Le bulletin de la Société, qui existe depuis 1881, est l'un des socles sur lesquels repose la connaissance scientifique de l'île, de l'Histoire à la Zoologie. Mais l'institution peine à trouver sa place dans notre époque. Et les abonnements ne cessent de baisser...
"La suprématie de la vaisselle italienne", "La politique douanière menée en Corse de 1768 à 1793", "La vigne et le vin dans la littérature d'expression corse", Promenade dans Rome sur les traces des Corses au service du Pape", "Guerre et guérilla durant les guerres du XVIe siècle en Corse (1553-1569)", "De quelques aspects des relations entre Carthage et la Corse"....Les titres de quelqu'uns des articles parus dans le bulletin de la Société des Sciences Historiques et Naturelles de la Corse évoquent immanquablement les énoncés de cours magistraux universitaires.
Une somme de connaissances sans fin
Et ce n'est guère étonnant, comme nous l'explique Françis Beretti, le trésorier de la société, et l'une de ses chevilles ouvrières : "La revue a pour but de recueillir des documents et des mémoires concernant l'histoire de la Corse, et de développer en Corse l'étude des sciences naturelles. ce sont des érudits locaux qui nous donnent des documents inédits, publiés tels quels dans le bulletin".Le bulletin, une revue qui existe depuis 1881, et qui a été fondée, comme la Société des Sciences un an auparavant par le chanoine Lucien-Auguste Letteron. Entouré d'autres figures du Bastia érudit du XIXe siècle, tels que Vincent et Sébastien de Caraffa, le baron Galeazzini ou le docteur Borghetti.
Avec pour seuls critères le caractère inédit du document, et sa rigueur scientifique.
Elle couvre tous les domaines, de l'anthropologie à la zoologie, en passant par la botanique ou l'histoire.
Le succès est immense, et le bulletin compte des centaines de lecteurs, et d'innombrables contributeurs.
La revue, comme la Société, ont aujourd'hui 140 ans.
D'abord mensuelle, puis trimestrielle, elle est désormais semestrielle.
Et continue d'être un outil formidable de sauvegarde et de transmission du patrimoine et de la connaissance insulaires.
De 220 à 160 abonnements
Pour autant, les temps sont durs pour les érudits qui continuent de perpétuer la tradition.Les abonnements ne cessent de diminuer.
En 2020, on est passé de 220 à 160 abonnements...
Pour Joseph Puccini, secrétaire de la Société des Sciences, l'explication, c'est que "les travaux de recherche sont effectués par des docteurs de l'université, des chercheurs de très haut niveau. Peut-être que le public est moins accessible à ces travaux, qui sont désormais destinés à un public de spécialistes."
Une manière polie de dire qu'à l'époque des selfies et de la téléréalité, "les observations archéologiques et pétrographiques sur les cargaisons africaines du littoral corse", au sommaire du numéro de numéro de janvier 2014, ça n'est pas franchement vendeur...
Est-ce à dire que cette institution des Humanités en Corse, vieille de près d'un siècle et demi, est vouée à disparaître ?
La solution passe peut-être par une adaptation aux réalités éditoriales du XXIe siècle.
Sans pour autant concéder quoi que ce soit en matière de contenu.
Evoluer sans se renier
L'éditeur Alain Piazzola consacré la majeure partie de son catalogue à des ouvrages sur le patrimoine de l'île.Avec succès.
L'an dernier, il a lancé Storia Corsa, une revue consacré au sujet, et distribuée en librairie.
Le tirage est ambitieux.
1000 exemplaires.
Et les premiers retours sont encourageants.
"On a fait une revue de 130 pages illustrée. On a essayé de casser l'image de revue rigide destinée aux scientifiques, elle est très documentée et en même temps grand public".
Rigoureuse, mais animée par un souci de vulgarisation, la démarche est peut-être une piste à suivre.
Reste à savoir si elle convient à l'esprit du Bulletin.
Qui devra trouver son propre modèle, pour faire face aux enjeux de l'époque, sans rien renier de l'esprit qui anime la Société des Sciences depuis 1880.