L'ensemble musical "A Hue et e Dia" revisite les chants traditionnels, par amour des mots et des langues. Sur scène, cinq femmes chantent a cappella ou accompagnées de percussions. En concert le 30 avril à Bischwiller (Bas-Rhin).
"À chacun de nos concerts, on refuse du monde". C'est Alexandrine Guedron qui parle. Elle raconte les débuts de son ensemble musical : cinq femmes qui se rencontrent en 2011 autour de l'improvisation musicale, mais toutes attirées aussi par les chants traditionnels. A Hue et a Dia est né pour chanter la tradition orale et aussi des chants imaginaires.
Cette attirance les rattrape, elles s'intéressent d'abord aux chants traditionnels des pays de l'Est, la Serbie, la Bosnie, mêlés à leurs improvisations. Puis les percussions s'invitent. Leur curiosité n'a pas de frontière : les polyphonies sont la base du chant humain, sur tout le globe.
Au gré des rencontres, des échanges, elles apprennent à prononcer des mots, elles apprennent les techniques de chant des peuples dont elles s'entichent. Et surtout, elles demandent ce que veulent dire ces chants, d'où ils viennent, pour qui ils sont.
Le sens des mots
Leur objectif, c'est "d'aller à la rencontre de personnes qui parlent d'autres langues, qui nous apprennent à les prononcer, qui nous expliquent le sens et les paroles. Et fortes de ces rencontres, on les interprète à notre façon. Désormais, nous chantons essentiellement des chants traditionnels, avec des parties improvisées à l'intérieur", résume Alexandrine.
Leur nouveau spectacle, Empreintes, a été vu à Ostwald (Bas-Rhin) et Munster (Haut-Rhin), il sera à Bischwiller (Bas-Rhin) le 30 avril 2024. Ce concert gratuit servira de point de départ à des ateliers autour du chant et de la voix, qui auront lieu au MAC de Bischwiller à partir du mois de mai.
Dorénavant, les cinq musiciennes parcourent le monde en chantant. Après les pays de l'Est, elles ont rencontré un chanteur malgache, une chanteuse grecque et un chanteur irakien qui chante en araméen.
Certains voisins, des demandeurs d'asile, ou par bouche-à-oreille, c'est la première étape : le collectage des chants. Alexandrine, Claire, Elsa, Leila et Julie écoutent les histoires chantées, elles intègrent les traditions orales de ces cultures qu'elles découvrent, et se les réapproprient pour les transmettre à leur public.
"On a rencontré une Camerounaise dont la grand-mère parle le fee fee. Et ce n'est pas juste la langue qui nous intéresse, mais l'histoire derrière ce chant."
Die le die le mena, pouh nfeuh diè laah waah, oo yaa bee ngue nke? / Dors mon enfant, tous les princes et princesses sont endormis, que fais-tu encore éveillé ?
chanson traditionnelle en fee fee (Cameroun)
Chants régionaux
"Ce qui est nouveau dans ce nouveau spectacle aussi, c'est que nous avons cherché des chants dans nos origines régionales : nous avons trouvé un chant en alsacien sur l'avortement, qui date du XVIIe siècle. On souhaite que le destin tragique de la femme de la chanson ne se produise plus aujourd'hui."
"On fait très attention aux contenus, il est essentiel de prendre des chants qui nous touchent, et qui correspondent à notre vision de la société, en tant que femmes."
Mit was hät si dänn die fischl gfànge Maria liewes kind ? Sie häts mit Rüete und Stäcklegfange, mach mys Bett müeter, gschwind ! / Qu'avez-vous utilisé pour attraper le poisson Marie, mon cher enfant ? Elle l'a attrapé avec une verge et des bâtons, fais mon lit maman, vite !
chant traditionnel alsacien du 17e siècle
Pas d'inquiétude pour ceux qui ne comprennent ni l'alsacien, ni le fee fee, ni le bosniaque : "on passe du temps sur scène à expliquer les paroles et le contenu des chants avant de les chanter".
A hue et a dia sera en concert à La Petite Pierre (Bas-Rhin), dans le in du festival Au grès du jazz le 16 août et le 21 août au théâtre de Haguenau (Bas-Rhin) dans le cadre du Festival du houblon.