Mardi 30 août, les deux potentiels repreneurs du groupe La Provence ont trouvé un accord. Un accord qui laisserait l'armateur CMA CGM à la tête du groupe de presse, face à son concurrent Xavier Niel, fondateur de Free. Dans le même temps, cet accord met fin à des années de procédures judiciaires.
Après des années de procédures judiciaires, l'avenir du groupe de presse La Provence semble fixé. Mardi 30 août, un accord a été trouvé entre les deux concurrents, l'amateur CMA CGM et Xavier Niel, fondateur de Free, qui se déchiraient le rachat des 89 % de La Provence, propriété du Groupe Bernard Tapie, homme d'affaires décédé en octobre.
Ainsi, l'armateur CMA CGM devrait diriger le groupe de presse d'ici la fin septembre. le groupe de presse va enfin disposer d'un "actionnaire unique stable", saluent l'armateur et NJJ, la holding de Xavier Niel, dans un communiqué commun.
Les deux groupes ont en effet annoncé mardi avoir signé "un accord de rachat par CMA CGM portant sur l'intégralité des titres détenus par NJJ au capital social de La Provence", soit 11 %.
Sous réserve que la cession à CMA CGM des 89 % de La Provence détenus par GBT soit validée par le tribunal de commerce de Bobigny le 30 septembre, le poids lourd du transport maritime, basé à Marseille, devrait donc devenir le seul maître à bord du groupe de presse phare du sud de la France, fort de 850 salariés, qui publie les quotidiens La Provence et Corse Matin.
"Je me réjouis de cet accord. Il va nous permettre de travailler avec l'ensemble des salariés de La Provence et de Corse Matin à la mise en place de notre projet de développement et de redressement", a réagi Rodolphe Saadé, PDG de CMA CGM, dans un message transmis à l'AFP.
Même soulagement pour le liquidateur judiciaire Marc Sénéchal, qui se félicite auprès de l'AFP d'avoir pu "trouver dans les dernières semaines", "par un dialogue direct et constructif", "une solution qui satisfait l'ensemble des parties et préserve les intérêts de tous".
Fin du "combat des chefs"
L'accord entre les deux mastodontes de l'économie, qui s'affrontaient depuis des mois devant les tribunaux sur ce dossier, prévoit également la création d'une co-entreprise afin de "développer une nouvelle imprimerie dans le Var", expliquent-ils dans leur communiqué commun.
Cette dernière "a vocation d'ici fin 2024 à assurer l'impression de l'ensemble" des titres des groupes La Provence, hors Corse-presse, et du quotidien régional Nice-Matin, propriété de Xavier Niel, qui est également actionnaire du Monde à titre individuel.
"C'est un soulagement, surtout pour l'ensemble des collaborateurs, dans l'attente de cette décision depuis dix mois", a commenté auprès de l'AFP Jean-Christophe Serfati, le président de La Provence, soulignant combien "il n'est jamais facile de diriger une entreprise sans actionnaires".
Quant au plan de reprise proposé par CMA CGM, "il nous rassure, car il nous permettra de nous développer", a ajouté M. Serfati, en rappelant que pendant toute la période Bernard Tapie, depuis 2013, "les investissements étaient bloqués par les procédures en cours". "Maintenant, il va falloir rattraper le retard !", a-t-il plaidé. "Le soulagement de voir enfin le bout du tunnel domine", a abondé dans un communiqué le Syndicat national des journalistes (SNJ).
"Pour autant, de nombreuses questions restent en suspens. Qui pour diriger l'entreprise ? Qui pilotera la rédaction ? Quelles conséquences cet accord aura-t-il sur l'emploi ? Quels seront les impacts d'une rotative dans le Var en termes d'horaires de bouclage ?", s'interroge-t-il.
Au terme d'un second appel d'offres lancé en février, seul le projet de reprise de CMA CGM avait été retenu par les coliquidateurs judiciaires, car "mieux-disant", à 81 millions d'euros contre 20 millions pour celui de Xavier Niel. Cette offre avait également été validée par les six comités sociaux et économiques (CSE) de l'entreprise.
Pour remporter la mise, Xavier Niel, via Avenir Développement (AD), filiale de sa holding NJJ, avait tenté de faire valoir son droit de veto en tant qu'actionnaire minoritaire. Mais le tribunal de commerce de Marseille avait à deux reprises suspendu cette clause d'agrément, estimant que sa mise en œuvre manifesterait un conflit d'intérêts.
"Le combat des chefs est terminé", ce qui est "très positif pour La Provence, car on arrête (...) cette bataille sans fin", s'est félicitée pour sa part Catherine Szwarc, avocate de trois CSE de La Provence.
Le groupe La Provence compte 850 salariés, dont 200 évoluant en Corse.