Depuis toujours ou presque la maladie de Lyme fait débat parmi les professionnels de santé en France. Souvent "minimisée" d’après les malades et leurs proches, elle "ne serait pas traitée comme il se doit". L’association auboise Enfance Lyme & co communique donc en préventif pour éviter un maximum de nouveaux cas.
Le sourire dans la voix, à première vue Albane n’a rien de différent des autres jeunes femme de son âge. Et ça tombe bien, c’est bien ce que veut souligner sa mère, Emmanuelle Martin, présidente de l’association Enfance Lyme & co. Cette maladie n’est pas visible, elle est handicapante, mais elle n’est pas une fatalité, si elle est bien traitée. Et c’est là que le bât blesse d’après les malades et leurs proches.
La jeune auboise se souvient comme si c’était hier de l’impasse médicale dans laquelle elle s’est retrouvée à l’âge de 9 ans, quand les premiers symptômes ont commencé à apparaître.
"J’avais été piquée par une tique en maternelle, c’est seulement des années plus tard que ma santé a commencé à se dégrader. Jusqu’à ce qu’un jour, je ne puisse plus marcher. J’allais chez le docteur, mais je n’avais pas de réponses, jusqu’à ce que je consulte, un spécialiste à Paris" raconte la jeune femme aujourd’hui âgée de 19 ans.
Des rendez-vous médicaux compliqués
Sa mère s’était alors battue contre certains médecins qui diagnostiquaient Albane comme feignante et s’inventant des maux : "Il est difficile de faire comprendre à quelqu’un qui ne le veut pas, que son enfant ne fait pas semblant. Ma fille a toujours été active. Il m’a été rétorqué qu’elle manquait de volonté quand elle ne pouvait plus marcher à cause de ses douleurs. Quand des années plus tard, je la vois pratiquer la natation synchronisée et la course, parce qu’elle a un traitement adapté, je me dis que c’est la meilleure des réponses à ces praticiens qui ne l’écoutaient pas."
D’après Emmanuelle Martin, c’est le principal problème concernant la maladie de Lyme en France : "Les patients ne sont pas pris au sérieux et de ce fait pas suivis et traités correctement. En Belgique, en Allemagne, en Suisse, les tests sont plus fiables et les traitements antibiotiques sont complets. En France, nous sommes obligés de passer par la phytothérapie et cela coûte un certain budget." Et sans parler du budget, ces traitements demandent une régularité qui peut être lourde pour les patients surtout les plus jeunes.
"Grâce aux traitements, je me suis sentie mieux. Aujourd’hui comme je suis en alternance entre Reims et chez moi, je fais beaucoup de route, je suis plus donc plus fatiguée et les douleurs reviennent. Ce qui est compliqué à gérer. Je ne peux plus faire de sport comme l’an dernier lorsque j’étais au lycée," explique Albane. Avant d’ajouter : "Aujourd’hui, c’est plus difficile pour moi également de suivre mon traitement, il y a une forme de lassitude à prendre autant de cachets en une journée, depuis plusieurs années. Par exemple sur une soirée, je dois en prendre une dizaine. C’est parfois usant."
Les piluliers classiques ne sont pas assez grands pour accueillir tous les cachets qui doivent être pris !"
Valérie - Mère de malades de Lyme
Une régularité dans les traitements qui pèsent également sur les parents des enfants atteints de Lyme. Valérie vit à Chaumont, mère de trois filles, deux d’entre elles sont touchées par la maladie de Lyme, une charge mentale supplémentaire pour cette maman. "Je dois penser à tout lorsque mes filles ont des déplacements programmés avec l’école, je leur prépare les traitements à l’avance. Mais les piluliers classiques ne sont pas assez grands pour accueillir tous les cachets qui doivent être pris sur un repas. J’achète donc des boites avec des sachets individuels et je crée mon propre système avec des étiquettes pour qu’elles ne se trompent pas dans les prises. Certains compléments alimentaires doivent être conservés au frigo donc je prépare une petite glacière pour conserver les traitements quand elles sont en déplacement. Les traitements sont coûteux et il faut les commander en avance pour ne pas en manquer. C’est toute une organisation" détaille Valérie.
La maladie de Lyme ne se résume pas à la borréliose, la bactérie fonctionne avec des co-infections, et il faut parfois adapter les traitements de phytothérapie qui peuvent déclencher certaines d’entre elle. La vigilance pour les malades ou leurs parents est donc permanente. "J’ai eu ce qu’on appelle des réactions de Jarisch–Herxheimer, soit la libération massive de toxines par la bactérie en réaction aux traitements. Cela provoque de la fièvre, des frissons, des nausées et des douleurs comme sans traitement. Il faut donc soit l’arrêter quelques temps puis le reprendre, soit l’arrêter complètement. En fait, on n’est jamais tranquille," explique Albane.
Face aux difficultés de se soigner et se faire entendre les malades de Lyme ou leurs proches, agissent en préventif pour éviter une prolifération de la maladie. "Nous organisons depuis deux ans des opérations au mois de mai pour mettre en garde contre les tiques," explique Emmanuelle Martin.
"Comme l’an dernier, Enfance Lyme & co lance sa caravane virtuelle dans toute la France pour organiser des courses à pieds, des réunions, des projections de petits films pour sensibiliser sur la maladie de Lyme. Et cette année, nous sommes particulièrement heureux de compter au moins une commune par département parmi les participants de cette caravane. Les mairies seront éclairées en vert, couleur de la maladie, nous souhaitons créer une vague verte pour interpeller. En Grand Est, il y aura trois dates importantes : le premier mai, une randonnée sera organisée à Sommeval, le 2 mai, j’interviendrai dans une école maternelle et primaire à Chalindrey et le 8 mai nous seront au golf de l’Ermitage à Vendeuvre-sur-Barse pour sensibiliser à la cause," détaille Emmanuelle Martin.
Avant d’ajouter : "Il est primordial de communiquer sur cette maladie si mal traitée en France, surtout auprès des enfants qui sont extrêmement réceptifs et spontanés. Ils écoutent, et répètent à leurs parents. On touche un maximum de gens par ce biais."
Le beau temps ne devrait pas tarder à faire son retour et avec lui les balades en pleine nature, le premier moyen de protection contre les tiques et la maladie de Lyme reste les vêtements et les chaussures fermées, les associations comme Enfance Lyme & co recommandent donc avant tout de se préparer correctement avant chaque sortie. Pour plus d’informations et de conseils, il est possible de contacter les associations ou de vous rendre aux rendez-vous du mois de mai.