La confiscation obligatoire des biens mafieux adoptée à l’Assemblée nationale : « La brèche est ouverte, le temps du déni est terminé »

Ce mardi 5 décembre, l’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité la proposition de loi pour améliorer le dispositif de confiscation des biens mafieux. Elle comprend un amendement rendant ces confiscations obligatoires. Une disposition que défend avec acharnement le collectif antimafia Massimu Susini depuis quatre ans.

« C’est capital », répète Jean-Toussaint Plasenzotti, porte-parole du collectif anti-mafia Massimu Susini. Ce mardi 5 décembre, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture, à l’unanimité, la proposition de loi afin d’améliorer l’efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels.

Le texte comporte un amendement particulièrement attendu par le collectif : la confiscation obligatoire des biens. « Les mafieux ont moins peur de la prison que de la confiscation. Jusqu’à présent, elle était facultative, c’était au juge de faire la démarche. Si les enquêteurs n’avaient pas réalisé d’enquête de patrimoine, une partie de celui-ci échappait à la justice, car la personne incriminée avait la possibilité de le vendre. Là, ce n’est plus possible, elle devient obligatoire, sauf motivation. Tout sera bloqué dès la mise en examen », détaille Jean-Toussaint Plasenzotti.

Si le collectif est « satisfait » de cette avancée « décisive », elle reste « une étape ». « La brèche est ouverte, le temps du déni est terminé. C’est un gros coup porté au crime organisé et d’autres grosses évolutions sont en cours », précise l’avocat honoraire et membre du collectif Massimu Susini, Jérôme Mondoloni. Ces dernières comportent notamment l’évolution du statut de collaborateur de justice, puis la création d’un délit d’association mafieuse. « Si le statut de repenti est renforcé, cela portera un second coup terrible. On ne lâchera rien », prévient Jérôme Mondoloni.

Mise à disposition au profit des collectivités territoriales

Autre évolution adoptée par les députés : la mise à disposition de biens confisqués aux collectivités territoriales, notamment défendue par le député Paul-André Colombani. Ainsi, si l’État reste propriétaire du bien, les collectivités en auront la gestion et pourront, par exemple, accueillir des projets sociaux.

« Jusqu’ici, l’Agrasc (Agence de Gestion et de Recouvrement des Avoirs Saisis et Confisqués), selon les biens confisqués, devait trouver une association qui avait le droit de bénéficier du bien. Cette agence fait son maximum, mais il s’agit de magistrats qui ne connaissent pas la réalité du terrain. Les collectivités territoriales sont plus proches des associations locales et elles connaissent mieux le terrain. Elles pourront faire un choix plus cohérent. C’est quelque chose avec laquelle les magistrats sont tout à fait d’accord », explique Fabrice Rizzoli, enseignant de géopolitique des criminalités et cofondateur de l’association Crim’HALT qui vise à l’émancipation des citoyens face à toutes les formes de criminalité préjudiciables à la société.

Cette disposition est défendue depuis 2009 par l’association. En 2016 et 2021, deux propositions de loi avaient été déposées en ce sens. Dans les deux cas, les députés les avaient retoquées précisant que « ce n’était pas souhaitable. »

« Les hommes politiques ne peuvent plus se cacher derrière leur petit doigt »

Les politiques, auraient-ils évolué quant à la prise en compte du crime organisé ? « Il y a une évolution politique, c’est certain. Les hommes politiques sont de plus en plus dans l’impossibilité de se cacher derrière leur petit doigt », rétorque Jérôme Mondoloni qui souligne l’implication des députés Paul-André Colombani et Laurent Marcangeli.

« Ils nous ont soutenus avec beaucoup de constance. Cela fait plaisir de voir qu’ils ont eu le courage de défendre ces amendements qui dérangeaient beaucoup de monde, continue-t-il. Nos députés insulaires ont été très rapidement à l’écoute, ils ont compris l’urgence à réagir. C’est un problème national, il y a un danger mafieux, la criminalité est là et de plus en plus. »

Avec ces amendements, Jean-Toussaint Plasenzotti espère montrer que « des gens de la société civile peuvent changer les choses avec la loi. » « Nous montrons que c’est possible, nous nous dotons d’outil avant que la mafia ne prenne le pouvoir. Mais le chemin est encore long », tempère-t-il.

Néanmoins, après plus de quatre ans d’un combat acharné, le collectif Massimu Susini a obtenu « des lois qui vont s’appliquer à la France entière. » « On se dit que lorsqu’un bien sera utilisé à des fins sociales, en Bretagne par exemple, on y sera pour quelque chose et on sera content. L’important est de se défendre à armes égales contre le crime organisé et le renvoyer à la marginalité », décrit Jean-Toussaint Plasenzotti.

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