Territoriales 2021 en Corse : le pari de la désunion payant pour les nationalistes

Avec la fin de l'accord Pè a Corsica, ce sont 4 listes nationalistes qui se sont présentées en Corse aux élections territoriales. Une stratégie risquée qui s'est avérée payante : toutes listes confondues, le vote nationaliste a convaincu près de 2 électeurs sur 3 au premier tour.

Un premier tour "extrêmement positif", au-delà de "toutes les estimations les plus optimistes". C'est avec une joie et un soulagement non-dissimulés que Gilles Simeoni, ses colistiers, et ses partisans ont accueilli les résultats du premier tour des élections territoriales, ce dimanche 20 juin, en fin de soirée. 

Pour cause : arrivée en tête avec 29,19 % des suffrages, le leader de "Fà populu inseme" part dans une excellente disposition pour le second tour. Et tant pis si certains ambitieux pronostiquaient jusqu'à 35 % pour écraser toute concurrence. Le président sortant de l'exécutif remporte un peu plus de 4 % de voix que son adversaire principal, le maire d'Ajaccio les Républicains Laurent Marcangeli. 

Progression du vote nationaliste

Au-delà de la victoire de Gilles Simeoni, c'est - presque - l'ensemble du clan nationaliste qui triomphe. Les quatre listes en course - Fà Populu Inseme (Gilles Simeoni) Corsica Libera (Jean-Guy Talamoni), Avanzemu (Jean-Christophe Angelini) et Core in Fronte (Paul-Félix Benedetti) - ont récolté, en cumulé,  plus de la moitié des suffrages exprimés. Sur les 134.454 bulletins déposés dans les urnes pour ce premier tour, 77.580 l'ont été en faveur d'une liste nationaliste, soit 57,77 % des voix. 

C'est 5 % de plus qu'en 2017 - le vote nationaliste toute listes confondues était alors de 52,05 % ou 62.1777 voix au premier tour -, et plus du double du score remporté aux élections territoriales de 2015 - 27,93 %, ou 37.407 voix, soit 40.173 voix supplémentaires en l'espace de six ans -.

Incertitudes avec la fin de Pè a Corsica

Les dés étaient pourtant loin d'être jetés. Grande première depuis 2015, c'est désunis que les nationalistes ont choisi de se présenter. Fini la coalition Pè a Corsica, qui avait permis aux trois listes de remporter 41 sièges sur les 63 qui composent l'hémicycle (18 revenus à Femu a Corsica, 13 pour Corsica Libera et 10 pour le Partitu di a Nazione Corsa), et à Gilles Simeoni d'accéder au siège de président de l'exécutif. 

L'alliance, pourtant prévue pour durer jusqu'en 2025, n'a pas tenu le choc face aux dissensions internes, et peut-être aussi face aux égos, se murmure-t-il, d'un Gilles Simeoni et d'un Jean-Christophe Angelini, décidés à montrer qu'ils sont en capacité de rassembler en leur nom plutôt qu'en celui du collectif. 

Simeoni vainqueur

Le pari était risqué. Il semble pourtant avoir été payant. Gilles Simeoni trotte en tête, et remporte même des villes traditionnellement de droite, telles que Corte (30,93 % contre 28,19 % pour Laurent Marcangeli) ou Sartène (22,09 % contre 17,16 % pour Laurent Marcangeli).

Jean-Chirstophe Angelini consolide lui sa position de troisième homme du scrutin, avec 13,22 % des suffrages exprimés. Un joli score, et une "grande fierté" pour le leader du PNC, qui a tenu à rappeller qu'il s'agissait de sa "première élection territoriale en tant que candidat".  Autre bon point pour le maire de Porto-Vecchio, la validation "de l'action municipale [qu'il] mène depuis une année". Il décroche ainsi 2.244 voix dans la cité de sel, soit 45,1 %, loin devant la liste "Un soffiu novu", en seconde position avec 17,55 %.

Corsica Libera manque la barre des 7 % à quelque voix près

Jean-Guy Talamoni, chef de file de Corsica Libera, apparaît finalement comme le seul lésé de l'histoire. Les premières estimations de la soirée laissaient entendre une bonne nouvelle : 7,3 %, puis même 8,2 % pour "Fà Nazione", indiquées par l'institut Ipsos Sopra-Steria à 20h30 et 20h30. Mais les scènes de liesses ont rapidement laissé place à la désillusion : la barre des 7 % n'est finalement pas franchi à 130 voix près.

Un douloureux résultat qui ôte la possibilité au parti indépendantiste de se présenter, seul, au second tour. La liste Corsica Libera perd également des voix comparativement à sa dernière candidature en solitaire, au premier tour des élections territoriales de 2015 : le parti recensait alors 10.353 voix (7,73 %) contre 9.280 (6,9 %) à présent. Pas le temps pour autant pour le président sortant de l'Assemblée de Corse de lêcher ses plaies : s'il entend se maintenir le 27 juin, il lui faudra désormais fusionner. La question étant de savoir avec qui.

Dimanche 20 juin, dans la soirée, aucun contact n'avait à priori été établi avec les autres composantes nationalistes. Jean-Guy Talamoni précisait, lui, attendre de possibles propositions, qui seraient analysées "par le mouvement et l'ensemble de ses responsables" : "Pour qu'un rapprochement soit possible, il faut que des gens vous tendent la main, ce qui n'est pas le cas à l'heure où on se parle", disait-il au soir du premier tour sur le plateau de France 3 Corse ViaStella. 

Core in Fronte, première puissance indépendantiste

Reste enfin le cas de Paul-Félix Benedetti, tête de liste du mouvement Core in Fronte. Les scènes de liesse ont duré jusqu'au petit matin : crédités de 8,39 %, les colistiers de "Da per noi" accèdent seuls à la seconde étape du scrutin, et s'imposent comme la première force indépendantiste de Corse.

Une revanche après la déception des élections de 2017, durant lesquelles le parti avait manqué le passage au second tour à quelque 300 voix, avec 6,69 % des suffrages. Plus impressionnant encore, en 2015, le parti n'avait été crédité que de 2,58 %, ou 3.451 votes, soit une progression de près de 6 %.

A cette heure, aucune fusion entre les quatres composantes nationalistes n'a été annoncée pour le second tour. Mais les rendez-vous et les échanges téléphoniques vont déjà de bon train. Mais quelle que soit l'issue le 27 juin prochain, un constat s'impose déjà : le vote nationaliste continue encore de faire des adeptes, six ans après la première mandature autonomiste de l'île.

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