"On est pris dans une toile d'araignée, on est étouffés", un village se mobilise contre un projet routier

Les habitants de Duppigheim, dans le Bas-Rhin, se mobilisent contre un projet routier de trois kilomètres qui doit relier le contournement ouest à Entzheim en passant par leur village. Ils dénoncent une aberration écologique et des nuisances importantes tandis que les collectivités porteuses du projet mettent en avant l'intérêt général.

Rien que le mot route leur donne des boutons. Les habitants de Duppigheim dans le Bas-Rhin unissent leur force pour s'opposer au projet de Lide, liaison intermodale Duppigheim-Entzheim, qui doit relier l'aéroport au contournement ouest en passant par leur village. 

Une route de trois kilomètres, une infrastructure de plus qui doit finir de les encercler. En effet, avec l'aéroport à l'Est, l'A355 (GCO) à l'Ouest et l'A35 au sud, seul le nord de la commune était pour l'heure épargné. Mais avec ce projet de Lide, les habitants se sentent définitivement cernés.

"On est pris dans une toile d'araignée, on est étouffés pour toutes ces infrastructures de communication!", s'indigne cette habitante alors qu'ils sont une poignée réunis en mairie avec le premier édile pour raconter à notre équipe sur place leur désarroi.

"On n'a même pas été concertés!", n'en revient toujours pas Julien Haegy, le maire de Duppigheim. C'est une liaison GCO-Duppigheim-Entzheim, mais on ne nous a pas demandé notre avis. On a déjà payé un lourd tribut avec la réalisation du GCO, on était mobilisé aussi contre l'aire de service construite à deux pas de chez nous et maintenant on nous annonce une nouvelle route qui vient enclaver le village ! C'est trop, on n'arrivera à plus de 100 000 véhicules/jour qui traverseront la commune, c'est absolument démesuré et on n’en comprend même pas les raisons, on a un sentiment d'injustice très fort", conclut amèrement le jeune édile.

Ce projet, déjà inscrit dans le contrat triennal Strasbourg capitale européenne (qui lie l'Etat, l'EMS, la CEA et la région Grand Est) 2018-2020, devait l'être à nouveau dans celui qui sera signé cette année. Les collectivités qui portent cette route n'entendent pas renoncer. Pour elles, cette infrastructure est un projet d'intérêt général.

Une zone stratégique dont on doit fluidifier l'accès

"C'est une liaison stratégique sur la partie ouest de l'agglomération, nous explique Jean-Philippe Maurer, vice président en charge des réseaux et mobilités à la Collectivité européenne d'Alsace.

La gare d'Entzheim peut s'appuyer sur une grosse capacité de stationnements au niveau du parking de l'aéroport, c'est donc pour nous une façon de fluidifier les accès à cette infrastructure et de profiter également du développement ferroviaire à travers le REME, pour emmener rapidement un maximum de personnes et donc favoriser le transport modal."

Autrement dit, multiplier les accès à l'aéroport, tout en incitant les usagers à prendre le train pour désengorger un peu l'A35 même si Jean-Philippe Maurer le reconnaît, "le nombre de véhicules en moins est modéré, les dernières études évoquent 6 000 voitures de moins vers Strasbourg."

Il entend par ailleurs les protestations des habitants. "C'est vrai que cela peut générer des irritations sur place, c'est une zone stratégique, on densifie des accès routiers parce qu'on a un territoire alsacien très peuplé avec beaucoup de mobilités, c'est la balance entre l'intérêt très local et l'intérêt général."

Des arguments difficilement entendables par les habitants de Duppigheim qui craignent en plus que cette route ne bloque l'accès piéton à ce qu'ils appellent leur poumon vert situé au nord de la commune. Aujourd'hui, ils n'ont qu'un passage à niveau à traverser et ils sont dans les champs puis la forêt, traversée par la Bruche. Un endroit qu'ils ont tenu à nous montrer.

"C'est une commune très urbanisée, nous explique cet habitant, alors on essaie de renaturer un maximum, on a planté plus de 300 arbres, des haies champêtres, on a une démarche dynamique qui est entravée par la nouvelle de cette route."

Et de continuer, "c'est un endroit important car on peut se promener, il y a l'arboretum, la Bruche, les lieux de promenade. Si une nouvelle route se fait, nous ne savons pas comment nous pourrons la franchir et de toute façon, ça gâcherait la quiétude de l'endroit, il y aurait une circulation permanente", conclut-il dans un souffle.

D'autant plus incompréhensible pour le maire de Duppigheim, que les communes ont des obligations environnementales. "Nous sommes tenus de favoriser la création de corridors écologiques pour relier la Bruche à la forêt de Blaesheim, du coup ce projet va à l'encontre de ces préconisations, c'est une aberration !", enrage-t-il.

De son côté, Jean-Philippe Maurer l'assure, les compensations seront à la hauteur. "Les contraintes réglementaires sont très fortes, il y a le système de compensations, qui sont souvent 4, 5 fois supérieures à l'artificialisation effective".

Sans doute pas de quoi rassurer ni même annihiler la mobilisation des habitants de Duppigheim. Une réunion publique est prévue ce 9 février à la salle des fêtes de la commune.

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