Ce jeudi 6 octobre, le gouvernement a présenté son plan de sobriété énergétique. Une mesure attendue depuis plusieurs semaines en réponse à la crise de l'énergie que subira la France cet hiver, qui pourrait changer le train de vie des français, y compris sur le long terme.
Faire baisser la consommation d'énergie total française et passer l'hiver sereinement. Tels sont les objectifs du plan de sobriété d'énergie lancé ce jeudi 6 octobre. Un plan attendu du fait de la crise économique qui touche d'ores et déjà la France et qui s'amplifiera cet hiver. Une crise due au contexte international et notamment la guerre en Ukraine, mais aussi la situation délicate du parc nucléaire. En effet, 28 des 56 réacteurs français sont à l'arrêt en raison de problèmes techniques, sachant que le nucléaire représente 70% de la production énergétique française.
"Des économies choisies plutôt que des coupures subies" déclare Elisabeth Borne dans l'introduction du plan. À la tribune lors de sa présentation, elle indique : "la sobriété énergétique ce n'est pas produire moins et faire le choix de la décroissance. C'est éviter les consommations inutiles et éviter de consommer tous en même temps. Ce n'est pas un effet de mode le temps d'un hiver, c'est une nouvelle manière de penser et d'agir [....] il en va de notre souveraineté, il en va de notre pouvoir d'achat." La volonté est donc de faire entrer la sobriété dans les mœurs.
Le plan se distingue en plusieurs mesures, fonction d'un large spectre de secteurs qui se portent essentiellement sur le patrimoine pâti. Il représente en effet 60% des opportunités de sobriété énergétique. La plus connue : la limitation conseillée de la température de chauffe des habitations à 19°C. Une recommandation qui ne satisfait pas toutes les personnes rencontrées sur le marché d'Ajaccio. "À la maison j'ai mon fils, et pour moi c'est l'essentiel qu'il s'y sente bien, s'il faut chauffer je chaufferai" nous dit une quadragénaire. Tout proche d'elle, une personne âgée s'emballe quelque peu : "moi je vais continuer à chauffer. Je ne vois pas pourquoi j'arrêterais alors que j'ai de l'arthrose. Basta !" Dans la halle, foulard multicolore autour du cou au stand de smoothies, une personne déclare : "Je trouve ça bien. On se comporte comme des milords, c'est pas mal si la sobriété devient la règle."
Un large panel de mesures
Outre la température de chauffe, le gouvernement requiert le décalage de la période de début et de fin de chauffe pour les particuliers. Côté collectivités, le plan demande de réduire la consommation de l'éclairage public qui représente 30% des dépenses d'électricité. Pour ce faire, passer de 40 à 80% de technologies à LED est conseillé avec un retour sur investissement entre 4 et 6 ans. De même, la température des installations sportives devraient être baissées de 2°C et d'1°C pour les piscines.
Les français pourront également être aidés à consommer moins d'énergie. Jusqu'à 9000€ d'aides pourront être fournies pour les personnes qui veulent passer d'une chaudière à gaz à une pompe à chaleur. Un bonus de sobriété pourrait également profiter aux ménages via une prime sur les factures de gaz et d'électricité.
Gilles Notton, maître de conférence en énergies renouvelables sur la plateforme de recherche de Vignola de l'Université de Corse s'en satisfait : " Ce plan est une bonne chose, et c'est bien d'arrêter de forcer les gens, mais il faut que tout le monde s'y mette. Insister sur le bâti c'est une bonne chose parce qu'il représente la plus grosse partie de la consommation d'électricité" Le chercheur soulève pourtant une problématique : "on oriente régulièrement les gens vers des chauffe-eau thermodynamiques, mais on oublie d'autres solutions comme les capteurs solaires thermiques pour l'eau chaude sanitaire par exemple. On oublie des opportunités."
Autre bémol mis en exergue par l'universitaire, la mauvaise adaptation aux territoires "certaines solutions sont préconisées mais pour la région parisienne. Il faut adapter aux régions notamment au niveau des transports en commun."
Une première étape vers la neutralité carbone
L'ambition mise en avant par la ministre de la transition énergétique Agnès Pannier-Runacher, est de débuter la sortie de la dépendance française aux énergies fossiles, tout en réduisant de 40% la consommation d'énergie d'ici 2050 : "Nous n'avons jamais été indépendants en matière d'énergie. Aujourd'hui, nous sommes exposés aux énergies fossiles à hauteur de 66% dans notre consommation d'énergie. L'enjeu, c'est de sortir ces énergies fossiles pour avoir réellement cette énergie abondante, à bas prix et qui ne fait plus de mal à notre planète".
Si le plan représente un potentiel de réduction de consommation d'environ 50TWh, reste à savoir si les français adopteront ces mesures, et si elles suffiront à diminuer la consommation énergétique du pays sur le long terme.