C’est une des grosses surprises du déconfinement : les Alsaciens ont visiblement fait beaucoup de tri dans leurs placards pendant deux mois. A Haguenau, Emmaüs enregistre trois fois plus de dépôts que d'habitude.
On sait les Alsaciens grands adeptes de l’osterputz, ce nettoyage de printemps auquel aucun grain de poussière ne résiste. En ce printemps 2020, confinement oblige, le grand ménage s’est transformé en grandes manœuvres : on a trié, classé et beaucoup donné à Emmaüs. Comme ailleurs en Alsace, l’antenne d’Haguenau enregistre des dépôts record.
120 voitures par jour
Depuis la levée du confinement, les files de voitures font la queue pour accéder au quai de déchargement à partir de 14h : 120 voitures par jour contre 40 en temps normal. Du jamais vu à cette époque de l’année. "Les dons qui arrivent en masse, c’est plutôt l’été", explique Jean-Pierre Moritz, directeur du site, " les gens font surtout du tri pendant les grandes vacances ". Difficile de parler de vacances évidemment, mais ces deux mois de confinement ont donné des idées à certains : "quand on ne peut pas sortir, on s’occupe et on range des placards", explique au volant de sa voiture une des donatrices du jour.
Un peu plus loin, vidant son coffre, aidée par des compagnons, une fidèle d’Emmaüs confirme : "d’être confrontée à rester entre quatre murs, je me suis rendue compte que je n’avais pas besoin de tout cela. C’est une manière d’être plus légère tout en étant généreuse".
Un mal pour un bien
En 15 jours, les 48 compagnons pilotés par Jean-Pierre Moritz ont rentré l’équivalent de deux mois de travail. L’afflux des dons a été multiplié par trois. Il a fallu s’organiser différemment : libérer des espaces de vente pour stocker la marchandise placée en quarantaine, limiter les collectes à domicile pour garder les forces vives sur site. En temps normal, trois camions collectent les dons chez les particuliers, avec à leur bord trois compagnons. Aujourd’hui, ils ne sont plus que quatre à partir dans deux camions. Les autres aident au déchargement.
Dans les ateliers de réparation, même ambiance. Altin Mejda est compagnon à Haguenau depuis 14 ans. Cet électricien ne chôme pas : "il y a un peu de bordel, c’est vrai mais on fait ce qu’on peut. On fait même plus que ce que l’on peut. Et puis ça fait plaisir".
"On est débordé", explique Jean-Pierre Moritz, "mais ça reste un problème positif, un bon malheur : il vaut mieux crouler sous la marchandise que ne rien avoir à vendre". Pour Emmaüs, les deux mois de confinement ont représenté un gros manque de trésorerie. Pas de rentrée d’argent et 48 compagnons à nourrir, loger et blanchir. Alors ce surplus d’activité est accueilli avec soulagement.
Plus de temps pour chiner
Afin de renflouer les caisses, l’antenne haguenauvienne, qui voit passer chaque jour 350 clients, a élargi ses plages horaires : elle, qui n’ouvrait que les après-midis, ouvre désormais ses portes également le matin de 10h à 12h. Idem pour le dimanche : les Alsaciens peuvent venir y chiner les premiers et troisièmes dimanches de chaque mois de 10h à 12h et de 14h à 18h. L'antenne de Saverne prend le relais les deuxièmes et quatrièmes dimanches. A votre bon coeur !