Les collèges de Romilly-sur-Seine et Nogent-sur-Seine intègrent le dispositif la Cordée "Sciences, technologie et avenir" porté par l’Université de technologie de Troyes (UTT) et EDF. Objectif : accompagner les élèves dans leur orientation et à lutter contre leur autocensure.
Croire en ses rêves est possible. Malcom Aridory a 18 ans. Aujourd'hui, il est étudiant à l'UTT de Troyes en deuxième semestre de tronc commun, c’est à dire le cycle préparatoire à la formation ingénieur, qu’on appelle aussi « prépa intégrée » à l'UTT.
Il est l'un des premiers collégiens à avoir suivi le dispositif les Cordées de la réussite " "Sciences, technologie et avenir". "J’ai intégré les Cordées lorsque j’étais en 3ème au collège Albert Camus à La Chapelle-Saint-Luc, lors de l’année scolaire, 2016-2017 " explique Malcom Aridory .
Malcom aurait-il pu accéder à son rêve de suivre des étude d'ingénieur ? "Je pense que oui, j’aurais pu y parvenir" confie Malcom. "Cependant, cela m’a tout de même été d’une grande aide. À l’époque, j’ai pu découvrir une grande école d’ingénieur, les activités proposées ainsi que les recherches qui y étaient menées. Cela m’a beaucoup plu et m’a permis d’apprendre énormément. J’ai également pu profiter de cette occasion pour me projeter dans le monde des études supérieures " reconnaît-il.
Rien ne doit empêcher de croire en soi. Les cordées de la réussite ont cet objectif, celui de faire lever les barrières psychologiques que se dressent devant ces élèves issus de familles modestes. Cela les conduit souvent à s'autocensurer, alors qu'ils ont les capacités à s'engager dans des études supérieures.
"Le programme vise à ouvrir le champ des possibles, doper l'ambition des jeunes et leur donner les moyens de leurs ambitions afin de les accompagner vers le supérieur quel que soit leur projet d'orientation. Après, pour ceux intéressés par les études d'ingénieurs, on les aide à intégrer l'UTT " explique Thomas Maurer, Directeur de la Formation et de la Pédagogie à l’UTT.
L'université a sa cordée celle " Sciences, technologie et avenir" et ceux qui entreprennent l'ascension sont de plus en plus nombreux.
Avec l'arrivée des collèges de Romilly-sur-Seine et Nogent-sur-Seine pour la rentrée prochaine, le nombre d'élèves qui bénéficient de ce dispositif s'allongent. "Aujourd'hui, huit collèges font partie de notre cordée, soit entre 150 et 200 collégiens et près de 150 lycéens par an ".
Il s'agit des collèges Albert Camus et Pierre Brossolette à La Chapelle Saint-Luc, les collèges Marie Curie, Pierre-et-François Pithou, Les Jacobins à Troyes, les Le Noyer-Marchand et Paul Langevin à Romilly-sur-Seine, et le collège Jean Jaurès à Nogent-sur-Seine. Quatre lycées ont intégré le programme Égalité des chances et permettent aux collégiens de poursuivre dans le programme : le lycée Edouard Herriot à Sainte-Savine, le lycée Irène et Frédéric Joliot-Curie à Romilly-sur-Seine), le lycée Gaston Bachelard à Bar-sur-Aube et le lycée Marie-de-Champagne à Troyes.
Le but des Cordées de la réussite est de lutter contre l'autocensure des élèves par un accompagnement continu dès la classe de 4e, jusqu'au baccalauréat et au-delà. Ainsi, un établissement encordé et des établissements têtes de cordée mettent en place des actions pour donner à chaque élève les moyens de sa réussite dans l'élaboration de son projet d'orientation, quel que soit le parcours envisagé, poursuite d'études dans l'enseignement supérieur ou insertion professionnelle. Une "Cordée de la réussite" repose sur le partenariat entre : une "tête de cordée" qui peut être un établissement d'enseignement supérieur : grandes écoles, universités ou des lycées comportant une CPGE ( classes préparatoires aux grandes écoles) ou une STS (Section de Technicien Supérieur) et des établissements dits "encordés" : collèges et lycées de la voie générale, technologique ou professionnelle qui relèvent plus particulièrement des réseaux d'éducation prioritaire, des quartiers prioritaires de la politique de la ville ou de zones rurales éloignées des métropoles.
" La cordée de l' UTT a été relancée en 2016-2017 , à l'époque les deux collèges REP+ ( Les Réseaux d'éducation prioritaire renforcée) de La chapelle-St-Luc, soit 52 collégiens dont Malcom Aridory " énonce Thomas Maurer. Ensuite, le programme Égalité des chances (lycées) a été lancé en 2018-2019, complète-t-il.
Lutter contre l'auto-censure
Dans un premier temps, ce dispositif s'adresse aux établissements en Zone d'éducation prioritaire ( ZEP) annonce Thomas Maurer. " On est financé notamment par l'Agence Nationale pour la Cohésion des Territoires (ANCT). Non seulement, les collèges sont REP+/REP, mais les collégiens bénéficiaires font (à au moins 60 %) partie des Quartiers Prioritaires de la Ville (QPV). Mais on s'ouvre à la ruralité et donc à l'ensemble de l'Aube. La Champagne-Ardenne est une région (si ce n'est la région) qui a le plus grand déficit d'accès à l'enseignement supérieur avec des jeunes qui soit ne font pas d'études tandis qu'ils pourraient, soit ne font pas les études dont ils sont capables. On cherche à lutter contre l'auto-censure " rappelle le Directeur de la Formation et de la Pédagogie à l’UTT. Pour y parvenir, tout le programme est mis en place pour les collégiens et lycéens par l'UTT.
En 4ème/3ème, le programme s'appuie sur la relation collégiens-étudiants via des projets technologiques ou culturels. Les ateliers sont variés et ludiques. De la fabrication de robots, au développement de sites internet, la fabrication de simulateurs de vol, comme la réalisation de courts-métrage ou encore des ateliers d'expressions. Les initiatives ne manquent pas. "Ce lien est très important, car les étudiants étaient à la place des collégiens quelques années plus tôt et ils peuvent mieux que les familles ou profs faire passer des messages " rappelle Thomas Maurer. Notre objectif, enchaîne le Directeur de la Formation et de la Pédagogie à l’UTT, est d' accompagner tous les jeunes motivés au sein d'un établissement aubois, et même au-delà : Haute-Marne et Marne dans un second temps".
Les interventions pour les lycéens sont au plus près de la réalité étudiante, car ils s'en approchent. " En 2nde, on propose un stage immersif d'une semaine à l'UTT. Les lycéens découvrent les cours en amphis donnés par des profs le matin et ils continuent les projets étudiants l'après-midi. En 1ère/Terminale, on propose des cours de soutien à raison de 2h/semaine afin de les accompagner, maintenir leur motivation et renforcer leurs dossiers Parcoursup. On vise une orientation choisie (accès aux 1ers vœux paroursup) et réussie (avec une validation du niveau licence). Enfin, le programme en 1ère/Terminale s'appuie sur un partenariat avec Paris-Dauphine qui finance également et donne des perspectives d'orientation vers les filières économiques " décrit le Directeur de la Formation et de la Pédagogie à l’UTT.
Croire en soi
"Nous cherchons à conseiller au mieux. Le conseil est très important. Les profs de lycée passent beaucoup de temps à conseiller, mais au moment des validations Parcoursup, les jeunes sont en vacances et donc loin de leurs profs. On espère que le lien avec les étudiants et les responsables/référents du programme leur permettra de bénéficier de conseils avisés. En outre, ce programme vise à donner confiance en soi, croire en soi et développer des compétences transverses, comme la capacité à s'exprimer à l'écrit et à l'oral, souvent sources de discrimination sociale" rappelle Thomas Maurer.
40 à 50 étudiants sont concernés chaque année pour tutorer. Amory n'est pas tuteur, mais intervient dans des collèges. "Je participe à plusieurs présentations et ateliers auprès de lycéens et de collégiens où je partage mon expérience et discute des études supérieures avec les élèves " explique l'étudiant.
Les intervenants sont variés et issus de l'enseignement et du monde professionnel. "Nous avons des professeurs de lycée, des professeurs de l'UTT, mais également des salariés des entreprises mécènes comme ANDRA/CNPE pour le moment. Nous cherchons des mécènes qui sont actifs et sont des partenaires à part entière. Ce qui est original, c'est que ce programme fédère une communauté éducative élargie : collèges, lycées, supérieur, collectivités territoriales, étudiants, familles et entreprises. Les entreprises sont les futurs employeurs de ces jeunes et ils ont un rôle important à jouer dans leur orientation. On a besoin de nouveaux mécènes qui ouvrent vers toutes les voies d'insertion professionnelle" conclut Thomas Maurer.
EDF de Nogent-sur-Seine , un mécène
EDF, l’Université de technologie de Troyes (UTT) et sa Fondation ont signé un nouveau partenariat pour soutenir la Cordée « Sciences, technologie et avenir » porté par l’UTT. Cet engagement d’EDF permet ainsi d’ouvrir le programme plus largement au secteur de Romilly-sur-Seine et Nogent-sur-Seine et d’atteindre 183 collégiens aubois bénéficiaires de ce programme national.
"Notre objectif commun est de créer une dynamique de désenclavement scolaire afin de permettre aux collégiens de l’Aube de découvrir les opportunités offertes par l’enseignement supérieur et d’envisager des parcours scolaires variés" explique Olivier Garrigues, directeur de la centrale nucléaire EDF de Nogent sur Seine. La centrale EDF de Nogent-sur-Seine s’engage aux côtés des acteurs locaux pour favoriser l’attractivité et le développement du territoire.
"C’est un engagement de proximité de la centrale de Nogent sur Seine qui trouve tout son sens dans le cadre de notre convention triennale avec l’UTT et de notre partenariat historique ensemble" rajoute le Directeur. "Notre objectif est de proposer des activités de découverte du monde de l’énergie, notamment de production d’électricité en lien avec le programme", précise Olivier Garrigues.
Ces activités sont réalisées dans les collèges retenus en lien avec l’UTT. En fonction de l’évolution sanitaire, nous serons en capacité d’accueillir les collégiens dans notre Centre d’Information du Public à Nogent sur Seine espère le directeur de la centrale nucléaire.
La centrale nucléaire de Nogent sur Seine a intégré le dispositif dans le cadre de la nouvelle convention signée avec l’UTT en novembre 2019. "Cette nouvelle convention est notablement plus étoffée que la précédente, elle marque notre engagement aux côtés de l’UTT, précise Olivier Garrigues, directeur de la centrale nucléaire EDF de Nogent sur Seine. Cette convention a défini plusieurs domaines de partenariat et d’interventions qui se déclinent en cinq grands axes", explique-t-il.
Le premier concerne le programme Egalité des Chances/cordées de la réussite. EDF en tant qu’entreprise de service public est particulièrement sensible aux questions de transmission des savoirs et des connaissances. "La formation des jeunes constitue un enjeu essentiel dans la préparation de l’avenir, notamment quand on sait que le secteur industriel au sens large est peu attractif pour les jeunes. Notre volonté est de former des jeunes issus du territoire aubois aux métiers de l’industrie " explique le directeur de la centrale nucléaire.
Le deuxième domaine concerne la thématique de la gestion de crise et la sécurité globale. "Le récent 10e anniversaire de Fukushima nous montre bien que la gestion d’une crise sur un territoire est un enjeu majeur " rappelle-t-il. Le troisième domaine concerne l’innovation dans le domaine de la performance énergétique sous forme de challenges étudiants. Le quatrième domaine concerne le soutien à l’UTT dans le cadre de son projet européen, il s’agit de renforcer l’attractivité de l’UTT et d’en faire un pôle d’excellence de niveau européen. Enfin, le soutien à la remise des diplômes et des prix constitue le cinquième domaine. C’est le cœur historique de notre partenariat avec l’UTT complète, Olivier Garrigues.
EDF et l'ANDRA sont nos deux premiers mécènes rappelle Thomas Maurer. "Grâce à eux, le programme peut décoller et convaincre d'autres mécènes. Nous leur sommes infiniment reconnaissants. Ils sont précurseurs et jouent ainsi un rôle majeur envers les jeunes du territoire ! Et surtout, ils sont actifs et donnent ce qui n'a pas de prix : du temps et de l'attention aux jeunes ".
Ce dispositif ouvre des portes
"C'est un programme original, l'un des seuls, si ce n'est le seul en France, qui offre un accompagnement de la fin du collège au supérieur" énonce Thomas Maurer. "Cela fonctionne et on mobilise l'ensemble des acteurs. Jean Rottner, président de la région Grand-Est, a même été personnellement parrain de la promo 2018-2019. Olivier Brandouy, nouveau recteur, s'est déplacé visiter notre cordée en janvier dernier " se réjouit-il.
L'UTT est fortement impliqué dans ce dispositif. "Aujourd'hui, l'UTT réserve 10 places par an à ces jeunes dans un contexte où pour intégrer l'UTT, il faut 15 de moyenne actuellement (82 % de mentions TB)". Nous cherchons à conseiller au mieux. Les profs de lycée passent beaucoup de temps à prodiguer des conseils, mais au moment des validations Parcoursup, les jeunes sont en vacances et donc loin de leurs profs. On espère que le lien avec les étudiants et les responsables/référents du programme leur permettra de bénéficier de conseils avisés. De plus, ce programme vise à donner confiance en soi, croire en soi et développer des compétences transverses, comme la capacité à s'exprimer à l'écrit et à l'oral, souvent sources de discrimination sociale.
"La question qui se pose est essentiellement une question d’égalité des chances des élèves face à l’accès à l’enseignement supérieur" précise Olivier Garrigues. "L’enjeu est de donner des informations aux collégiens, de leur permettre de découvrir des parcours de formation auxquels ils ne pensent pas naturellement. Parallèlement, le monde de l’industrie connaît un manque d’attractivité, qu’il faut combattre, car il y a de nombreux besoins et une grande variété d’emplois et de postes notamment à EDF, et à la centrale de Nogent sur Seine" rappelle le Directeur de la centrale nucléaire.
Il est vrai que certains facteurs sociaux peuvent laisser penser qu’on est défavorisé ou "qu’on ne pourra intégrer tel ou tel milieu faute de contact" admet Malcom, l'étudiant. "Je ne vais pas prétendre que les inégalités n’existent pas d’où l’importance de dispositifs comme les Cordées. Je n’ai moi-même ni contact, ni réseau, ni de membre de ma famille déjà ingénieur. Je pense que c’est un milieu où il y a globalement de la place pour tout le monde. Cependant pour moi la principale variable, c’est votre propre détermination à poursuivre vos rêves et à atteindre vos objectifs. Tout va dépendre de vous au bout du compte. Ne pas écouter ce qu’on peut vous dire et vous fier à ce que vous aimez réellement et à ce que vous voulez faire de votre vie. Le principal conseil que je donnerais quoi qu’il arrive, c’est de vous écouter et d’aller dans une voie qui vous plaît " conseille l'étudiant.