Nous sommes allés à la rencontre de ceux qui soutiennent des proches malades d'alcoolisme. Entre confiance érodée, inquiétude constante et sentiment de désespoir, les difficultés sont grandes pour eux aussi. Certaines associations proposent notamment des groupes de parole dédiés à l'entourage des personnes alcooliques uniquement.
Cela fait 7 ans que Serge s’est lié d’amitié avec une alcoolique de longue date. “Quand elle est sobre, c’est un vrai délice de passer du temps avec elle.” Pendant cette période, beaucoup de hauts et de bas. Un jour, alors qu’il rentrait chez lui, plus d’électricité. Il apprendra plus tard que son amie, sous l’emprise de l’alcool, aurait manipulé le taille-haie et sectionné des câbles électriques.
Progressivement, il a donc fallu sécuriser la maison. “Les outils dangereux sont rangés dans la cave. Je verrouille la porte et je cache la clef.” Des portes verrouillées et des règles instaurées : “elle n’a pas le droit d’être en état d’ébriété quand elle vient chez moi. Je lui fais faire des éthylotests en arrivant.” Il y a quelques années, elle a voulu adopter un chiot. “Je n’étais pas content. Comment pourrait-elle s’occuper d’un chien alors qu’elle a du mal à se gérer elle-même ?”. Aujourd’hui, Neige le petit chihuahua reste principalement chez Serge.
Les nombreuses rechutes ont nourri un certain manque de confiance. “Je n’ai jamais rencontré des personnes qui mentent plus que ceux qui boivent. C’est ce qu’il y a de plus difficile, ce manque de confiance qu’on peut avoir pour des personnes que l’on aime.” Malgré tout, Serge tient bon. “J’espère qu’elle arrêtera un jour. Mais même si c’est parfois difficile, je ne l’abandonnerai pas.”
Ces groupes de parole indispensables
L’alcoolisme est une maladie difficile à vivre pour les malades, mais aussi pour leurs proches. Certaines associations proposent des groupes de parole pour l’entourage des personnes alcooliques. Exemple avec Entraid'addict.
Autour de la table ce jour-là des proches de malades. Tour à tour, chacun se présente et résume la raison qui l’a fait venir. “C’est dur avec mon mari”. “J’ai rencontré un homme qui boit”. Puis on se livre. Pas facile de parler de l’intimité d’un couple, ou d’une famille. Ici, on veut apporter l’écoute dont beaucoup ont besoin. “Au début, les gens se contentent d’écouter les autres. Finalement, ils se rendent compte qu’ils ne sont pas seuls, et qu’ils ont besoin d’aide" constate Yolande Barthel, animatrice du groupe de parole.
Si on est tout seul à ce moment-là, ça peut être très grave
Roger
Garder espoir semble être ce qu'il y a de plus important. Roger, lui, a grandi dans un vignoble. “Le matin, c’était du schnaps dans le café, dans les vignes, de la bière et du vin. Le soir on faisait la fête aussi.” Et d'un coup l'engrenage. En rentrant Roger disait à son épouse qu'il avait des choses à faire dans la cave. Deux, trois, quatre, cinq bouteilles disparaissaient. “On peut tenir longtemps comme ça, mais au bout d’un moment, c’est la chute. Si on est tout seul à ce moment-là, ça peut être très grave.”
Son soutien à lui : Nathalie, sa femme. Elle qui n’avait jamais compris que Roger se cachait dans la cave pour boire. C’est elle qui est allée chercher de l’aide. Au retour de cure de son mari, Nathalie lui a fait la surprise d’avoir vendu toutes les bouteilles restantes. Une rechute plus tard et c’était terminé. Plus une goutte d’alcool pour Roger. Voilà 23 ans.
Son épouse a fait de même par solidarité. Elle cuisine également sans alcool. Mélange d’épices pour remplacer l’alcool dans leurs baeckeoffe, choucroute, etc. En famille, ils ont combattu cette maladie. C’est devenu un nouveau mode de vie: “Et on s’amuse beaucoup quand même !”
L'alcoolisme est une maladie grave qui peut briser des familles.
Nathalie et Roger nous montrent que
de belles histoires existent aussi.