Patrimoine : une plateforme numérique aide les maires à protéger les objets remarquables de leur commune

C'est un outil numérique dédié à la sauvegarde du patrimoine. La plateforme "collectif objets" a été lancée en 2021 dans le Grand-Est pour tester le recensement participatif par les communes de leurs biens mobiliers, tous les objets classés ou inscrits aux monuments historiques.

Quel est le point commun entre un calice doré du 15e siècle, un mécanisme d'horloge du 18e siècle et un tableau alsacien du 20e siècle ? Tous ces objets sont protégés par les monuments historiques et doivent à ce titre être recensés tous les cinq ans. Mais dans les faits, certains objets attendent depuis les années 1980 qu'on s'intéresse de nouveau à eux.

Un site internet permet aux communes de faire un recensement rapide, il s'appelle "collectif objets". Le Grand Est est la région pilote de son déploiement depuis 2021. Plus de 40% des communes y ont déjà recensé des objets, ce qui dépasse les objectifs fixés.

Pour les conservateurs chargés de les protéger, le recensement en ligne est une réelle avancée. "Ce site nous aide énormément", reconnaît Emmanuel Fritsch, conservateur des antiquités et objets d’art du Bas-Rhin. "Ça nous évite de nous déplacer dans toutes les communes du département, ce que nous n'avons pas le temps de faire. Donc du coup, nous pouvons nous occuper en priorité des objets les plus abîmés ou en péril."

Objets en péril

À Ohnenheim, il y a quelques mois, une paroissienne remarque des traces de moisissures dans la vitrine de l'église. Un calice en ivoire a contaminé un vieux parchemin du 15e siècle. Dans cette vitrine, deux objets sont classés aux monuments historiques : un calice doré et une statue en bois polychrome et doré de la Vierge à l'Enfant qui datent du 15e siècle.

Après examen, la statue présente aussi quelques traces de ce même champignon. Elle est alors rapidement prise en charge et décontaminée selon des règles de conservation stricte.

Le recensement a eu lieu peu de temps après cette découverte, donc "on l'aurait vu à ce moment-là", explique la maire, Jacqueline Schunck, pour qui cette plateforme est une très bonne chose. "Il faut avoir une attention régulière aux objets classés que nous avons ici, surtout depuis que l'église est moins utilisée donc moins chauffée et moins aérée."

Elle a alerté les équipes de ménage et les personnes qui passent dans l'église, pour qu'ils inspectent régulièrement les six objets classés d'Ohnenheim : outre la statue de la Vierge et le calice, trois grands tableaux et les fonts baptismaux. 

"Cet inventaire va servir aux générations futures. Si jamais ces objets disparaissaient, on en aurait une trace. Et puis pour les assurances aussi, ça nous permet de savoir ce qui est assuré ou pas."

Jacqueline Schunck trouve important de "rappeler aux maires qu'il y a des objets protégés dans leurs communes, tous ne sont pas au courant des richesses qu'ils ont".

Découvertes de nouveaux objets 

C'est une bénévole, habitante de la commune, qui s'est chargée des photos et de la collecte d'informations. Franciane Uhry a passé beaucoup de temps dans l'église, de la crypte au clocher, pour répertorier tous les objets présents. Elle en a tiré un document de 300 pages pour la commune. Et elle a aussi fait les photos des six objets classés, les seuls qui seront portés à la connaissance des monuments historiques via "collectif objets". 

Mais un reliquaire a attiré son attention. Il y aurait un minuscule morceau de bois de la croix du Christ, authentifié par un document écrit en latin et rangé dans un tiroir secret dans le socle. Elle va donc signaler ce nouvel objet, il sera peut-être digne d'intérêt.

Pour arriver à classer un nouvel objet, il faut qu'il ait une valeur historique, culturelle ou artistique avérée. Il peut sinon être classé pour sa rareté. Le premier niveau de protection des monuments historiques, c'est l'inscription. Le deuxième, c'est le classement.

Objets introuvables

À Rosheim, 19 objets sont sur la liste des monuments historiques. Quentin Joerger, responsable du patrimoine de la ville, en a la liste, mais certaines photos manquent, ou les objets ont été déplacés. Et malgré ses recherches, deux objets restent introuvables : un tableau du "Christ remettant les clefs à St Pierre" et une statue du Christ en croix.

Laure Mendousse, conservatrice des monuments historiques de la DRAC Grand Est, lui a apporté une photocopie du tableau disparu. Quentin Joerger a enfin un visuel pour continuer ses recherches. Il a en tête un tableau en piteux état dans le sous-sol de l'ancienne prison (et actuel commissariat).

Les conservateurs retournent le tableau et constatent qu'il s'agit bien de celui qu'ils cherchaient ! Mais il est dans un mauvais état. De nouvelles déchirures sont apparues, sans doute causées par les clous et les poignées de placard présents dans cette cave.

Quentin Joerger va pouvoir mettre à jour les informations et les photos sur ce tableau. Un mystère en moins pour les conservateurs.

Présentation au public

Une fois que la liste des objets protégés est établie, et chaque objet retrouvé et restauré, les communes pourront ensuite se poser la question de valoriser leur patrimoine mobilier.

À Rosheim, certains objets sont exposés dans les deux églises, à la médiathèque et à la mairie, dans les parties accessibles au public, avec un cartel pour donner les principales informations sur l'objet (date, matériaux, origine, descriptif...). D'autres attendent d'être restaurés. "Le tableau de St Pierre pourrait rejoindre le tableau "Les Noces paysannes" à la médiathèque.

À Ohnenheim, une vitrine protège le calice doré et la Vierge à l'Enfant. Les trois tableaux restent à leur place dans l'Eglise, tout comme les fonts baptismaux. Sur les sites internet de "collectif objets", les six objets d'Ohnenheim ont été mis à jour. Christiane Uhry va prochainement y ajouter ses photos.

Pour chercher les objets présents dans votre commune, allez faire un tour ici.

Le reportage de Florence Grandon, Philippe Dezempte et Cécile Biehler :

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