Illkirch-Graffenstaden compte cinq structures d'accueil de la petite enfance. C'est l'association Léo Lagrange qui les gère sous la forme d'une délégation de service public qui arrive à échéance fin janvier 2023, l'appel d'offres pour le nouveau contrat de 5 ans a été lancé par la ville. Quatre candidats sont en lice.
Ils voient la date d'échéance approcher à grand pas alors certains parents, qui confient leurs tout-petits aux structures d'accueil publiques de la ville d'Illkirch-Graffenstaden, se mobilisent réunis dans un collectif. Au plus tard en janvier 2023, la mairie aura décidé quel prestataire associatif ou privé récupèrera le contrat de délégation de service public établi pour cinq ans. Contrat qui concerne les cinq structures d'accueil de la petite enfance de la ville.
Depuis 2012, c'est l'association Léo Lagrange qui gère ces équipements avec un premier contrat puis un renouvellement en 2017, qui devait prendre fin le 31 août dernier. Un nouveau marché public a bien été lancé et même remporté par la structure privée People and Baby.
Sauf qu'entretemps, un bébé est mort empoisonné à Lyon dans l'une des structures gérées par ce prestataire. Même si les premiers résultats de l'enquête administrative lancée par la métropole de Lyon ne révèlent pas de manquements imputables à la structure pouvant expliquer le drame, pour beaucoup de familles, le contrat de confiance est rompu. En réaction, la municipalité a décidé fin juillet de prolonger le contrat de Léo Lagrange de 6 mois. Contrat qui arrive donc à son terme.
Non à la privatisation
"Apparemment, il y a quatre candidatures qui ont été retenues pour ce nouveau marché public, nous explique, inquiète, Sabrina Faraht, maman de Leïla, deux ans. Si le critère unique de sélection c'est l'argent, les économies, alors que va t-il se passer pour les animations, le matériel, le personnel, bref quid de la qualité de l'accueil pour nos enfants?"
Les crèches d'Illkirch passeront-elles sous pavillon privé ? C'est ce que craignent beaucoup de parents d'enfants accueillis dans ces structures.
Et quand on lui demande pourquoi elle n'enlève pas sa fille de la crèche pour la confier à une nounou, la mère de famille, enseignante par ailleurs, répond du tac au tac. "Je suis attachée au service public, j'aime le projet pédagogique proposé, j'ai vu mon fils, qui est maintenant à la maternelle, bien évoluer à la crèche, j'ai donc envie de défendre ça".
Une pétition en ligne
Alors Sabrina Faraht lance avec d'autres parents une pétition en ligne avec une lettre adressée à la municipalité d'Illkirch. "Quand j'ai commencé avec une simple lettre dans les casiers des parents, je ne pensais pas avoir autant de retours, une quarantaine de familles m'a déjà répondue", explique-t-elle soulagée de ne pas être seule.
Elle est aussi soutenue par des membres du personnel. Myriam [le prénom a été modifié, NDLR] est auxiliaire de puériculture depuis des décennies, elle a vu son métier évoluer et se dégrader. "La crise du covid a causé des dégâts c'est certain, en personnel et en argent. Aujourd'hui à Illkirch, ça se passe plutôt bien même si comme partout les budgets sont serrés alors ce que l'on craint c'est que ce soit encore pire si c'est une structure privée qui remporte le marché. On ne peut quand même pas en arriver à compter le nombre de couches par enfants", s'exclame-t-elle. "Imaginez quand on a des gastros, ce sont des petits pas des machines !"
A la mairie, on l'assure, il n'est pas question de faire des économies sur le dos des enfants. "la sécurité des enfants est primordiale pour nous", assène Thibaud Philipps (LR), le maire de la ville. "On veut un vrai projet pédagogique mené par des acteurs dynamiques, il n'est pas question de pinailler sur les prix !" Chaque candidature est étudiée de la même façon et les critères d'attribution de sont pas uniquement financiers.
Des critères de sélection nombreux
"D'ailleurs ces critères sont transparents", nous explique Pauline Gaucher, directrice de l'enfance et de la vie éducative pour la ville d'Illkirch. "C'est à 40% la proposition financière et à 60% la qualité de l'offre proposée. Et les sous-critères sont nombreux : l'accompagnement de chacun, le projet pédagogique, l'alimentation, le respect des besoins particuliers, l'attention portée aux salariés".
Un projet pérenne et dynamique, pour que les familles, les salariés et la ville s'y retrouvent, c'est celui-là qui l'emportera assure encore Pauline Gaucher. Après, sur la pénurie de personnel, elle doit bien reconnaître que le problème est national. "J'aimerais pouvoir vous dire que tout le personnel recruté est qualifié, dynamique, mobilisé mais il se trouve que les métiers de la petite enfance comme d'autres secteurs sont peu attractifs."
Et comme les structures d'accueil, 325 places en tout, sont gérées par un contrat de délégation de service public, la mairie n'a pas la main sur les recrutements. C'est un problème surtout depuis l'arrêté du mois de juillet qui permet aux structures de recruter sans diplôme. "En revanche", martèle Pauline Gaucher, "les questions de gestion de personnel et de gestion des remplacements font partie des critères d'attribution."
On continuera le combat jusqu'à saisir la justice s'il le faut !
une maman en colère
"Avec notre mobilisation, on espère vraiment peser sur la décision de la ville", soupire cette maman qui préfère rester anonyme, dont le petit garçon est inscrit à l'accueil de l'Ill. "Je ne le fais pas pour lui, il n'a plus qu'un an à faire en crèche mais j'estime que le parcours en petite enfance forge les adultes de demain, c'est primordial." Et cette jeune maman de conclure, "si la décision devait être financière alors on continuera le combat jusqu'à saisir la justice s'il le faut !"
Le processus des négociations avec les quatre candidats est en cours, il va durer encore quelques semaines. La décision finale sera probablement votée lors du conseil municipal du 26 janvier 2023.