Après Pierre Alessandri, c'est Alain Ferrandi qui, ce matin, a pu goûter pour la première fois au régime de semi-liberté, après 24 ans de détention. Il retrouvera néanmoins sa cellule ce soir, avant de commencer son activité au sein d'une entreprise agricole à compter de lundi.
Il est 7h40 ce matin lorsqu'Alain Ferrandi franchit les portes du centre pénitentiaire de Borgo, souriant. A l'extérieur l'attendent ses proches.
Comme Pierre Alessandri, autre détenu emblématique du commando Erignac, lors de sa sortie en semi-liberté le mardi 14 février dernier, Alain Ferrandi n'a fait aucune déclaration. Il lui est d'ailleurs interdit de s'exprimer sur l'affaire dans la presse.
Désormais, le détenu, qui est incarcéré depuis mai 1999, sera employé durant la journée sur une exploitation agricole de Casinca, à Castellare-di-Casinca. Avant de retourner à Borgo, chaque soir, et de retrouver sa cellule.
La journée d'aujourd'hui sera consacrée aux formalités administratives, avant que le travail ne débute dès lundi.
Ce nouveau régime lui permettra également de se rendre deux fois par mois chez ses proches, un week-end chez sa mère, et l'autre chez sa sœur. Mais il va de pair avec plusieurs interdits : Alain Ferrandi n'a pas le droit de rentrer en contact avec les autres membres du "commando Erignac", devra s'abstenir de toute intervention publique, et n'aura le droit de se rendre ni à Ajaccio, ni à Pietrosella. Ce sont les lieux où ont été commis l'assassinat du préfet en 1998 et l'attentat contre une caserne de gendarmerie.
Long combat judiciaire
Le 23 février dernier, le tribunal d'application des peines antiterroriste a accordé au détenu de 62 ans une semi-liberté d'un an probatoire à une libération conditionnelle. Le Parquet national antiterroriste s'est abstenu de faire appel, contrairement à l'année dernière.
En effet, le 24 mai 2022, la cour d'appel, qui avait été alors saisie par le PNAT, avait rejeté une décision de première instance qui, déjà, avait accordé la semi-liberté probatoire à Alain Ferrandi.
Et quelques années plus tôt, en 2019, ce dernier, accessible à un aménagement de peine depuis 2017, s'était vu déjà refuser une première requête.
C'est sensiblement le même parcours qu'avait dû suivre Pierre Alessandri, membre comme lui du "commando Erignac", responsable de la mort du préfet de Corse, assassiné le 6 février 1998 à Ajaccio. Ils avaient tous les deux été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité en 2003.
Le troisième membre du commando, Yvan Colonna, avait été condamné à la même peine en 2007, 2009 et 2011.
Contexte tendu
Après des années de revendication pour le rapprochement et la levée de leur statut de Détenu Particulièrement Surveillé, le sort carcéral d'Alain Ferrandi et de Pierre Alessandri s'est accéléré au cours de la période de tension qui a suivi l'agression et le décès d'Yvan Colonna en mars 2022.
Quelques semaines plus tard, le 11 avril, ils étaient transférés à la prison de Borgo.
Mais la semi-liberté à laquelle ils prétendaient depuis des années continuait à leur être refusée, ce qui pesait fortement sur les relations entre Paris et la Corse, jusqu'à provoquer la suspension des discussions qui venaient de s'ouvrir, pour une éventuelle autonomie de l'île.
Même si le fil du dialogue a été renoué, ces semi-libérations adviennent dans un contexte insulaire toujours troublé, alors que les attentats ont repris en Corse, et que le FLNC-UC et 22 octobre a revendiqué mardi 21 mars 17 actions sur l'île. Et qu'un nouveau groupe GCC Ghjuventù Clandestina Corsa a officialisé le 7 février dernier sa création au travers d'un communiqué revendiquant aussi plusieurs actions.