Pascal Meyer est Meilleur Ouvrier de France, comme son père et son grand-père. Il restaure du patrimoine historique pour des musées, des institutions et des églises. Mais des architectes, décorateurs et riches clients font toujours plus appel à lui.
Dans l'atelier qu'il dirige à Schiltigheim, à côté de Strasbourg, Pascal Meyer, restaurateur, conservateur et doreur à l'or fin, est entouré d'une équipe de choc. "Ils sont jeunes, passionnés, engagés. Ils méritent qu'on leur donne des défis à relever." Pascal parle ainsi des trois artisans qui travaillent à ses côtés, Lise et Maxime, des trentenaires et la petite dernière Juliette, Meilleure apprentie de France. Ensemble ils sont capables de tout faire.
En juin dernier, ils ont remis en place un autel du 18e siècle dans l'abbaye d'Andlau. Après l'avoir restauré à l'atelier, il a fallu tout réassembler dans l'église, hisser colonnes, parements et chapiteau à six mètres de haut, sans abîmer ni le bois, ni les peintures ni les dorures. "C'est une aventure et une immense chance de participer à une telle restauration" reconnait Juliette.
La grande statue dorée qui surplombe Wolxheim, au nord de Molsheim, c'est l'atelier Meyer aussi, tout comme le buffet en bois de l'orgue suspendu de la cathédrale de Strasbourg.
La seule famille de France à compter trois générations de MOF
Dans la famille Meyer, on est Meilleur Ouvrier de France de père en fils depuis trois générations. Son grand-Père Michel, qui a ouvert l'atelier en 1928, son père Jean-Jacques qui l'a repris et maintenant lui, Pascal. Spécialisé dans la restauration et la conservation d'œuvres d'art, l'atelier est également une référence dans la dorure à l'or fin.
Pascal utilise encore certains outils qui ont appartenu à son grand-père, comme la pierre d'agate qui sert au brunissage, donc à donner plus de profondeur à des feuilles d'or collées sur un support, comme ici sur une statuette.
La petite équipe restaure de précieuses pièces du patrimoine historique et religieux, pour des musées, des églises. Mais de plus en plus souvent, elle répond à des demandes d'un nouveau genre.
Les connaissances techniques ancestrales de ces artisans restent essentielles, mais elles doivent être doublées d'imagination et d'inventivité pour répondre à des demandes de plus en plus originales.
Faut que ça brille, mais que ça n'ait pas l'air trop neuf...
Ponçage, grattage, moulage, brunissage...dans l'atelier schilikois, des bruits d'outils, très peu de paroles. Ici chacun est concentré sur son travail et sait ce qu'il a à faire. Maxime est en train de redonner forme aux pieds sculptés d'une chaise, la copie d'un fauteuil de boudoir, conservé au Louvre. Lisa dépose une patine rouge ou jaune sur une grande table basse qui va être dorée à l'or fin pour un particulier. Les parties jaunes sortiront en doré mat, les rouges en doré brillant et profond. De son côté, Juliette prépare un mélange de colle de peau de lapin et de craies, qui après avoir séché dans un moule, viendra orner un cadre de miroir commandé par un décorateur.
Depuis quelques années, les commandes et les clients changent. Désormais des architectes, des décorateurs d'intérieur, des riches collectionneurs et des privés fortunés s'adressent toujours plus nombreux au savoir-faire de Pascal et de son atelier. (Son épouse restaure des tableaux, souvent pour des privés fortunés qui exigent une discrétion absolue sur leurs demandes.)
Cette nouvelle clientèle n'effraie pas du tout Pascal Meyer. Au contraire, elle lui permet de développer de nouvelles façons de faire. "On s'adapte, on développe des techniques pour répondre aux idées les plus farfelues, voire loufoques des architectes et collectionneurs." Désormais, on leur demande d'apposer des dorures sur tous types de supports, notamment sur des enceintes de chaînes hi-fi de certaines grande marque. "Ils veulent que ça brille, que ce soit neuf, mais que ça fasse authentique."
Pascal est toujours prêt à innover et à s'adapter, mais l'un de ses rêves serait tout de même de restaurer l'immense autel de l'abbatiale d'Ebersmunster, dans le Bas-Rhin.