C'est un fait, contrairement à ce qu'avancent les défenseurs de la laïcité comme leurs opposants du Droit local d'Alsace-Moselle, le délit de blasphème n'existe pas ! Explications dans notre article.
Mise à jour du 15 janvier 2015 :L'un de nos internautes Jean-Luc Filser analyse différemment la question de la transposition de l'article 166 (lire ci-dessous) en proposant une autre interprétation : selon lui, l'article 166 a bel et bien été transposé, en 2006, dans le cadre d'une réponse du ministère de l'Intérieur à la question d'un parlementaire.
Ses explications :
"Il ne faut pas perdre de vue que l'arrêté du 29 août 2013 portant publication de la traduction de lois et règlements locaux maintenus en vigueur par les lois du 1er juin 1924 dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle a pour objectif de traduire des textes qui n'ont jamais fait l'objet d'une traduction.
Or l'article 166 a fait l'objet d'une traduction en 2006 dans le cadre d'une réponse effectuée par le Ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et publiée dans le JO Sénat du 01/06/2006 - page 1538.
La traduction a été la suivante :
«Celui qui aura causé un scandale en blasphémant publiquement contre Dieu par des propos outrageants, ou aura publiquement outragé un des cultes chrétiens ou une communauté religieuse établie sur le territoire de la Confédération et reconnue comme corporation, ou les institutions ou cérémonies de ces cultes, ou qui, dans une église ou un autre lieu consacré à des assemblées religieuses, aura commis des actes injurieux et scandaleux, sera puni d'un emprisonnement de trois ans au plus »
Cette réponse fait suite à une question écrite n° 22419 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI) publiée précédemment dans le JO Sénat du 30/03/2006 - page 901
C'est donc fort logiquement que l'article 166 du code pénal local d'Alsace - Moselle n'a pas fait l'objet d'une traduction dans le cadre de l'arrêté du 29 août 2013, puisque déjà traduit. Cette position n'est toutefois pas critiquable si l'on admet que la traduction de textes allemands en français n'ont pas besoin de paraître au JO de la république française et que les dites traduction n'ont pas besoin d'être effectuée par des experts agrées par le Conseil Constitutionnel."
Notre article initial :
En France le délit de blasphème n’existe plus depuis la Révolution . Il a été supprimé par la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse. Jusqu'à présent, il était avancé par les défenseurs de la laïcité comme leurs opposants du Droit local d'Alsace-Moselle que précisément dans cette héritage de l'occupation allemande, le délit de blasphème existait et pouvait s'appliquer dans les trois départements. Ce qui n'a que très peu été porté devant la Justice. Et l'idée faisant son chemin, les représentants des principaux cultes en Alsace-Moselle, y compris l'islam, demandaient que ce délit de blasphème, soit-disant toujours en vigueur dans le droit local, soit abrogé car "il est tombé en désuétude" (voir notre article précédent).
Mais en réalité, grâce au spécialiste messin du Droit local d'Alsace-Moselle Bernard Zahra, France 3 Lorraine est en mesure d'affirmer que le délit de blasphème n'existe pas !
Une information confirmée par l'Observatoire de la Laïcité qui reconnaît dans un échange de courriels "avoir connaissance de ce fait".
Les explications de Bernard Zahra
"On connaît les particularités locales sur le régime des cultes et sur le statut scolaire. On connaît beaucoup moins les dispositions sur les atteintes aux libertés religieuses. L'article 166 du code pénal local (code pénal allemand) vise les blasphèmes, injures ou outrages. L'article 167 du même code concerne les entraves au libre exercice du culte. Ces textes n'ont pas d'équivalent dans la France de l'intérieur, font l'objet de peu de jurisprudence et sont souvent confondus. Ces infractions sont des délits, punis d'une peine d'emprisonnement maximum de 3 ans. Mais en réalité, le délit de blasphème qui est issu d'un texte en langue allemande n'ont pas fait l'objet d'une publication officielle en français (dans l'arrêté du 29 août 2013, page 9), ce qui lui enlève son caractère opposable, est inapplicable.
Seul l'article 167 a été transposé (voir encadré ci-dessous). Le délit de blasphème (présent dans l'article 166 non transposé) n'existe donc pas. Il n'y a donc pas lieu de l'abroger." Bernard Zahra.
Arrêté du 29 août 2013 portant publication de la traduction de lois et règlements locaux maintenus en vigueur par les lois du 1er juin 1924 dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle
Article 167 :"Celui qui, par voies de fait ou menaces, empêche une personne d'exercer le culte d'une communauté religieuse établie dans l'État, ou qui, dans une église ou dans un autre lieu destiné à des assemblées religieuses, empêche ou trouble par tapage ou désordre, volontairement, le culte ou certaines cérémonies du culte d'une communauté religieuse établie dans l'État, est passible d'un emprisonnement de trois ans au plus."
Source : Préfecture du Bas-Rhin