Fin février dernier, les négociations entre syndicats des médecins libéraux et Assurance maladie autour de la convention médicale avaient abouti à un échec. Ce 24 avril, un règlement arbitral a été présenté. Il prévoit notamment l'augmentation du tarif des consultation de 25 à 26,50 euros pour les médecins généralistes, et des aides pour faciliter l'embauche d'assistants médicaux.
1,50 euro de plus par rendez-vous médical. Le prix de la consultation chez un médecin généraliste coûtera bientôt 26,50 euros, contre 25 euros actuellement ; celle chez un spécialiste 31,50 euros, contre 30 euros aujourd'hui.
Deux mois après l'échec des négociations entre les syndicats des médecins libéraux et l'Assurance maladie, portant notamment sur la revalorisation du tarif des consultations, Annick Morel, ancienne inspectrice des affaires sociales, désignée pour arbitrer le conflit, a tranché ce lundi 24 avril.
Une augmentation actée dans un règlement arbitral qui doit désormais être soumis au ministre de la Santé. François Braun a déjà annoncé son intention d'approuver "dans les jours qui viennent" ce texte comportant "des avancées importantes pour l'amélioration de la santé des Français".
Des revalorisations qui devraient de fait entrer en vigueur "à l'expiration d'un délai de six mois", selon ce document que l'AFP a pu consulter, soit à partir de la fin octobre. Une mesure chiffrée à 600 millions d'euros en année pleine par l'Assurance maladie.
Des augmentations en deçà des espérances des syndicats
Annick Morel a ainsi choisi de reprendre telle quelle la hausse proposée par la Sécurité sociale, offre pourtant décriée comme de la "provocation" par les syndicats des praticiens libéraux. Ils réclamaient, pour les généralistes, au moins 30 euros par consultation. Une façon, défendait alors le syndicat MG France, de rattraper l'inflation, alors que le tarif n'a pas augmenté depuis 2017.
Antoine Grisoni, président de l'Union régionale des professions de santé de Corse, l'admet ce lundi : "Nous ne nous attendions à rien de spécial avec ce nouveau règlement. Nous avions déjà eu des informations comme quoi il serait appliqué ces revalorisations à minima. Bien sûr, elles sont largement insuffisantes."
Les 26,50 euros étaient justement l'un des points qui ont fait échouer les négociations conventionnelles.
Antoine Grisoni, président de l'URPS de Corse
Ex-médecin généraliste, désormais retraité, Antoine Grisoni reproche un texte et plus globalement des discussions qui n'ont "strictement rien accompli. Les 26,50 euros étaient justement l'un des points qui ont fait échouer les négociations conventionnelles."
En février, les six syndicats représentatifs du corps de médecine libérale s'étaient conjointement opposés à la proposition d'un deuxième niveau de prix, en parallèle des 1,50 euro supplémentaires par consultation. De l'ordre cette fois de 30 euros pour les généralistes, ce tarif aurait été soumis à la condition pour les praticiens d'accepter certaines contreparties : à savoir prendre plus de patients, accepter des gardes de nuit, travailler le samedi matin, ou encore exercer dans un désert médical.
"Il n'y a plus de zones sur-dotées" médicalement
Un dernier point qui fait justement tiquer le président de l'URPS de Corse : "Il faut arrêter avec ce fantasme des zones sous-dotées. Toutes les zones sont pratiquement maintenant sous-dotées, les zones "sur-dotées", s'il y en a encore, elles ne le seront plus longtemps."
Antoine Grisoni souligne l'absence dans le document de la haute fonctionnaire de la question d'engagement territorial, "la seule vraie avancée de ce texte". "Pour l'heure, cela ne s'applique pas, tant mieux. Mais on imagine bien que c'est uniquement une suspension, puisque pas plus loin que la semaine dernière, des députés ont déjà déposé une proposition de loi dans ce sens."
C'est insupportable de dire : on va envoyer des jeunes dans des zones sous-dotées de manière générale, et pas seulement dans le cadre médical. Il n'est pas question de jeter des jeunes en pâture.
Antoine Grisoni, président de l'URPS de Corse
Aujourd'hui, estime-t-il, "ce qu'il faut surtout faire, c'est sécuriser les jeunes médecins, avec des rémunérations correctes, et il appartient aussi aux territoires, et ils le font, de construire des solutions, des structures locales, pour les y retenir. Ce n'est pas à l'Etat d'aller définir comme cela, manu militari, des installations là où il n'y a plus de service public dans son ensemble. C'est insupportable de dire : on va envoyer des jeunes dans des zones sous-dotées de manière générale, et pas seulement dans le cadre médical. Il n'est pas question de jeter des jeunes en pâture."
"Il ne faut pas des contraintes, mais des incitations"
Ce qu'il faut, insiste l'ex-médecin retraité, "ce ne sont pas des contraintes, mais des incitations". "Il faut aussi simplifier l'accès à des aides financières au recrutement d'assistants médicaux, qui pourront alléger cette charge administrative de plus en plus lourde pour les médecins. Aujourd'hui, il faut aussi faire évoluer les procédures, qui ont 20 ans, et n'ont toujours pas évolué avec leur temps."
Antoine Grisoni pointe désormais deux principaux enjeux : relancer, dans un premier temps, les négociations conventionnelles entre syndicats et Assurance maladie, et réfléchir, ensuite, "à modifier le financement du système de soin en France, et peut-être même en Europe, qui est issu de l'après-guerre et ne fonctionne plus. On doit trouver aujourd'hui d'autres sources de financement, et faire en sorte d'avancer, sans que cela n'impacte de façon supplémentaire les citoyens, qui ont déjà eux aussi à subir l'inflation, et toutes les problématiques actuelles."