Fait rarissime dans le milieu équin, une jument avait donné naissance à des jumeaux au lycée agricole de Sainte-Maure près de Troyes. Finalement, la jeune pouliche au système immunitaire faible, a succombé à trois pathologies.
"J'aurais pu tout perdre." Ce 18 mars, quand Louise Cameroni, professeure au lycée agricole de Sainte-Maure, au nord de Troyes, nous répondait, elle était soulagée. Sa jument, qui a donné naissance à des jumeaux neuf jours avant, se porte bien et les nouveaux-nés aussi. Le fait est rarissime chez les chevaux, qui ne survivent que dans 4% des cas, selon le site de l'institut français du cheval et de l'équitation.Finalement, la jeune pouliche Venicia n'aura pas survécu. Avec un système immunitaire très faible, elle était atteinte de trois pathologies, une septicémie, de l'arthrite dans un jarret et une pneumonie respiratoire. Elle a été euthanasiée jeudi 28 mars dans la soirée. Contactée tôt ce 1er avril, Louise Cameroni s'inquiète pour son deuxième poulain : "Il est sous traitement antibiotique contre les germes respiratoires. Pour l'instant, il va bien, mais je ne crie pas victoire trop vite."
Une grossesse dangereuse pour la jument
Il faut dire que les chances de survie des poulains jumeaux sont rarissimes. Selon le site de l'institut français du cheval, "la jument ne peut pas assurer le développement à terme des deux poulains". Constat partagé par Isabelle Barrier, vétérinaire à la jumenterie du pin, en Normandie : "C'est très très rare. Soit cela se termine vers 10 mois, avec une fausse couche, ou alors l'un des deux poulains meure à la naissance et le second reste très petit." Ce qui explique la surprise -et la colère- de la professeure de zootechnie (filière pour les élèves souhaitant faire de l'équitation leur métier).C'est le 9 mars dernier que la propriétaire de la jument et le vétérinaire s'étaient rendu compte qu'elle attendait deux poulains. Après avoir mis bas le premier, une seconde poche s'était présentée, avec à l'intérieur, le second nouveau-né."Le premier vétérinaire n'a rien vu à l'échographie. Dans les mois qui ont suivi, on a bien vu que la jument grossissait beaucoup, mais aucun autre signe ne laissait présager qu'elle aurait des jumeaux. J'étais très énervée, car dans la vie des poulains et de la jument étaient en danger."
- Louise Cameroni, professeure au lycée agricole de Sainte-Maure
Autre élément de surprise, il se pourrait que les deux petits aient le même père, mais n'aient pas été fécondé au même moment. Vici, le mâle et Venicia, la pouliche, auraient été conçus à quelques heures d'intervalle, "mais c'est très difficile de vérifier cette information", explique Louise. Et la professeure d'ajouter :
"J'ai eu une chance inouïe qu'ils sortent tous les deux. D'habitude, soit on en tue un tant qu'il est sous forme d'embryon, soit on effectue une injection d'hormones. Sinon, il y a des risques de fausses couches à partir de 7 mois, ou au moment de la naissance."
- Louise Cameroni, professeure au lycée agricole de Sainte-Maure
Une équipe d'une dizaine de bénévoles
Aujourd'hui, la maman, Niquita des Fontaines, se porte toujours bien.Les jumeaux nécessitaient beaucoup de soins supplémentaires, assurés après la naissance des jumeaux par une équipe de bénévoles formée sur le tard et grâce à la générosité de quelques internautes. Deux jours après l'heureux événement, Catherine, magnétiseuse, partageait l'heureuse nouvelle sur sa page Facebook, suivie par 734 abonnés pour demander de l'aide. La publication avait pris une ampleur inattendue, avec plus de 4.665 partages.
"J'ai reçu des tonnes de témoignages de personnes du monde entier. Un magasin du sud de la France m'a envoyé plein de couvertures pour chiens, une clinique véto m'a offert des produits vétérinaires…"
- Louise Cameroni, professeure au lycée agricole de Sainte-Maure
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Outre ces cadeaux, parmi la dizaine de bénévoles, trois magnétiseuses prodiguaient des soins aux chevaux. "Je n'y croyais pas vraiment. J'en avais fait sur moi, mais je n'y suis pas très réceptive. En revanche, sur Vici, les résultats ont été stupéfiants, les vétérinaires n'y croyaient pas", raconte-t-elle. En seulement trois jours, le poulain a réussi à marcher sur ses quatre pattes, alors qu'il est né avec les jambes pliées.
Cette solidarité avait beaucoup émue Louise, qui devait aussi assumer deux fois plus de frais que pour une naissance classique. "J'en ai déjà eu pour 1.000 euros, détaille-t-elle. Je pense qu'en tout, j'en aurais pour 3.000 euros." Des frais qu'elle avait pensé à réduire en ouvrant une cagnotte participative. Au départ réticente à l'idée, elle avait finalement décidé de l'ouvrir, en demandant à ce que les dons ne dépassent pas 5 euros par participant. "Le geste compte", écrivait-elle dans la description. Elle qui avait créé une page Facebook dédiée aux deux poulains. Dans une dernière publication, elle déclare supprimer la cagnotte : "Vici a le même traitement que sa soeur je vais en assumer les frais seule."