Un projet de charte nommé Pace e ritornu in libertà (Paix et retour à la liberté) a été présenté ce mercredi 29 mars par le président de l'Exécutif et le président de l'Assemblée de Corse.
L'objectif de la charte Pace e ritornu in libertà est de favoriser la réinsertion et l'emploi des prisonniers nationalistes. C’est aussi, pour Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de Corse, un message adressé à l’État :
« Aujourd’hui la Corse est dans une ère nouvelle, une ère de paix. Cette paix, il faut la consolider, l’enraciner, la nourrir, et nous y participons à travers ce projet, ce programme. Il s’adosse aux valeurs culturelles de solidarité porté par le peuple corse. Un programme qui est aussi une façon de dire : c’est toute la société corse et pas seulement les nationalistes qui s’impliquent dans le processus de réinsertion professionnelle des anciens prisonniers politiques. C’est une façon aussi de dire à l’État : il faut avancer sur les revendications qui sont celles de l’amnistie et celle du rapprochement, il faut avancer vite. »
L’emploi, la clef de la réinsertion
Comment vivent alors les anciens détenus en réinsertion professionnelle ? Pour Emmanuel Peru, la question de la réinsertion ne s'est jamais posée. Après trois ans de détention, ce père de deux enfants a été réembauché par son employeur dès sa sortie. Son procès pourrait avoir lieu au printemps 2018. Militant nationaliste depuis l'adolescence, il est actuellement en liberté sous contrôle judiciaire.
« Quand vous faites une demande de remise en liberté provisoire, la première chose qu’ils vous demandent, c’est un emploi, une situation. Le travail m’a beaucoup fait oublier la prison et pas mal de choses. Cela vous change de la détention, de tous », témoigne-t-il.
Sampieru Andreani a lui vu sa peine s’achever en septembre dernier. Grâce à un ami, il a trouvé rapidement un emploi. Il travaille dans une pépinière qui dépend de la Collectivité Territoriale de Corse.
« Ils cherchaient quelqu’un pour remplacer un poste, c’est-à-dire quelqu’un qui était en arrêt longue maladie. Comme une partie de mon cursus et de mon expérience professionnelle correspondait à ce poste et qu’ils ne trouvaient personne en interne, on me l’a proposé. Je l’ai accepté, je n’avais rien. J’ai fait une période d’essai, là je suis en CDD », explique cet ancien prisonnier nationaliste.
Pour favoriser l'embauche des prisonniers et des anciens recherchés nationalistes, une charte sera proposée au vote de l'Assemblée de Corse. La notion de prisonnier politique y est entendue au sens de la loi d'amnistie de 1989.
Elle englobait les infractions commises à « l'occasion d'évènements d'ordre politique ou social en relation avec une entreprise tendant à modifier le statut de la Corse ». Le rapport est cosigné par Jean-Guy Talamoni et Gilles Simeoni. Les membres de Sulidarità attestent des difficultés d'insertion que rencontrent les anciens détenus.
« Lorsque l’on vous demande un CV, le fait d’avoir un casier judiciaire pose problème. Par exemple, quand vous avez fait 19 ans de prison comme Charles Santoni [NDLR : condamné en 1999 à 28 ans de prison pour le meurtre d’un policier du Raid lors d’une fusillade, le 16 avril 1996 à Ajaccio], il y a un blanc de 19 ans sur son CV, on peut se poser la question de savoir ce qu’il s’est passé pendant ces années », affirme Katy Bartoli, membre de l'Associu Sulidarità.
Une trentaine de personnes sont aujourd'hui concernées par ce texte. Cette démarche vient en complément de la demande d'amnistie formulée auprès du gouvernement.