Marseille : les dépôts sauvages de déchets devant le tribunal

Quatre hommes étaient convoqués lundi devant le tribunal correctionnel de Marseille pour gestion irrégulière de déchets et abandon ou dépôt illégal de déchets. En toile de fond, la difficile gestion des déchets de chantier à Marseille.

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Un camion-benne immatriculé en Roumanie sillonnant les rues Marseille, fil rouge de cette enquête. Il s’arrête soit près d’un chantier, et charge des gravats ; soit devant un garage et remplit sa benne de pneus usagés, moyennant une poignée d’euros en espèces remis de la main à la main.

Vidéosurveillances et filatures permettront d’identifier le propriétaire du véhicule et ses clients donneurs d’ordre.

Des petites mains de nationalité roumaine

En décembre 2020 le parquet de Marseille demande aux services de police d’enquêter sur les dépôts des sauvages de déchets rue Cazemajou dans le 15e arrondissement de Marseille.

Après la mise en place de surveillances et l’utilisation de la vidéoprotection, les enquêteurs constatent que plusieurs entrepreneurs utilisent des petites mains de nationalité roumaine et vivant dans un squat, au même endroit.

Entre avril et mai 2021, l’enquête va permettre d’identifier trois donneurs d’ordre : un entrepreneur du bâtiment, un propriétaire d’immeubles et un garagiste.

À la barre de la 11e chambre du tribunal correctionnel l’entrepreneur du bâtiment, le propriétaire d’immeubles, et le garagiste. Le propriétaire du camion roumain est absent, mais représenté par son avocat.

Ils comparaissent pour notamment gestion irrégulière de déchets et abandon ou dépôt illégal de déchets ; ils encourent au maximum deux ans de prison et 75.000 euros d’amende.

90 mètres cubes de gravats

L’entrepreneur reconnait, en avril 2021, avoir contacté un homme pour utiliser les services du camion roumain moyennant le paiement de 300 euros. Constantin Grigore précise qu’il ne pouvait pas évacuer d’un seul coup les gravats de son chantier situé rue Thubaneau dans le centre-ville de Marseille.

"Ma camionnette était pleine d’outils, j’étais obligé de faire plusieurs voyages pour transporter les gravats à la déchetterie (...) je devais débarrasser le chantier rapidement, j’avais la pression (...) je n’ai jamais abandonné de gravats sur la route, je suis toujours allé à la déchetterie des Aygalades (...) pendant la crise sanitaire, j’ai stocké des gravats dans mon jardin, parce que les déchetteries étaient fermées (...) c’est la première et dernière fois que j’utilisais les services de cet homme !"

Deux autres chantiers sont identifiés dont un dans le 3e arrondissement de Marseille. Le 11 mai 2021, le camion va charger des matériaux dans une grande surface spécialisée, puis se rend au 20, rue Belle de Mai.

La marchandise est déchargée puis la benne est remplie avec des gravats. Karim Boudifa reconnait avoir donné 350 euros pour la prise en charge des gravats.

"Je leur ai demandé s’ils allaient les décharger dans une déchetterie, je ne savais pas qu’ils allaient les déverser dans la rue (...) je pensais qu’ils allaient me donner une facture, je ne les ai plus jamais revus (...) avec mon oncle je retapais entièrement un appartement dans l’immeuble que je venais d’acheter avec ma mère." 

133 pneus

Le troisième homme, garagiste a été vu en train d’aider à charger 133 pneus dans la benne du camion roumain. Khaled Menzou, reconnait donner régulièrement des pneus aux Roumains. 

"Je ne les contacte pas, ils viennent régulièrement au garage, je fais ça depuis un ou deux ans, ils m’ont dit qu’ils vendaient les pneus aux Africains."

La présidente relève que le garagiste est adhérent à un système de collecte de vieux pneus.

Marseille, "une décharge à ciel ouvert"

Dans son réquisitoire, la procureure s’inquiète de voir "à quel point on se débarrasse des déchets sans se soucier de leur devenir".

"Ces personnes ont décidé que Marseille est une décharge à ciel ouvert. Ils ne contribuent qu’à polluer les rues de Marseille", insiste-t-elle.

Prison avec sursis et amendes

Contre Constantin Grigore elle requiert six mois de prison avec sursis et 1.500 euros d’amende, Karim Boudifa quatre mois de prison avec sursis et 1.500 euros d’amende, Menzou Khaled six mois de prison avec sursis et 15.000 euros d’amende, et Virgil Turcata, le propriétaire du camion : un an de prison avec sursis et confiscation du véhicule.

Le tribunal a condamné les trois hommes à quatre mois de prison avec sursis et 2.000 euros d’amende, a relaxé Karim Boudifa et Khaled Menzou pour le travail dissimulé.

Virgil Turcata a été relaxé de tous les faits reprochés. 

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