Touchée par l’assassinat de Dominique Bernard, poignardé par un jeune radicalisé au lycée Gambetta d’Arras vendredi 13 octobre, une ancienne élève du lycée Marcel Rudloff a souhaité apporter son soutien au corps enseignant, à travers une lettre touchante, qui n’a pas manqué d’émouvoir les premiers concernés.
Le réveil est difficile pour les milliers de professeurs français, encore sous le choc de l’attaque au couteau qui a coûté la vie à un de leurs confrères à Arras le 13 octobre. Malgré la journée d’hommage et de recueillement de du 16 octobre, enseignants et élèves ont le cœur lourd face à la menace qui plane sur l’institution républicaine.
Une inquiétude et une colère qui a amené Clara, ex-lycéenne strasbourgeoise, à rédiger une lettre à l’intention de son ancienne professeure d’allemand. Un message de compassion avec un seul mot d’ordre : "ne rien lâcher".
"On veut nous faire peur et bien on va faire le contraire"
Voilà trois années qu’elle n’avait pas foulé les bancs du lycée Marcel Rudloff, pourtant, Clara n’a pas hésité une seule seconde pour écrire à son ancienne professeure d’allemand, dans la foulée des hommages rendus à Dominique Bernard. "C’était une très bonne prof, on avait gardé contact et je me suis dit que je voulais lui témoigner quelque chose." La jeune fille souhaite elle aussi enseigner dans un lycée plus tard et garde donc une attache particulière à cette profession.
À travers une lettre, l’ancienne élève rappelle ô combien le métier d’enseignant est vital pour la société, et qu’une tragédie comme celle vécue à Arras doit permettre de fortifier ce fondement de la démocratie. "Cet évènement ravive l’urgence de se dire qu’il faut y aller. Malgré les conditions parfois difficiles de travail, malgré le négatif, il ne faut rien lâcher car l’ambition est grande. On a vraiment compris ce que représentait le métier de professeur, dans la pensée collective. On veut nous faire peur et bien on va faire le contraire, prendre cette terreur à contre-pied et faire plus", nous confie-t-elle.
"Une élève éblouie"
"À moi d’avoir une pensée pour vous, pour tous les profs. On ne sait pas trop quoi dire, la sidération est telle, débute Clara dans cette lettre, avant d'immédiatement envoyer un message d'encouragement.
Puis il faut aussi relever la tête. Kopf Hoch. Haut les cœurs. Toujours. Partout. Tout le temps. Même dans l’obscurité. Peut-être même encore plus dans l’obscurité.
On pourrait croire que ces mots ne sont rien. Qu’ils ne font pas le poids. Que penser, écrire, clamer de belles valeurs, c’est seulement de la fantaisie. Mais ce ne sont pas des mots. C’est un hymne. C’est une chanson que l’on doit se répéter, que l’on se répète. C’est une urgence, c’est une lueur.
Je sais de qui je tiens cette lueur, cette force. De vous, de tous les profs que j’ai rencontrés. La transmission de pouvoirs : penser, douter, questionner. Celui de traverser la vie individuelle et surtout collective avec les bons outils.
Plus que jamais : l’urgence de dire, de redire la gratitude et la reconnaissance pour votre travail, votre transmission, votre engagement. Une gratitude personnelle éternelle évidemment. Une reconnaissance collective nécessaire - plus que jamais.
Merci pour tout. Merci d’entretenir ce feu sacré qu’est la pensée, l’ouverture, la curiosité. Vous nous avez donné un sacré outil, un sacré pouvoir. Pour être de bons humains, de bons adultes, de bons citoyens.
À la fameuse remarque : ça ne sert plus à rien, l’avenir est foutu, tout est sombre. Je répondrai que oui c’est pas ouf. Mais qu’il y a de petites fées, de petits magiciens sur la route qui me font penser, croire que c’est encore possible.
Avec ça j’ai encore beaucoup d’espoir.
Merci merci ❤
Une élève éblouie"
Ce message d’espérance a beaucoup touché l’enseignante, qui a partagé la lettre aux autres professeurs du lycée pour, eux aussi, "les soulager".