Après 30 ans de bons et loyaux services (payants), le minitel s'est éteint il y a tout juste dix ans, le 30 juin 2012. Tombé dans l'oubli et ringardisé, le minitel fut pourtant un véritable phénomène de société. Un fleuron de la high tech française. Avec notre websérie "Retour vers le 3615", (re)découvrez l'incroyable histoire du minitel racontée par Fannyfique.
Le Minitel, ça fait dix ans que c'est terminé. En 2012, plus d'infos dans les tuyaux, clap de fin pour cet objet si emblématique qui a marqué les années 1980 et le début des années 1990. Ce petit Internet avant l'heure, désormais relégué au rang de décoration vintage, fut une véritable fierté française très en avance sur son temps. Pour revivre l'époque incroyable du Minitel et remonter le temps, embarquons à bord de la DeLorean de "Retour vers le 3615", la websérie présentée par Fannyfique, youtubeuse/vidéaste de bonne humeur spécialiste en geekeries et objets vintage.
Le minitel, précurseur à Internet
Du haut de mes 32 ans quasi révolus, je fais partie de la génération qui a grandi entre deux mondes : j'ai vécu les dernières bribes de la vie avant Internet tout en prenant des centimètres à mesure que le web colonisait nos vies. Pendant l'enfance, j'ai donc croisé un drôle d'objet, un peu mystérieux, une sorte de grosse boîte marron avec un écran et un clavier : le Minitel.
A l'époque, je n'avais pas conscience de ce qu'il représentait, et je comprenais encore moins à quoi il servait. Je m'amusais juste à taper sur les touches du clavier, parce que pianoter et voir des lettres apparaître sur un écran, c'était rigolo et assez inédit. Un peu frustrant aussi puisqu'il ne se passait pas grand-chose en réponse à mes pianotages intempestifs. Je ne savais tout simplement pas que j'avais un petit bijou de technologie sous les doigts.
Ci-dessous le premier épisode de notre websérie "Minitel : retour vers le 3615".
Retrouvez les cinq épisodes de la playlist.
Le Minitel ou "Médium Interactif par Numérisation d'Information TELéphonique" est une invention qui repose sur le réseau Télétel et qui permettait à des millions de gens d'accéder à pleins d'informations pratiques comme l'annuaire, la presse, la vente par correspondance, la banque... Il permettait donc déjà de faire tout ce qu'on fait aujourd'hui en ligne. Assez dingue quand on y pense n'est-ce pas ?
Au moment où le Minitel est imaginé, dans les années 70, le réseau de téléphonie français est très peu développé et très en retard sur les autres pays. Durant la décennie, un grand rattrapage est mis en place par le ministère des PTT et le nombre de foyers équipés passe de 4 à 20 millions. Un déploiement très onéreux qu'il faut rentabiliser. Pour espérer un retour sur investissement, la PTT mise sur le coût des communication et pousse donc les gens à se servir du téléphone. Malheureusement, les Français conservent leurs vieilles habitudes et le nombre de communications téléphoniques n'augmente pas. Il faut donc trouver un autre moyen.
C'est là qu'entre en jeu la télématique, un terme né dans le rapport Nora-Minc de la contraction entre télécommunications et informatique, et qui reflète une forte volonté de l'Etat d'informatiser la société française. Le but : permettre à des machines grand public de se brancher à un ordinateur central grâce au réseau téléphonique et à un modem intégré. Le CNET (Centre national d'étude de télécommunications) et le CCETT (Centre commun d'études de télévision et de télécommunication) planchent alors sur une solution qui permettrait de déployer la télématique en France : le Minitel.
Code 3611, d'abord en Bretagne
L'engin " n’est autre qu’un terminal de consultation de données, rappelle Gtec, fondé sur la norme Vidéotex (service d’interactivité) qui comprend uniquement un clavier et un écran mais pas de disque dur (pas d’enregistrement des données)" . Le Minitel n'est donc pas un ordinateur, c'est un simple terminal relié à des serveurs, qui ne fait qu'afficher des informations.
Le premier service proposé est l'annuaire téléphonique, code 3611, qui est d'abord testé en 1980 auprès d'une cinquantaine d'utilisateurs à Saint-Malo, puis en 1981 et 1982 auprès de quelques milliers usagers dans le reste de l'Ille-et-Villaine.
Alors là, je peux vous assurer que d'apprendre que le Minitel est en partie breton, ça ne me rend pas peu fière d'être bretonne moi-même, nous étions à la pointe messieurs dames ! Une autre expérimentation a lieu à Velizy afin de tester d'autres services que pourrait proposer le Minitel. A partir du 4 juin 1982, la boîte marron déferle dans les foyers français. Les factures téléphoniques explosent pour le plus grand bonheur de la DGT (Direction générale des télécommunications). Le Minitel est un énorme succès et qui constitue une véritable avancée technologique qui positionne la France en tant que leader sur le marché mondial.
Pas ringard, mais arrivé... trop tôt
" Avoir raison trop tôt, c’est peut-être avoir tort..." Vous avez quatre heures. L'expression résume assez bien ce qui est arrivé à notre malheureux Minitel. Le concept était génial, l'invention était ultra high-tech, mais le tout était trop en avance sur son temps. Le Minitel est arrivé dans les années 1980, à un moment où l'image n'existait pas - hormis à la télévision - et à une période où les capacités de stockage n'étaient pas suffisantes pour qu'il prenne son essor.
Globalement, les idées étaient là, mais en pratique, c'était lent, moche et ça ne pouvait pas afficher d'images ni de vidéos. Avoir un Minitel chez soi était le comble du chic, mais à cause des usages limités que l'on pouvait en faire, il n'était pas rare que l'objet finisse au fond d'une cave, à prendre la poussière. Ballot.
A l'origine, le Minitel est tout sauf ringard au point qu'il trouve sa place chez des millions de Français ravis d'en faire l'acquisition. C'est au début des années 1990 que sa réputation commence à se ternir. Un concurrent redoutable lui fait de l'ombre : Internet. Les capacités technologiques ayant évolué en dix ans, l e nouvel arrivant offre des possibilités qui dépassent celles du Minitel : de meilleurs graphismes, un accès gratuit, un réseau non centralisé, une possibilité d'utilisation internationale, des espaces de stockage... Le Minitel, dont la réputation se trouve entachée par l'arrivée des messageries roses, se retrouve vite dépassé et relégué au rang d'objet ringard.
Aujourd'hui, Internet règne en maître et l'imaginaire collectif voit le Minitel comme un objet ringard, un échec à la française, mais, "c’est oublier un peu vite qu’au début des années 1980, l’annuaire électronique est la plus grande base de données du monde" souligne Libération. " C’est oublier aussi que ces premiers services, de l’annuaire électronique à la vente par correspondance en passant par la consultation des horaires de la SNCF, constituent le premier système d’interaction écran-clavier pleinement utilisable par le grand public à l’époque où Internet est encore loin du web et reste cantonné aux laboratoires de recherches et à quelques informaticiens passionnés".
Difficile à croire, mais dans les années 1970-1980, la France était en avance sur les Anglais, les Allemands et les Américains en matière de télécommunications. Le Minitel, avant d'être dépassé, c'était LA révolution technologique que tout le monde nous enviait.
Le vintage, c'est vraiment trop classe
Comme beaucoup de gens, retrouver certains objets du passé, leur donner une seconde vie ou leur trouver un place dans mon petit intérieur est un véritable plaisir. Après avoir remis la main sur la caméra Super 8 de mon grand-père, je me suis mise à les collectionner. J'éprouve un immense bonheur à remettre en état de marche ce que je considère comme d'authentiques petits trésors du passé. Pour moi, il y a une sorte d’aura, une véritable mythologie autour de ces objets que je n'avais jamais eu entre mes mains auparavant.
Je n'aurais jamais cru posséder un jour ces caméras que je n'avais vu que dans les films, comme Super 8 de J.J Abrams, ou qui n'étaient évoquées qu'à l'occasion de gargantuesques repas familiaux. Imaginez ma tête quand j'en ai eu une dans les mains pour la première fois ! Et bien pour le Minitel, c’est exactement pareil.
Le Minitel est un pur objet vintage hyper branché, une véritable star des brocantes qui porte en lui tout un imaginaire collectif. Il est le symbole d'un monde avant Internet (si si, je vous jure, ça a existé). A l'heure où nous vivons dans un monde secoué par des problématiques lourdes, le Minitel permet un retour au source, il renvoi à une époque différente et souvent idéalisée ainsi qu'à un besoin d'authenticité. Le Minitel raconte une période, il parle d'un vécu et porte une histoire en lui. Telle une madeleine de Proust, on éprouve donc un certain plaisir à le découvrir ou le redécouvrir. Le Minitel est vintage, et le vintage, c'est tendance. Il est donc parfait pour agrémenter une déco rétro avec un objet de la pop culture au summum du chic.
Après tant d'arguments, vous hésitez encore à regarder notre websérie ? Ne serait-ce que pour apprendre des choses sur des gens qui n'étaient finalement rien d'autres que les geeks de l'époque. En tant que petite geekette, ça me parle. Je vous laisse sur ce dernier conseil testé et approuvé par ma propre famille : regardez ces épisodes avec vos amis, parents, enfants, grands-parents... Vous verrez, c'est trop rigolo d'échanger des souvenirs et anecdotes ensemble ou de faire découvrir aux plus jeunes d'entre vous l'épopée démente que fut le Minitel. Pour votre plus grand bonheur, mines nostalgiques, moues amusées ou regards médusés seront au rendez-vous de "Retour vers le 3615".