Réforme des retraites 2023 : d'où vient le système français ?

Les débats autour du projet de loi de réforme des retraites se sont ouverts hier, lundi 6 février, au Palais Bourbon. Un système qui n’a jamais cessé d’être réformé, remis en cause par les uns, et défendu par les autres.

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Entre les Français et la retraite, c'est une histoire vieille comme le monde. Dès 1407, le roi Charles VI décide de verser une pension à ceux qui ont été longuement à son service. Les souverains qui lui succèdent en feront de même.

En 1673, le ministre des Finances de Louis XIV, Jean-Baptiste Colbert, est à l'origine de la "Caisse des Invalides de la Marine Royale". À l’époque, l’idée est de créer une pension de retraite pour les marins. D’autres régimes seront par la suite mis en place pour des corporations liées à l’État : en 1853 par exemple, sous l'impulsion de Napoléon III, tous les fonctionnaires bénéficient d'un régime de pension. Mais ce n’est qu’à partir de 1910 que sont posées les premières bases de notre système global actuel.

Retour sur les grandes dates qui ont marqué son histoire.

 

• 1910 : la loi sur les retraites ouvrières et paysannes

La loi du 5 avril 1910 crée pour les travailleurs âgés de plus de 65 ans un système de retraite par capitalisation. Les travailleurs se constituent par l'autofinancement un stock de capital qui financera leurs pensions de retraite. La CGT est farouchement opposée à ce système. En cause, l'âge de départ : à l'époque, seulement 8% de la population parvient à atteindre les 65 ans.

L'organisation syndicale parlera de "retraite des morts".

• 1945 : la retraite pour tous, ou presque

Le mois d’octobre 1945 marque l’avènement de la Sécurité sociale et du régime général des retraites. Ambroise Croizat, alors ministre du Travail d'un gouvernement d'union nationale, va s'atteler avec d'autres pour mettre en place ce système. Ce régime va s’appliquer à tous les salariés du secteur privé hors secteur agricole. Son fonctionnement, lui, contrairement à 1910, repose sur un système par répartition. Concrètement, les cotisations des actifs servent au paiement des pensions des retraités du moment. Si l’idée initiale est de créer un système unique pour tous, certaines catégories professionnelles décident de conserver leur régime actuel. On parle de "régimes spéciaux".

L’âge de départ pour percevoir une pension complète est alors fixé à 65 ans.

• 1956 : le minimum vieillesse est né 

Aux côtés du système des retraites, un minimum vieillesse voit également le jour. Ce dispositif, créé dans le but d’assurer un revenu minimal à ceux n’ayant pas assez cotisé, est exclusivement réservé aux personnes âgées de plus de 65 ans. 

• 1983 : entrée en vigueur de la retraite à 60 ans

Probablement la réforme la plus ancrée dans la mémoire collective des Français. François Mitterrand, fraîchement élu président de la République en 1981, décide d’instaurer la retraite à 60 ans, sous réserve d’avoir cumulé 37,5 années de cotisations. Cette vieille revendication de la classe ouvrière reste un symbole des sept premières années du président à l’Élysée. Adoptée par ordonnance, elle se fonde sur l’idée d’un « véritable droit au repos que les travailleurs sont fondés à revendiquer en contrepartie des services rendus à la collectivité à l'issue d'une durée de carrière normale. »

• 1991 : le Livre Blanc sur les retraites tire la sonnette d’alarme

Fruit d’un travail interministériel et préfacé par le Premier ministre de l’époque Michel Rocard, ce fascicule met en exergue les difficultés financières auxquelles le régime général des retraites devra faire face dans le futur. Plusieurs propositions seront préconisées pour y pallier, dont l’allongement de la durée de cotisation de 37,5 ans à 42 ans.

• 1993 : Balladur allonge la durée de cotisation

Pour cette deuxième cohabitation sous la Ve République, le Premier ministre Édouard Balladur décide d’allonger de manière progressive la durée de cotisation pour une retraite à taux plein. Pour le régime général, la durée de cotisation atteint les 40 années contre 37,5 ans précédemment.

• 1995 : la réforme Juppé se heurte au secteur public

Nous sommes en novembre 1995. Jacques Chirac est l’actuel président de la République. Son Premier ministre, Alain Juppé, souhaite lui aussi réformer le système de pension. Il propose alors un plan de redressement de la Sécurité sociale et une réforme du système de retraite des agents du service public.

Pendant plusieurs semaines, les fonctionnaires de l’État se mettent en grève et bloquent le pays. Le Premier ministre recule et renonce à sa réforme retraite.

• 2003 : la réforme Fillon pour consolider celle de Balladur

La réforme du ministre des Affaires sociales du gouvernement Raffarin, François Fillon, vient en complément de celle d’Édouard Balladur en 1993. Pour permettre au système de se rééquilibrer, il mise sur un alignement de la durée des cotisations des fonctionnaires sur le régime général, soit 40 ans. Cette durée s'allongera de manière progressive pour l'ensemble des actifs à 41 ans en 2012.

• 2007 : Nicolas Sarkozy s’attaque aux régimes spéciaux

Cette réforme concerne les régimes spéciaux des sociétés du service public comme la RATP, la Banque de France, GDF etc. Certaines professions à statut particulier comme les clercs de notaire sont également concernées. Pour ces personnes, la durée de cotisation passe de 37,5 à 40 ans. La réforme entraînera des grèves qui n’entraveront pas son entrée en vigueur.

• 2010 : la réforme Woerth sonne la fin de la retraite à 60 ans

Si la réforme de la retraite à 60 ans restera comme une des plus grandes avancées sociale pour le pays, celle qui contribue à l’annuler est logiquement considérée comme l'une des plus impopulaires.

Cette seconde réforme des retraites sous la présidence de Nicolas Sarkozy est impulsée par le ministre du Travail Eric Woerth. La retraite à 60 ans n’est plus. L’âge légal de départ est porté à 62 ans. Les manifestations et les mobilisations massives dans toute la France n’y changeront rien.

• 2014 : Marisol Touraine décide d'allonger la durée de cotisation

La réforme de la ministre des Affaires sociales de François Hollande prévoit un allongement de la durée de cotisation à 43 années pour bénéficier d’une retraite à taux plein.

 

Presque 10 ans plus tard, c’est une nouvelle proposition d’évolution du système qui est débattue depuis lundi à l'Assemblée nationale.

La dernière d'une longue liste, ou le nouvel épisode d'un feuilleton qui dure depuis plus d'un siècle ?

 

 

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