L'idée est simple. Et elle a vite pris de l'ampleur. Twitter en Corse, pour donner une tonalité nustrale à son fil d'actus mondialisé, et faire vivre la langue à l'heure des réseaux sociaux. Tout est parti d'un défi lancé en classe, à Corte.
Si vous avez des insulaires dans votre réseau d'amis Twitter, il y a de fortes chances que votre mur ait l'allure bien plus nustrale que d'habitude. Les statuts se multiplient, depuis ce week-end. En langue corse.
Le signe de ralliement du mouvement : #twittemu.
Ou #tweetemu.
(Il fallait s'y attendre, pour une langue dont le cœur balance entre mèrcuri et màrcuri, terra et tarra, neve et nivi).
A l'origine, un devoir de classe
Brandon Andreani est le chargé d'administration de l'association linguistique Praticalingua à Corte. Alors évidemment, il ne dissimule pas son enthousiasme.
"Quand on voit ça, pour nous, c'est Noël ! On croise des très jeunes, des anciens, des corsophones connus et des gens qui n'avaient jamais tweeté en Corse... Ca fédère beaucoup de monde. Le mouvement a largement réussi à dépasser le simple devoir de classe".
Tout est parti de l'IUT Techniques Commerciales de Corte. Petru Antone Filippi, professeur de Corse, y a lancé ce défi à ses élèves. Faire vivre un hashtag Twittemu.
"Je me disais qu'avec une centaine d'étudiants, ça serait visible sur Twitter, c'est vrai. Mais ça a pris des proportions qu'on ne soupçonnait pas !"
Très vite, beaucoup, au-delà des élèves, se sont pris au jeu. Et ont investi tous les domaines, bien au-delà de la culture corse.
Si tous les supporters de foot se mettaient à écrire en Corse...
"On voit des chansons des Chjami Aghjalesi, des vieux proverbes, des commentaires sur le chanteur Jul... Les usagers de Twitter ne tweetent pas juste pour tweeter. Ils tweetent parce qu'ils ont des choses à dire, se réjouit Brandon Andreani. Si le mouvement dure dans le temps, imaginez le résultat ! Prenez l'exemple du foot. Si tous les fans du Sporting, du Gaz ou de l'ACA écrivaient des commentaires en Corse..."
Désacraliser
Et pourquoi pas ? Le hashtag #twittemu pourrait être un vrai déblocage.
Selon celles et ceux qui tentent, chaque jour depuis bien avant l'explosion des réseaux sociaux, de remettre la langue corse au centre du quotidien, les nouvelles technologies recèlent un avantage insoupçonné.
"Il n'y a pas cette peur de se tromper, qui pénalise tant de nouveaux locuteurs, devant son clavier. On a le temps de se relire, d'aller vérifier une règle grammaticale... C'est libérateur", confie Brandon Andreani.
Les gens écrivent en français sans se poser de questions. Alors pourquoi pas en corse ?
Pour Petru antone Filippi, c'était le but. "On a tendance à sacraliser la langue corse, ça peut être inhibant. Jetez un coup d'œil aux statuts ou aux commentaires en français... Les gens l'écrivent sans se poser ce genre de questions ! On peut parler de tout en corse aussi, même si on ne le parle pas parfaitement. Le tout, c'est de commencer à le faire. Si on attend, on ne le fait jamais".
Et depuis hier, et l'apparition de #twittemu, on est beaucoup moins à attendre...