait preuve d'une audace littéraire bluffante. François-Xavier Dianoux-Stefani semble lâcher la bride à son imagination. Il se joue des genres, des codes, et des références, nombreuses, dont il parsème ses histoires.  

La maîtrise dont il fait preuve dans l'art, minutieux et complexe, de la nouvelle, laisse admiratif. Lost Boys, Le géant de fer, Heart of gold, Casale ou Le bar de l'arbre sont de petits bijoux. L'auteur explore des chemins de traverse, joue avec les attentes du lecteur, et se permet de fréquentes incursions du côté de l'étrange, et du fantastique.

Les ronces, c'est l'abandon, mais c'est aussi le champ des possibles

FX Dianoux-Stefani

On y croise des fantômes d'adolescents perdus sur le bord d'une route de montagne, des tanks ensevelis dans le maquis, l'ombre d'un Kaijū dans le port de Bastia, un conducteur de 4X4 qui se lance dans un remake nustrale du Duel de Spielberg, un vieil homme qui a pris racine depuis 250 ans, à l'ombre d'un grand figuier au fond du jardin, une librairie perdue au fond d'une forêt... Autant d'histoires fantasmagoriques qui pourtant, trouvent un écho profond dans notre quotidien. 

Si François-Xavier Dianoux-Stefani se considère comme l'enfant de Canta et de Steven Spielberg, il est également l'enfant de Jérôme Ferrari et de Marc Biancarelli (qui est aujourd'hui son éditeur). Cela ne fait guère de doute à la lecture du recueil de nouvelles.

Un héritier de ces deux écrivains insulaires qui s'inspire de ce qu'ils ont apporté à la littérature corse il y a une vingtaine d'années, pour l'amener à son tour ailleurs. 

Les choses derrière les choses

Pour certains lecteurs, il se dégage de ces nouvelles une sourde noirceur, un pessimisme diffus, encore accentué par l'omniprésence des ronces du titre au fil des pages. Mais François-Xavier Dianoux-Stefani promet qu'il est très étonné de cette analyse.

Pour lui, Le chant des ronces est même un livre optimiste. 

"Les ronces, pour moi, c'est le symbole de notre génération. Ça représente la fin d'un monde, c'est vrai, puisqu'elles poussent là où, auparavant, les champs étaient cultivés. Mais c'est aussi le décor de nos jeux, là où on pouvait enfin construire nos cabanes, là où prenaient naissance nos rêves"

Le jeune écrivain marque une pause, avant de reprendre : "Les ronces, c'est l'abandon, mais c'est aussi le champ des possibles. Ce n'est pas la fin d'un monde. C'est la promesse d'un autre monde..." 

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