Au lendemain de la conférence de presse clandestine du FLNC, tour d'horizon des premières réactions politiques, entre crainte d'un retour à la violence et inquiétudes autour du processus de discussions entre la Corse et Paris.
Une telle communication n'avait plus été revue depuis septembre 2021.
Lors d'une conférence de presse clandestine, le FLNC a fustigé le processus d'autonomie en cours, jugeant cette évolution institutionnelle incapable "de préserver le peuple corse dans sa survie". Le groupe armé a également rappelé les 45 actions qu'il a revendiquées depuis octobre dernier.
Alors que le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin est attendu sur l'île début février "pour faire un point d’étape et recueillir la contribution de l’ensemble des acteurs", certains craignent une remise en cause du processus de négociation avec l'État et, plus largement, un regain de violence.
Laurent Marcangeli, député de Corse-du-Sud, président du groupe Horizons à l’Assemblée nationale
"La Corse a besoin de paix et de projet. La paix exclut toute action clandestine et violente.
Les projets sont définis par les élus du suffrage universel, démocratiquement désignés par le peuple pour parler en son nom.
Le dialogue en cours doit aboutir dans l’intérêt de la Corse et de ses habitants. La violence est un retour en arrière qui fait du mal à notre île."
Jean-Charles Orsucci, maire de Bonifacio et soutien de la majorité présidentielle
"Je m’interroge sur la notion de communauté de destin remise en cause par les clandestins du FLNC hier. Le FLNC ne nous dit d’ailleurs toujours pas qui est Corse et qui ne l’est pas et sur quels critères.
Je cherche aussi le lien entre les attentats et la situation au Proche-Orient.
À l’heure où le gouvernement cherche avec les élus de la Corse une solution politique apaisée et institutionnelle pour résoudre une partie des problèmes, cette communication n’est pas opportune et inquiétante."
Jean-Jacques Panunzi, sénateur Les Républicains de Corse-du-Sud
"C’est un message très important que nous envoie le mouvement indépendantiste, qui doit nous interpeller à plus d’un titre. Le premier point sur lequel je peux faire un constat, c’est qu’il n’est pas d’accord sur les discussions menées entre les nationalistes et le gouvernement. Il fallait s’y attendre.
On ne peut pas revenir à la lutte armée, nous sommes en démocratie, mais dans un processus aussi important, on ne peut pas se permettre de tenir à l’écart les autres partis. On ne peut pas les laisser au bord du chemin, il faut un consensus général. Aujourd’hui, on en est loin. La méthode n’est pas la bonne et c’est pour cela qu’il y a des blocages.
La priorité aurait dû être une consultation auprès des Corses. Ce n’est qu’après que nous aurions pu travailler sur un nouveau processus institutionnel. Cette communication du FLNC ne m’inquiète pas, mais cela sème le trouble."
Valérie Bozzi, coprésidente du groupe Un Soffiu Novu à l’Assemblée de Corse
"Il y a des élus qui ont été désignés démocratiquement et la démocratie doit bien sûr primer dans ces discussions. C'est d'ailleurs pour ça que nous participons aussi activement à ce processus.
Et je crois que si on veut que les choses avancent, il faut discuter avec les élus de la République que nous sommes. Et c'est ce que fait l'État, encore une fois, dans l'intérêt des Corses. C'est ce qui a toujours été demandé.
Donc aujourd'hui, la fracture qui existe dans le mouvement nationaliste ne doit pas mettre en péril ces discussions et les intérêts d'une évolution institutionnelle pour notre île."
Jean-Martin Mondoloni, coprésident du groupe Un Soffiu Novu à l’Assemblée de Corse
"On a une réaction clandestine presque prévisible compte tenu du fait que nous sommes en négociation, et que dans une négociation, il y a des recherches de compromis et qu'en général, les compromis déplaisent à ceux qui fixent la barre très haut et ce d'autant lorsqu'ils ne participent pas à ces négociations.
Par ailleurs, j'ai lu attentivement le communiqué où il est question de compromis entre, je cite, la majorité territoriale et la droite insulaire. Je voudrais dire qu’il n'y a pas de troc avec la majorité territoriale : chacun vient travailler avec ses convictions, son ADN, sa trajectoire, son histoire. Il n'est pas question de troquer quoi que ce soit qui contreviendrait à nos engagements devant les électeurs.
Je crois qu'on est dans un processus tout à fait transparent où les uns et les autres essaient de chercher dans cette fenêtre de tir que nous permet ce processus - que nous n'avions pas demandé - des solutions aux problèmes qui se posent depuis très longtemps à la Corse."
Jean-Christophe Angelini, président du groupe Avanzemu
"Nous avons pris acte de cette communication comme l'ensemble des acteurs politiques de Corse.
Nous avons, au PNC et Avanzemu, une position constante relativement à la clandestinité, à la violence politique. Nous pensons qu'elles ne sont pas la réponse et qu'elles n'obéissent à aucune logique dans le contexte, sinon celle du conflit.
Notre point de vue, c'est qu'il faut aujourd'hui dépasser cela et, au contraire, tendre vers un dialogue démocratique à ciel ouvert entre l'ensemble des Corses au sein de notre peuple et bien sûr, avec l'État, pour essayer d'imaginer cette solution politique et cette autonomie qui semble accessible, pour ne pas dire à portée de main."
Contacté, le président de l'Exécutif Gilles Simeoni n'a pas souhaité s'exprimer. Femu a Corsica n'a, pour l'heure, pas répondu à nos sollicitations, tout comme Core in Fronte.
Retrouvez le reportage de Jean-Philippe Mattei :