Les Bleus, à l'article de la mort en 2017, foncent vers la L2. Un exploit réalisé devant un stade vide, alors que le monde entier ne parle plus que vaccins et de tests PCR. Nous avons passé une semaine en immersion dans le club, pour comprendre comment le SCB fait face à cette situation inédite.
Armand Cesari aux abonnés absents
- "Allez, Boco, on est chez nous. On est chez nous !"
Masque sur le nez et parka noire, Claude Ferrandi s'égosille, debout près du banc du Sporting, alors que le chrono s'approche dangereusement de la 90ème minute. Yohan Bocognano accélère sa course pour rejoindre la surface de Villefranche, et apporter le surnombre devant la cage de Jean-Christophe Bouet. Ce sera le dernier corner des bleus.
Les encouragements, les récriminations, ou les consignes venus de la ligne de touche, les joueurs du SCB les entendent désormais clairement. Depuis octobre dernier, nulle bronca, aucune clameur de joie, pas le moindre chant ne s'élève des tribunes d'Armand Cesari. Et le rappel du président du Sporting à ses joueurs ne semble plus si superflu.
Depuis des mois, les rencontres des championnats de foot se déroulent en un huis-clos perpétuellement recommencé. Jouer à domicile ou à l'extérieur ne veut plus dire la même chose qu'il y a un an. Dix ans. Ou même cinquante.
Il est 19h53 quand l'arbitre siffle la fin de la rencontre. Les bleus, pas vraiment tranchants, n'ont pas réussi à s'imposer face à Villefranche-Beaujolais. Les deux équipes se saluent et quittent la pelouse dans un silence auquel personne n'a encore réussi à s'habituer.
C'est irréel, ce stade vide.
Kevin Schur se dirige vers les vestiaires, et peine à masquer sa déception. Même si le SCB fait encore, assez largement, la course en tête du classement, le 1-1 est frustant :
"Ca fait plusieurs matchs que le public nous manque. Il nous aurait aidé à faire basculer des rencontres. C'est un handicap pour nous, c'est sûr. Mais on ne se cache pas derrière ça. Les matchs, on doit les gagner de toute manière. On est premiers, on a des points d'avance à conserver... La motivation, on n'a pas besoin d'aller la chercher bien loin".
Nulle bronca, aucune clameur de joie, pas le moindre chant
Dans une salle voisine, une poignée de journalistes attend Mathieu Chabert pour la conférence de presse d'après-match. Jean Pruneta branche son matériel sur la sono de la salle. Il commente les matchs du Sporting Club de Bastia depuis 1986, et il a vu Furiani exulter plus de fois qu'il ne peut s'en rappeler. Une autre époque...
"C'est irréel, ce stade vide. On est aux portes de la Ligue 2, c'est pas rien, et on n'en a même pas l'impression. Sans les supporters qui marchent le long de la voie ferrée avec les supporters, sans le tumulte, sans les embouteillages, c'est presque immatériel."
Difficile, dans ces conditions, de commenter un match et d'arriver à faire vibrer toutes celles et ceux qui, en Corse et ailleurs, le suivent sur les ondes de RCFM :
"Le public me manque, mais tellement... Quand y a un but, j'essaie de m'emflammer, mais quand je m'enflamme je sens le vide. Je dois me mettre dans une bulle, ne pas me retourner parce que si je me retourne, je ne vois personne ! Alors je me dis que le monde, il est derrière son poste de radio. Et puis je dis moins de conneries, aussi", sourit Jean Pruneta.
Le journaliste est d'autant plus admiratif des joueurs bastiais :
"Quand ils rentrent sur le terrain, face à eux, il y a des gradins vides. Je leur tire mon chapeau d'être aussi solides. Et leurs victoires, ils ne les partagent pas avec le public. Ce qu'ils sont en train de réaliser, c'est costaud".
Sur le parking, alors que la nuit est tombée, et que les joueurs de Villefranche rejoignent leur bus, on croise Sébastien Salles-Lamonge. Quand on lui demande comment il vit la situation, il esquisse un geste d'impuissance, et se dirige vers sa voiture, avant de rebrousser chemin.
"Hier soir, j'étais sur internet et je suis tombé sur un montage du match contre Caen en 8èmes de finale de la Coupe de France, il y a deux ans. Je n'étais pas encore au Sporting à l'époque. Et j'ai eu des frissons... On passe à côté d'un truc énorme. Gilles [Cioni - NDLR] m'a dit "avec les résultats qu'on a, on ferait entre 10 et 15 000 spectateurs tous les week-ends." .
Sébastien Salles-Lamonge jette son sac sur la banquette arrière de sa voiture.
"On devrait vivre des trucs de fous avec le public, et peut-être qu'on va rien vivre du tout. C'est dur... Pour nous, et pour eux aussi".
Le milieu offensif nous adresse un signe de la main avant de prendre la route. Auteur, avec les Bleus, d'un huitième match d'affilée sans défaite. Leader solide du championnat de National. Mais le vague à l'âme.
Les supporters font de la résistance
Quelques heures plus tôt, une cinquantaine de supporters s'étaient massés devant les grilles d'Armand Cesari.
Comme un parfum de tribune Est, durant quelques brèves minutes. La plupart sont venus de Bastia et des environs, mais certains ont fait la route depuis la Plaine orientale ou Corte, juste pour témoigner de leur soutien aux joueurs du Sporting.
Quandu seremu uniti in Furiani ?
Marc'Andria arrive de Cervione. "On montre aux joueurs qu'on est quand même là, qu'on les lâchera pas. La plupart du temps, on est réduit au rang de spectateurs, plus de supporters. Alors qu'habituellement, quand on gagne à Furiani, on a toujours le sentiment qu'on a participé à la victoire..."
On est réduits à de simples spectateurs. On ne sert à rien.
Gilles Cioni et les siens ont quitté les vestiaires et sont sortis les saluer. De l'autre côté de la grille du parking.
"Quandu seremu uniti in Furiani..." Les paroles du chant des Turchini qui s'élèvent, sur la route du stade, entre les drapeaux et la fumée rougeâtre des fumigènes, prennent une toute autre signification en ces jours de pandémie.
Depuis quelques journées, c'est à cela que se réduit la communion. Au cours de l'automne dernier, à la suite des mesures du gouvernement, qui empêchaient un grand nombre de gens de se rendre au stade, les supporters se retrouvaient sur le toit de l'ancien centre de formation du Sporting, entre la tribune Est et la voie ferrée.
Après la trêve, la communauté d'agglomération bastiaise avait fait savoir que l'état du toit ne garantissait pas la sécurité de celles et ceux qui y grimpaient, et les Turchini avaient dû renoncer.
"De toute manière, ils ont tout barricadé, alors on n'a pas trop eu le choix !, s'amuse Hervé. Mais quoi qu'il en soit, l'annonce du couvre-feu à 18 heures avait déjà dissuadé pas mal de monde de venir..."
Les hommes de Mathieu Chabert sont retournés préparer leur match. Les supporters se dispersent et rentrent chez eux. Certains regarderont le match sur FFFTV, d'autres se brancheront sur RCFM...
"On le vit très mal, confie Vincent, une écharpe nouée autour du cou. On aurait pu faire des choses formidables, dans les tribunes, marquer les esprits". Un quadragénaire, qui, lui, a noué son écharpe autour de sa bouche en guise de masque sanitaire, lance, en passant près du groupe : "des comme nous, y en a pas, en National. Et même aux niveaux au-dessus, d'ailleurs !" provoquant des rires, et deux ou trois hochements de tête appréciatifs.
Expérimenter le manque
Vincent reprend : "Y a quelque chose qui s'est cassé. Il va falloir reprendre l'habitude de partir en déplacement, préparer les animations dans les tribunes. Aujourd'hui, il reste quelques banderoles, et basta. Il faut absolument qu'on puisse assister à un match avant la fin de la saison, et que ce soit la fête. Sans limite de supporters, parce que mille dans un stade, ça n'a pas de sens. On veut participer à la montée !"
Pierre-Noël Luiggi, assis dans la tribune nord déserte, bonnet enfoncé sur le crâne, partage ce point de vue. Avec Claude Ferrandi, il a été l'un des principaux artisans de la reprise du club au cours de l'été 2017.
Alors que le SCB, écrasé par une dette colossale de 24 millions d'euros, attaqué de toutes parts, et rétrogradé brutalement par les instances du football français, semblait à l'article de la mort.
Quatre ans après, fort d'un parcours exceptionnel, les Bleus sont aux portes du monde professionnel.
Les supporters, on peut les adorer, les détester, mais ils sont l'âme du football.
Le vice-président du Squeubeu le reconnaît, cette saison lui a ouvert les yeux : "Ca montre que le football n'a strictement aucun intérêt sans la passion qu'amènent les supporters. Ca devient un jeu video, un truc presque virtuel. Je n'aurais jamais compris cela de manière aussi claire sans le stade vide. Sans expérimenter le manque. Ce public, on peut l'aimer, le détester, le critiquer, mais il est l'âme du football. Il donne tout son sens à ce sport."
Eviter les erreurs du passé
Jean-François Coquery, le président des socios du SECB (Socios Etoile Club Bastia) propose de ne pas se focaliser sur cette période difficile, et de se projeter vers l'avenir. "Voir les matchs sur son canapé, c'est la merde. Aucun doute. Mais la frustration sera atténuée si on monte. On survole le championnat, ça aurait pu être fantastique à vivre, mais ça reste du foot, et il y a des gens qui, en ce moment, avec le Covid, souffrent bien plus que nous..."
Pour autant, il reconnaît que, sur un plan plus général, cette coupure peut poser des problèmes du côté de la reconstruction du club, particulièrement sur le plan des liens qui doivent se retisser entre ses différentes parties.
"Il faut qu'on discute, qu'on réfléchisse ensemble, pour qu'on soit prêts à retrouver le niveau professionnel en bon état de marche. Que les supporters se structurent, discutent entre eux, et avec les dirigeants, pour que, de tous les côtés, on évite de refaire les erreurs du passé. De notre côté aussi, on doit se faire notre place dans le paysage, mais pour l'instant, tout cela est un peu mis entre parenthèses..."
Un avant, et un après 2017
Ceux qui sont le mieux à même de comparer la saison de l'accession en L2, sous l'ère Frédéric Hantz, et le parcours du Sporting cette année, ce sont ceux qui étaient déjà là en 2011. Et qui l'ont vécu de l'intérieur.
Jérôme Negroni est aujourd'hui directeur-général adjoint du club. Julien Piazza est le responsable du marketing et du sponsoring. Jean-Philippe Thibaudeau est chargé de superviser la communication, secondé par Jules Dominici et Jean-Paul Giacobbi.
Il y a dix ans, employés de l'ancienne direction, ils ont connu l'euphorie de la cavalcade des bleus vers la L1 (champion de National en 2011, champion de L2 en 2012). Ils ont aussi assisté, impuissants, à la brusque dégringolade qui a suivi, on connu la peur du vide, et ont accepté de relever le challenge proposé par les repreneurs.
La tête dans le guidon
"Ca semble très loin quand on voit tout le chemin accompli", reconnaît Julien Piazza.
Jean-Philippe Thibaudeau se rappelle : "en août 2017, il y avait trois joueurs à l'entraînement, on voyait les mecs vider leurs casiers, partir en pleurant, et des réunions se tenaient, avec Claude [Ferrandi, président du SCB -NDLR], entre deux portes... Le chantier était colossal. Aujourd'hui, on a un service administratif structuré, un groupe de 25 joueurs en équipe première, une académie qui voit le jour..."
Le traumatisme de 2017 n'est pas effacé. En tant que supporter, et en tant que salarié.
"C'est miraculeux. Miraculeux", acquiesce Jérôme Negroni, le regard dans le vague. "Moi, jétais dans le déni, je ne pouvais pas croire que le Sporting allait disparaître", se souvient Jules Dominici, à l'autre bout de la grande table où les "anciens" ont pris place, au premier étage du siège du club.
"Le traumatisme de 2017, il n'est pas effacé, en tout cas. En tant que supporter, et en tant que salarié, complète Jean-Philippe Thibaudeau. Il y avait deux options, à cette époque. Tirer un trait sur notre passion, ou repartir au combat. Et essayer d'apporter notre pierre au nouvel édifice. C'était un choix pas facile, vraiment. Et certains anciens salariés ne sont toujours pas revenus voir le Sporting. Trop difficile pour eux."
Désamour
La reprise par de nouveaux dirigeants garantissait qu'au début de la saison 2017-2018, il y aurait encore des équipes portant le maillot bleu à tête de maure sur les pelouses. Mais guère plus. Le challenge restait de taille.
D'abord, beaucoup de supporters aussi avaient mal vécu la relégation, les révélations en série, et se sentaient trahis. Il fallait recréer le lien. "Le désamour, il a bien eu lieu", confirme Julien Piazza. Et puis surtout, il fallait survivre, avec des finances fragiles, et faire face aux Cassandre qui répétaient que si le Sporting ne remontaient pas très vite, il stagnerait pour très longtemps dans les bas-fonds du football français.
Soit on était premiers, soit on était morts.
"Chaque lundi matin, on reprenait le boulot en se disant qu'on avait pas le choix. C'était soit on était premiers, soit c'était la mort. L'année dernière, on ne serait pas monté en National, ça aurait été très, très compliqué pour la suite. Sportivement, mais pour nous aussi. Il y avait un vrai risque d'essoufflement", assure Jérôme Negroni.
Une parenthèse à oublier
Cette année, enfin, les perspectives sont plus rassurantes. Mais tous reconnaissent que le huis-clos est de plus en plus dur à vivre, même s'ils savent qu'ils sont là avant tout "pour faire le taf". "La bande d'applaudissements et d'encouragements enregistrés diffusés dans la sono pendant le match, j'ai vraiment du mal", reconnaît Jules Dominici.
Face à lui, son collègue de la cellule Com', Jean-Paul Giacobbi, hoche la tête en souriant. "On en a marre de s'entendre parler à cent mètres l'un de l'autre. Heureusement, pour le moment, on déroule sur le terrain, parce que si en plus on vivait une période sportive compliquée, je ne sais pas dans quel état on serait".
Jérôme Negroni conclut sur une note positive : "on a quitté le monde professionnel un soir contre Lyon en avril 2017, dans un Armand Cesari plein à craquer,, et après tout ce qui s'est passé, les galères, le covid, on le retrouvera plein pour une ouverture de championnat qu'on espère professionnel".
Faire front ensemble
Une semaine plus tôt, c'est à l'Igesa que nous avions commencé notre plongée au cœur du Sporting Club de Bastia 2021. Il est, ce jeudi 18 février, un peu plus de 14 heures, et les joueurs commencent à arriver. Ils se dirigent vers le petit bâtiment qui leur sert de base durant les entraînements.
Jules Dominici vérifie son matériel et déploie le trépied de sa caméra. Dans quelques heures, vidéos et photos tenteront de transmettre aux supporters un peu du parfum des entraînements. A travers les réseaux sociaux.
Jean-Philippe Thibaudeau, de son côté, s'assure que notre interview ne débordera pas sur l'échauffement des joueurs. Nous avons rendez-vous avec Gilles Cioni et Michel Moretti, deux des joueurs corses de l'effectif bastiais. Mieux que personne, ils sont à même de prendre le pouls de cette saison pas comme les autres.
Visages de la renaissance bastiaise
L'un, Gilles Cioni, est défenseur latéral. A 36 ans, le joueur a tout connu avec le Sporting. Il y a signé son premier contrat professionnel en 2006. Après 3 ans au Paris FC, il revient à Bastia pour la saison 2010-2011, lorsque le club est relégué en National, pour la première fois depuis 1965. Régulièrement aligné par Frédéric Hantz, il apporte sa pierre à la remontée du SCB en L1, et sera le seul joueur à rester dans l'effectif lors de la dégringolade de 2017 en National 3. Il est le capitaine du Sporting, et le socle de l'équipe bastiaise.
L'autre, Michel Moretti, a 31 ans, et occupe le poste de milieu central. Il a signé au Sporting en 2018, à l'entame de la deuxième saison des bleus en National 3, après de nombreuses années au CAB, et un passage à l'AS Furiani-Agliani. Le Bastiais est l'un des visages de la renaissance du SC Bastia.
Un volume indécent
Des chants corses, Canta ou l'Arcusgi, viennent troubler la quiétude du cordon lagunaire à un volume indécent. Gilles Cioni vient de se garer sur le parking. Le défenseur semble plein d'énergie. Après une longue période d'inactivité, il devrait retrouver la pelouse de Furiani deux jours plus tard, lors de la réception de Villefranche-Beaujolais. [Durant la rencontre, il sera victime d'une rupture totale du talon d'Achille - NDLR]
Au point que la question du huis-clos ne lui semble pas prioritaire. "On n'a pas assez de recul, on a la tête dans le guidon, on est en bonne voie mais rien n'est fait ! Si tout s'effondre, on ne parlera plus d'exploit, on ne parlera plus de rien. Avant de fêter la montée, il faut monter. On doit être performants sur le terrain".
Il ne suffit pas de porter le maillot bleu pour gagner tous les matchs.
Michel Moretti a rejoint son capitaine sur le bord du terrain. "Nous, on ne se projette pas, mais les supporters, oui, aucun doute ! Et ils ont presque l'impression que c'est normal, l'accession. On peut le comprendre, c'est gravé dans l'inconscient collectif, en Corse. Le SCB, pour tout le monde, c'est un club professionnel. Sa place, elle est parmi l'élite".
Gilles Cioni éclate de rire. "La passion, parfois, elle te fait déjuger. Régulièrement, j'entends : "Heureusement O zitelli qu'on va remonter en L2 !"... Heureusement de quoi ? On est repartis du fond du fond ! Il suffit pas de porte un maillot bleu pour gagner tous les matchs. Moi, j'ai pas eu moins de pression en National 3 qu'en Ligue 1. La pression est énorme, à tous les niveaux, parce qu'on n'a pas le droit à l'erreur."
La vie d'avant
Les premiers joueurs sortent en tenue, et rejoignent la pelouse, où les assistants de Mathieu Chabert installent les plots, sous le regard de Frédéric Née, l'entraîneur adjoint. Michel Moretti jette un coup d'œil à son téléphone, pour s'assurer qu'ils ne seront pas en retard, et se tourne vers son coéquipier :
"Tu as dû les ressentir dix fois plus que nous, cette pression, cette ferveur. Nous, on jouait en amateurs, personne ne nous connaissait. Toi, tu étais attendu sur tes prestations en National 3, et puis beaucoup d'attentes reposaient sur tes épaules.
Personne ne nous connaissait.
Est-ce que l'absence du public, finalement, n'est pas un mal pour un bien ? Est-ce qu'elle ne permet pas de jouer plus libérés, sans pression ? Notre question nous vaut un regard d'incrédulité de la part des deux Bastiais. Comme si on avait proposé de jouer en chaussures de ski pour mieux tirer les corners...
"Jamais de la vie, lance Gilles Cioni. A Furiani, quand ça pousse, que les tribunes s'emballent... Qu'on met un coup d'accélérateur... Ca change tout. En face, à qui dégage le ballon en tribune, à qui ne sait plus faire un dribble. Une chose est sûre, avec le huis-clos, on est plus pénalisés qu'Avranches ou Concarneau."
"Ca nous manque, mais il n'y a pas que les supporters qui nous manquent. Tout a changé, c'est notre vie d'avant qui nous manque", reconnait Michel Moretti.
On demande au capitaine s'il se souvient de l'explosion de joie spectaculaire qui avait suivi le but de Sylla, face à Créteil. Un but qui offrait le titre de champion de National aux Bleus, le 8 mai 2011.
"Evidemment, que je m'en rappelle ! Sylla, c'est moi qui lui fais la passe décisive", fanfaronne le Bastiais, sourire aux lèvres. L'occasion est trop belle pour Michel Moretti "C'est sa seule en dix ans, heureusement qu'il s'en souvient..."
Mauvais souvenirs
Le milieu de terrain le reconnaît, les joueurs pensent parfois à la fin de saison. Et se demandent devant quel stade de Furiani elle se déroulera. "L'année dernière, ça m'a fait tellement bizarre de ne pas fêter l'accession. C'était un soulagement, plus que de la joie, ou de l'émotion. On n'a pas pu le partager, ni avec l'équipe, le staff, ni avec les supporters. On était chacun chez soi. Ca a créé un vrai manque."
Les deux Bastiais se gardent bien de le dire trop fort, comme tout le monde au Sporting, histoire de ne pas tenter le diable. Mais l'objectif, cette saison, c'est la montée. Et ils n'espèrent qu'une chose, pouvoir la fêter comme il se doit. Devant des tribunes en ébullition.
Histoire de reléguer les huis-clos, le Covid, et ces quatre années de purgatoire, au rang des mauvais souvenirs.