Une personne sur deux de plus de 60 ans a des relations intimes, d’après un rapport du Petit frère des pauvres. On parle de plus en plus de la sexualité des personnes âgées, mais qu’en pensent les principaux intéressés ? Nous sommes allés à la rencontre des résidents de deux Ehpad en Alsace.
Charlotte et Alfred, sont en couple depuis bientôt 70 ans. Bien qu’ils ne dorment pas dans la même chambre, ils entretiennent une vie de couple au sein de l’Ehpad Le Séquoia d’Illzach (Haut-Rhin). “Je pense qu’il n’y a pas d’âge pour continuer à faire l’amour. C’est n'importe quoi de penser qu’il ne se passe plus rien après 50 ans”, nous confie Charlotte.
L’Ehpad fait partie des deux Ehpad en Alsace labellisés Humanitude. Ce label porte une attention particulière aux besoins affectifs des personnes âgées. “Nous les appelons des habitants, car ici, c'est un lieu de vie”, clarifie Ornella, référente sexualité. Une des priorités : le respect de la singularité et de l’intimité. Ici, un couple peut demander à dormir dans la même chambre ou partager un repas de Saint-Valentin. L’équipe de soin est régulièrement formée. “Il m’est arrivé de rentrer dans une chambre après avoir toqué pour y trouver deux habitants enlacés dans le lit. On nous donne surtout des clés pour savoir comment réagir dans ces moments-là”, raconte Valérie, aide-soignante.
Bruno a seulement 61 ans et, lui aussi, aimerait trouver quelqu’un. “J’ai encore du désir. J’aimerais retrouver une femme. Ça me manque en ce moment.” L’équipe de l’Ehpad cherche à pallier la détresse affective dont se plaignent certains résidents. “On peut leur chercher des magazines ou des films érotiques s'ils en ont besoin. Ce sont des demandes qui sont parfois difficiles auprès des familles.” La règle d’or reste le “toc-toc”, symbole du respect de la vie intime. “On toque systématiquement. Si la personne dit non, on ne rentre pas."
Une parole plus libre aujourd'hui
À l’Ehpad Marquaire de Mutzig (Bas-Rhin), la question de la sexualité est également abordée. Un sujet tabou pendant longtemps, d’autant plus pour ces anciennes générations. “Si on parlait de sexualité à l’époque, avant-guerre, c’était la terreur”, raconte Fernand Flicker, 96 ans. Margotte Laparlière, 95 ans, elle, s’est mariée en noir, car son union avait été consommée avant le mariage. Aujourd’hui, la parole est plus libre et finalement, c’est plus simple qu’on ne pourrait le penser. “Sans amour, on ne peut pas vivre. Si ton mari est décédé et que tu rencontres quelqu’un de gentil, faire l’amour avec lui n’est pas un péché”, conclut Germaine.
Autour de la table, à tour de rôle, les résidents reconnaissent qu’avec les années, les relations intimes deviennent plus faciles. Pour Fernand “après la retraite, c’était plus beau que quand on était jeunes. On avait le temps, on était à la maison, plus reposés." L’âge apporterait peut-être même un plus. Mais avec l’âge, viennent aussi les problèmes de santé. “J’ai eu un cancer de la prostate. Le docteur m’avait expliqué que je ne pourrai plus faire l’amour. Depuis, plus rien.”
Pour ceux dont l’activité sexuelle n’est plus possible ou souhaitée, reste un besoin de tendresse et d’affection. C’est le cas de Marie-Louise, 93 ans. Il y a trois ans, elle a fait la connaissance d’un jeune homme de 82 ans en visite à l’Ehpad. Un lien s’est tissé et voilà trois ans que Roger vient lui apporter le café tous les jours. “Il est très gentil. Il me caresse les joues, mais rien de plus”. C'est son amoureux.