Promulguée le 14 avril par le président de la République, la loi sur la réforme des retraites fait toujours débat, tant dans la rue qu'à l'Assemblée nationale. Alors que certains espèrent une nouvelle motion de censure, le groupe Liot, auquel appartiennent notamment les trois députés nationalistes corses, pourrait avoir de nouveau une place centrale.
Le "cheminement démocratique" de la réforme des retraites "n'est pas encore arrivé à son terme". Un peu moins d'une semaine après la promulgation du projet de loi par le président de la République, - dans la foulée de sa validation par le Conseil constitutionnel -, le président de Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (Liot), Bertrand Pancher, a fait savoir l'intention du groupe parlementaire de déposer, demain, jeudi 20 avril, une proposition de loi visant à l'abroger.
Celle-ci viserait l'article 7 de cette réforme des retraites, soit celui concernant l'âge de départ, qui repasserait ainsi de 64 à 62 ans. "Nous voulons faire en sorte que le président Macron ne décide pas tout seul", indique Bertrand Pancher.
Nous voulons faire en sorte que le président Macron ne décide pas tout seul
Bertrand Pancher
"Il doit écouter l'ensemble des Françaises et des Français. 80% des Français sont contre cette réforme, les organisations syndicales sont contre. Le Parlement n'avait pas eu à se prononcer [les députés n'ont pas voté le texte, la Première ministre ayant eu recours à l'article 49.3 pour faire passer la réforme à l'Assemblée nationale, ndlr]. Nous voulons faire en sorte que cette fois-ci il se prononce, et sur la mesure d'âge, soit le côté le plus remis en cause dans cette loi."
Une proposition de loi qui serait débattue et votée dans le cadre de la niche parlementaire du groupe, le 8 juin prochain, et ne nécessiterait qu'une majorité simple pour être approuvée, contre une majorité absolue pour une motion de censure.
Pas de nouvelle motion de censure
Fin mars dernier, le groupe parlementaire, le plus petit de l'Assemblée nationale avec 20 députés, était déjà à l'origine d'une motion de censure du gouvernement. Transpartisane, celle-ci avait échoué à 9 voix petites voix près. Poussés, notamment par la France Insoumise, pour remettre le couvert, les députés Liot semblent en avoir à cette heure évacué l'idée.
"Si nous déposions une motion de censure, ce serait d'abord notre groupe qui le déciderait, et pas les autres. Et il faudrait pour cela qu'il y ait un fait nouveau sur le plan politique", tranche Bertrand Pancher.
Quel impact sur le processus de Beauvau ?
Reste que même sans nouvelle motion de censure, et alors que les trois députés nationalistes sont membres du groupe Liot, cette proposition de loi pourrait engendrer de nouvelles crispations du côté du gouvernement. Des tensions pas vraiment bienvenues dans le cadre des négociations autour de l'avenir institutionnel de la Corse, engagées depuis plusieurs mois avec Paris.
Des discussions qui sont d'autant plus comme suspendues depuis maintenant plusieurs semaines... Mais pour Michel Castellani, député de la première circonscription de Haute-Corse, il y a là deux sujets différents, qui n'ont pas à être confrontés.
On ne peut pas exiger, dans une approche qui serait un peu une approche de chantage, d'influencer des députés, quels qu'ils soient, en fonction de tel ou tel projet local.
Michel Castellani
"Il y a deux choses : il y a le rapport de loyauté, le rapport personnel qu'il peut y avoir, là ce n'est pas entaché, estime-t-il. Après, il y a le fait qu'on ne peut pas exiger, dans une approche qui serait un peu une approche de chantage, d'influencer des députés, quels qu'ils soient, en fonction de tel ou tel projet local."
Michel Castellani insiste : "Nous, nous savons que les discussions sur la Corse sont importantes. Elles sont indispensables, parce qu'il y a des questions économiques, culturelles, sociales de haut niveau qu'il va enfin falloir traiter sur le fond. Et donc cela ne peut être impacté par le calendrier du palais Bourbon."
Alors cette démarche du groupe Liot poussera-t-elle le gouvernement à accélérer le processus à l'endroit de la Corse ? Ou au contraire, Emmanuel Macron et le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, se raidiront-ils ? Réponse, à ce sujet, dans les prochaines semaines.