Les vacances d'hiver arrivent à grand pas et pour les plus impatients d'entre vous, jardiniers amateurs, les plans à venir trottent dans vos têtes. Eric Charton, notre jardinier référent a quelques conseils à vous donner, que vous prendrez plaisir à suivre... ou pas.
Votre jardin se repose, mais dans votre tête, ça bouillonne peut-être. Vous êtes déjà en train de faire des plans sur la comète, d'imaginer vos récoltes d'été et vous trépignez d'impatience à l'idée de remettre vos mains dans la terre.
Les magazines spécialisés regorgent de conseils, souvent judicieux mais parfois contradictoires. Vous ne savez plus à quel saint vous fier ? D'autant que l'année 2021 ayant été, pour beaucoup de jardiniers amateurs, catastrophique, vous avez décidé que, pour 2022, vous serez plus précautionneux et que vous vous réfèrerez à des spécialistes. Ça tombe bien, Eric Charton, expert jardinier et animateur du club relais jardin et compostage à l'Eurométropole de Strasbourg vous aide à démêler le faux du vrai, ou plus exactement vous propose d'y voir plus clair sur trois points bien précis.
- Faut-il faire des rotations de plants dans votre jardin ?
- Faut-il associer les plantes ?
- Faut-il suivre les conseils des calendriers lunaires ?
1. Faut-il faire des rotations de plants dans votre jardin ?
Bien des articles sur le sujet vous expliquent que la rotation des plantations est nécessaire pour plusieurs raisons.
La première, c'est que si vous plantez toujours la même chose au même endroit, d'année en année le sol va s'appauvrir en minéraux utiles pour cette plante. Elle ne va plus pouvoir trouver dans le sol les ressources nécessaires à sa croissance.
La deuxième, c'est que si votre parcelle a été attaquée par un insecte ravageur ou envahie par une maladie, des larves ou des traces restent dans le sol et que tout ce petit monde néfaste se réveillera au printemps, c'est ce qu'on appelle la diapause. Il s'agit donc d'être plus malin et de planter sur ces endroits des légumes ou des fleurs qui ne sont pas sensibles à ces ravageurs ou maladies-là.
Sauf qu'il y a un hic. Cela dépend évidemment de la taille de votre jardin. Si, comme les maraîchers, vous disposez de champs entiers, de serres, les rotations sont utiles et nécessaires, voire indispensables, mais si votre terrain fait, comme la plupart des jardins familiaux entre 1 à 3 hectares, ça ne sert à rien. Parce qu'ils ne faudrait pas prendre les insectes pour des canards sauvages, tout de même. (?) Ben oui, si votre jardin ceinture votre maison, soyez certains que les larves et autres germes sauront migrer quelques mètres plus loin pour retrouver leur gamelle.
Le comble du conseil inutile, c'est d'appliquer une rotation de plantations dans les bacs de jardinier, les carrés potagers.
Pour régler le problème de l'appauvrissement du sol, et puisque vous êtes fidèles aux conseils d'Eric, mais aussi à ceux de vos magazines préférés, vous avez amendé votre sol pour l'hiver. Vous avez réparti couches de feuilles, de paille et de compost. Il va ainsi se régénérer et offrira à nouveau les qualités nutritives essentielles à vos plants, même si vous remettrez les mêmes légumes au même endroit.
Quant aux insectes et autres maladies, soit vous avez fait des traitements biologiques adaptés l'année passée : les traces ou larves ne devraient pas survivre ; soit vous ne replantez pas les légumes visés par les insectes pendant deux à quatre années. Le cycle de survie des larves et autres traces sera à son terme et vous serez débarrassés une bonne fois pour toute. Sauf si votre voisin de jardin a eu la bonne idée de planter le légume attaqué, auquel cas, larves et germes vont se précipiter chez lui.
Un exemple parmi d'autres : une colonie de doryphores s'est attaquée à vos patates. Vous avez déployé le plan blanc et activé le traitement bio, c'est-à-dire votre huile de coude : à la main vous avez retiré les bestioles une à une. Si vous les avez éradiquées, tout va bien pour l'année suivante, mais si vous avez échoué et laissé quelques individus, et que vous replantez des patates, ils réapparaîtront. Et là où ça se corse, c'est que si vous attendez quelques années pour replanter vos tubercules, comme Eric vous le conseille, en comptant sur la fin de cycle de vie des coléoptères rayés de jaune et noir, mais que votre voisin a été moins patient, il est fort à parier que la colonie aura pris des vacances à côté et pourrait bien revenir à la maison. Il vous reste alors une solution, c'est de recourir à l'aide des insectes auxiliaires en leur créant un écosystème favorable. (Malheureusement dans notre exemple du doryphore, il n'existe pas d'insecte auxiliaire prédateur).
Enfin une dernière remarque s'il en fallait, pour vous convaincre de ne pas effectuer de rotation. Il arrive que votre jardin soit ainsi fait, qu'il n'y a qu'un seul espace dégagé baigné de soleil. Vous y planterez là tous vos légumes fruits et vous ne pourrez pas les changer de place, car ils sont dépendants de la lumière et la chaleur de l'astre.
J'en entends bien certains d'entre vous, peu convaincus par les arguments développés, qui préféreront malgré tout effectuer une rotation, histoire de ménager le sol. Eric-"p-t-êtrebenqu'oui-p-t-êtrebenqu'non" vous propose alors de répartir vos plantations potagères selon quatre thèmes que nous avons développés dans un précédent article. SI vous suivez bien tous les conseils, vous aurez amendé votre sol l'hiver et au moment du repiquage vous aurez enrichi le trou de terreau, donc vous aurez reconstitué les éléments nutritifs dont les plantes ont besoin.
Si vous respectez ces conditions, voici un schéma explicatif. Les trois espaces en vert se décalent de gauche à droite d'une année sur l'autre : "Ratatouille" deviendra "Potée"; "Potée" deviendra "Plat gros volume" , "Plat gros volume" deviendra "Ratatouille". L'espace "soupe de courge" reste "soupe de courge" ! Compris ?
2. Faut-il associer les plantes ?
Il est coutume de lire que certaines plantes ont une action favorable sur d'autres plantes et que les associer dans le jardin est judicieux. L'exemple le plus connu est celui de l'association de la tomate et de l'œillet d'Inde. L'œillet repoussant les pucerons. Cependant il arrive que, selon les ouvrages les conseils divergent voire s'opposent. Qui croire ? Eric Charton vous propose une solution pour faire le tri. Selon lui, ce sont les besoins des plantes qui vous donnent une indication. Ainsi prenez la carotte et le poireau, qu'on cite souvent en exemple de plantes à associer. Aucune magie derrière cette proposition, ces deux plantes ne distillent pas des charmes mystérieux qui éloigneraient des prédateurs ou les rendraient plus fortes l'une l'autre. Elles ont juste les mêmes besoins : en arrosage et en nutriments. Le même milieu de vie, et les mêmes conditions, leur apportent ce dont elles ont besoin. Aussi simple que ça. À vous donc d'observer et de connaître votre terrain (on se répète d'article en article). Ses facteurs écologiques abiotiques ou biotiques. Tout est très bien expliqué dans le lien, mieux que je ne saurais le faire.
3. Faut-il suivre les conseils des calendriers lunaires ?
Travailler avec la lune, c'est une bonne idée, mais attention il existe deux sortes de calendriers lunaires.
- Des calendriers en lune croissante ou décroissante qui suivent les cycles de la lune , pleine lune, nouvelle lune, premier quartier, etc.
- Des calendriers en lune ascendante et descendante, qui eux correspondent à la position de la lune par rapport à l'horizon : lune basse ou lune haute.
Là où ça se complique c'est que les conseils des calendriers lunaires peuvent s'opposer selon les phases et les positions pour un jour déterminé. Afin que la gestion de votre jardin ne devienne pas un casse-tête, Eric Charton vous conseille d'adopter un type de calendrier et de s'y tenir une fois pour toutes, pendant toute l'année. Tout en vous fiant également à votre sens de l'observation. Si le calendrier lunaire vous dit qu'il faut planter durant une semaine précise, mais que la météo n'est pas favorable, adaptez-vous ! Enfin Eric vous recommande un calendrier lunaire qui a réussi à combiner les deux types de calendrier : les 4 saisons du jardinage.
Pour conclure, vous l'aurez compris les conseils, y compris ceux d'Eric Charton, sont faits pour être suivis, ou pas. Faites vous confiance. Les grands principes et les dogmes sont faits pour les professionnels. Piquez ici ou là des conseils, des idées, voyez si ça marche dans votre jardin et observez. Peu importe la méthode, si elle ne fait pas de mal à la nature. L'essentiel et d'aimer ce que vous faites.
Retrouvez tous les conseils d'Eric Charton dans ses podcasts.