À l’occasion du match entre le Sporting et l’ACA ce samedi à Furiani, d'anciens joueurs des deux clubs ont fouillé dans leur mémoire pour évoquer leurs souvenirs de derby. Témoignages.
David Faderne (ACA) : "Le café avec Michel Moretti"
"Je n’ai joué qu’un seul derby contre le Sporting. C’était en 2002. Cela faisait trente ans que les deux clubs ne s'étaient plus affrontés en Ligue 1. Quand je suis arrivé à l’ACA en 1995, on était en National 3. J’étais alors à des années lumières de penser que j’allais disputer un jour un derby contre le SCB au plus haut niveau. En septembre 2002, on se retrouve donc à Furiani. Avant le match, nous étions à l'hôtel chez Walter. Je buvais un café avec le regretté Michel Moretti (président de l’ACA décédé en mars 2008, ndlr) qui était un peu comme mon père d'adoption. Il m'appelait "fighjulè". Autour de ce café, il m’avait alors raconté qu’il avait vu dans sa jeunesse l’ACA gagner 4-1 à Furiani (le 4 avril 1971, ndlr) avec un quadruplé de François M’Pelé. Je me souviens m’être dit que je paierais cher juste pour marquer un but dans un derby. Le soir, je suis remplaçant, je ne sais même pas si je vais rentrer. Le Sporting ouvre le score puis Bruno Rodriguez égalise sur un coup franc. Je rentre tardivement. Dans ma tête, je me disais "s’il me tombe un ballon"... Puis, en toute fin de match, sur un contre éclair, Cyril Granon centre au second poteau et je marque du plat du pied le but de la victoire. Quelques années plus tard, je suis dans un commerce à Ponte-Leccia. Quand j'arrive à la caisse, le type me dit sur le ton de la macagna : "vous, je ne peux pas vous servir, vous avez marqué contre le Sporting"…"
Yannick Cahuzac (SCB) : "Une ambiance de fou"
"Celui qui m’a le plus marqué, c’est le tout premier que j’ai joué. C’était en 2007, à Furiani, et on avait gagné 4-1. À l’époque, nous étions en Ligue 2. J’étais jeune, j’avais 22 ans, et il y avait une ambiance de fou. Avant le match, j’avais beaucoup d’appréhension. Je m’étais préparé dans ma tête pour l'aborder le plus sereinement possible. Puis on avait gagné et ça s’était bien passé. Après ce derby-là, ceux joués à Ajaccio m'ont vraiment marqué. Il y avait tellement de Bastiais qui descendaient à Timizzolu… C’était impressionnant ! En 2012, en Ligue 1, quand nous sommes sortis du vestiaire pour rentrer sur le terrain, nos supporters étaient juste au-dessus du tunnel. On avait l’impression d’être à Furiani. En tant qu’Ajaccien et Corse, il y a toujours une saveur particulière dans ces matchs-là. En plus, on joue souvent contre des coéquipiers de la Squadra corsa. La plupart du temps, c’étaient des bons matchs à jouer. Sur tous les derbies que j'ai disputés, je n’en ai perdu qu’un. C'était en 2008 à Furiani, juste après la mort du regretté Michel Moretti."
Nicolas Bonnal (ACA) : "Un fumigène sur le pied..."
"Le derby qui me vient en tête, c’est celui de la saison 2004-2005. Nous étions alors entraînés par Rolland Courbis. On avait gagné 1-0 grâce à un but de Mamadou Seck. Ce match m’avait marqué pour plusieurs raisons. Déjà, dans la préparation. La Corse est une terre de passion et d'euphorie, et rien ne vaut la semaine avant le derby. Personnellemnt, j’évitais de sortir en ville les jours précédents car les gens ne parlaient que de ça. C'est vraiment un match à part. Ceux contre l'OM et le PSG étaient également particuliers, mais rien n'égale le derby. Je me rappelle d'une partie très engagée. Le match avait été un petit peu arrêté à cause de quelques débordements en tribune. J'avais même reçu un fumigène sur le pied. Sur le coup, je n’avais pas trop compris, mais ensuite, j’avais quand même eu un peu peur. C’est assez rare dans le football. C’est pour ça que ce sont toujours des matchs assez tendus. Il y a la suprématie régionale qui est également en jeu. On sent que ce match est important pour les gens."
Mickaël Landreau (SCB) : "À pied jusqu'au stade"
"J'ai deux souvenirs bien précis liés au derby. Le premier concerne le match de mars 2013, à Furiani. On avait gagné 1-0 sur un but de Toifilou Maoulida. C'est la plus belle ambiance que j'ai connue. C'était incroyable. Il y avait eu un tifo magnifique. C'était électrique. Il y avait de l'enjeu car les deux équipes jouaient le maintien. Notre bus n'avait pas pu arriver jusqu'au stade. On avait traversé la ligne de chemin de fer à pied avec nos sacs. Nous étions passés derrière la tribune des supporters de l'ACA pour aller jusqu'au vestiaire. Ceux du Sporting nous avaient fait une haie d'honneur. Ce sont des grands souvenirs. Quelques mois plus tard (en décembre 2013, ndlr), on avait joué un derby à huis-clos, à Fos-sur-Mer. On avait fait match nul (1-1) et l'ambiance était très différente... Pour l'anecdote, c'est précisément lors de ce match contre l'ACA que j'ai officiellement battu le record de matchs en championnat de Jean-Luc-Ettori."
Mehdi Mostefa (ACA et SCB) : "Un peu comme un match de rugby"
"J'ai joué dans les deux clubs et ces matchs-là m'ont toujours fait penser au rugby : sur le terrain, on s'arrachait les cheveux. Puis, au coup de sifflet final, on se serrait la main. Il y avait parfois des échauffourées, comme celle entre Cavalli et Angoula (en 2012, ndlr). Je jouais alors à l'ACA ; nous étions tous arrivés au milieu et ça avait failli partir. À Furiani, c'était aussi parti un peu dans tous les sens après un duel entre Oliech et Landreau. C'était le jour où les supporters bastiais avait brandi le cercueil de l'ACA. En tant que joueurs, ça nous avait touché dans notre amour propre. Ce sont des choses qui illustrent souvent les derbies... Sur le terrain, on veut absolument gagner et on a souvent la hargne. Celui qui se cachait dans ce match-là, il était catalogué pour le reste de la saison. Il fallait tout donner. Avec "Cahu", quand j'étais à l'ACA, on s'est vraiment livré des combats au milieu du terrain. Sur le moment, c'était très, très chaud. Après, j'ai joué avec lui à Bastia et nous étions comme des frères. Il ne faut pas oublier que ça reste du foot. Une fois que la partie était finie, on rigolait tous ensemble. Voilà pourquoi ça me faisait penser à un match de rugby."