"Je ne suis plus le malade, je suis le patient artiste" : atteint de spondylarthrite ankylosante, il canalise sa douleur grâce à ses pinceaux

Atteint de spondylarthrite ankylosante, Jean-Marie Marchal trouve dans la peinture une manière d’expurger les douleurs liées à cette maladie inflammatoire : "C'est une vraie thérapie, mieux qu'un Doliprane".

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Ce matin-là, tout démarre avec quatre couleurs chaudes. Ce choix n'est pas réfléchi, mais ressenti, car peindre est une pulsion pour Jean-Marie Marchal : "C’est une manière d’expurger : mes douleurs, mes angoisses, mes sentiments, mes ressentiments, mes frustrations, certains passages de la vie qui ont été durs. Et qui le sont encore".

À 74 ans, cet ancien sportif et parachutiste, partage sa vie depuis presque 40 ans avec une spondylarthrite ankylosante. Cette maladie inflammatoire attaque la colonne, les articulations de tous les membres et la cage thoracique : "Ce jour-là, j’ai pris perpétuité".

Il y a trois ans, en plein Covid, il découvre la peinture. Lui qui n’aime pas parler de sa maladie a trouvé dans cet art une échappatoire durant ses crises aiguës.

Mieux qu’un Doliprane

Concentré, quasiment en transe, Jean-Marie Marchal peint toujours dans son bureau : "Il faut que je sois dans un état un peu d'excitation, il y a une concentration terrible. Quand j’aurai fini, je serai épuisé. À la fin de la journée, c'est comme si j'avais couru trois marathons". Peindre est autant un plaisir qu’un effort. Un gros effort.

"Plus j’ai mal, plus je peins, plus je prends du plaisir et plus c’est violent". Plus qu'une aide, c'est une thérapie. Jean-Marie Marchal enfonce le clou : "C'est une vraie thérapie, mieux qu'un Doliprane".

Quand il peint, il ne ressent plus les douleurs : "Elles étaient là avant, elles vont revenir après, mais pendant, non. Il a fallu que je formate très rapidement mon cerveau, parce que la peinture abstraite, les philosophes le disent mieux que moi, c'est ce qui sort de l'intérieur".

Et, ce qui sort de l'intérieur, cela peut être surprenant. "Au départ, la toile est blanche. On ne sait pas ce qu'il va y avoir dessus".

Une pulsion de peinture

Comme beaucoup, Jean-Michel Marchal a eu interdiction de sortir pendant deux mois lors du Covid. Cinquante-huit jours enfermé dans son appartement : "Je lisais beaucoup, je regardais tout le sport à la télé, mais ça ne suffisait pas à nourrir une journée de 24 heures".

Et c'est là qu'il entend une petite voix : "Elle m'a traversé l'esprit et m’a dit : tu vas peindre". Il décide de la prendre au mot. Il passe commande de pinceaux, de toiles, de peintures sur internet, au grand dam de son épouse : J'ai posé le trépied, j'ai installé la toile et c'était parti".

Il peint comme une pulsion : "Je n'ai pas d'explication. Pourquoi telle couleur, pourquoi tel coup de pinceau ou tel mélange de couleurs ? Je ne sais pas. Je n’arrive pas à l'expliquer. C'est sorti comme ça et voilà".

Vivre avec une spondylarthrite ankylosante

Sa maladie est invisible pour les autres. Mais, pour lui, c’est une compagne du quotidien : "C'est dur et c'est interminable. Vous pouvez être malade pendant huit jours, un an, mais durant toute une vie, c'est long !"

"Il faut adapter sa vie. Il faut adapter son mental, adapter son psychisme. Cette maladie, c'est quelqu'un qui m'accompagne, qui est toujours à côté de moi. Du matin au soir, du soir au matin".

Jean-Michel Marchal s’est longtemps rebiffé : "J'ai lutté, surtout dans l'espérance que cela s'arrête un jour. Mais cela ne s'arrête jamais. Ça dure toute une vie, on n'en meurt pas. J’ai fini par accepter la maladie à 60 ans. J’en ai 74 aujourd’hui. Il faut se raisonner. L'acceptation est difficile parce qu'il y a beaucoup de frustration". Pour lui, ancien athlète, le sport n’existe plus qu’à la télévision.

Faire la paix

Le peintre autodidacte de Lipsheim le reconnait : "La peinture, c'est une fierté. Je me dis que ce n'est pas à la portée de n'importe qui de faire ça, d'avoir la capacité d'organiser un vernissage, surtout à mon âge ! La peinture était très loin de mon univers, je n’avais jamais touché un pinceau de ma vie. Ça me permet d'exister mieux. Enfin, autrement".

Grâce à la peinture, Jean-Michel Marchal a le sentiment que sa vie ne se résume plus à sa maladie : "J'ai autre chose à faire que de vivre ma maladie et de ne penser qu'à elle. Je regarde mes tableaux, je monte des expositions. Je ne suis plus le malade ou le patient, je suis le patient artiste. C’est différent".

Aux patients atteints comme lui d’une maladie auto-immune, il conseille : "Lancez-vous. Il faut y aller. S'il y a quelque chose qui vous a échappé dans votre vie, pour une raison ou pour une autre, et que vous le découvrez maintenant, allez-y, foncez ! C'est une thérapie. Et cela change votre vie".

Les œuvres de Jean-Marie Marchal sont exposées à l'hôpital de Hautepierre à Strasbourg. Elles partagent l’affiche avec les créations d’autres artistes qui ont un point commun : tous souffrent de maladies auto-immunes très handicapantes et douloureuses.

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