Atteint de dysplasie spondylo-épiphysaire congénitale, Thomas Zeller raconte comment son handicap invisible lui porte préjudice au quotidien. À l’occasion de la journée internationale des maladies rares, le 28 février 2023, il alerte sur la nécessité d’une meilleure prise en charge de sa pathologie.
En France, on dénombre près de 3 millions de personnes atteintes d’une maladie rare. Pour sensibiliser la population, les professionnels de santé, mais aussi les responsables politiques à ce sujet, une 16ème journée internationale est organisée le mardi 28 février à travers 60 pays. À cette occasion, nous sommes allés à la rencontre de Thomas Zeller, 28 ans, qui est atteint de dysplasie spondylo-épiphysaire congénitale, une pathologie dégénérative qui affecte les os et articulations. Cet Alsacien de 28 ans veut alerter sur son handicap qui touche seulement 80 personnes dans l’Hexagone.
Originaire de Brumath, dans le Bas-Rhin, Thomas n’a eu connaissance de sa maladie qu’après des dizaines de rendez-vous médicaux. "J’ai toujours eu des problèmes d’articulations avec des douleurs très intenses au moindre effort. À l’âge de 19 ans, j’ai eu une hernie discale et je me suis fait opérer à Paris, explique-t-il, puis j’ai décidé de passer une IRM à Haguenau, car je n’avais eu aucun contrôle post-opératoire". Stupéfait, le radiologue pensait avoir inversé les radios d’un patient âgé de 70 ans. "Il m’a conseillé d’aller voir un rhumatologue en urgence".
Après plusieurs examens, sa généticienne décide d’effectuer des analyses sanguines et de les envoyer dans un laboratoire spécialisé en génétique à Paris. "J’ai attendu plusieurs mois et un beau jour, j'ai reçu un courrier dans ma boîte aux lettres m’apprenant que j’ai une maladie dont il n’existe actuellement aucun traitement, raconte-t-il, j’avoue que ça a été difficile à encaisser".
Un handicap invisible
Il aura en tout fallu cinq ans pour que Thomas sache de quoi il était réellement atteint. Depuis l’adolescence, il souffre de douleurs dans les articulations et ne peut effectuer de longs efforts physiques. "Ça m’a porté préjudice durant les cours d’EPS, et personne ne comprenait vraiment. Mais ça a formé ma personnalité et mon caractère", sourit-il. Des hormones de croissance lui sont aussi prescrites de 14 à 17 ans afin qu’il puisse grandir. "La dysplasie est souvent la cause d’un arrêt brutal de la croissance chez certains malades. Si je n’avais pas pris d’hormones, je mesurerai 1,50 m au lieu d’1,68 m".
Certains ne comprennent pas lorsque je me gare sur une place réservée aux personnes handicapées
Thomas Zeller, atteint de dysplasie spondylo-épiphysaire congénitale
En parallèle, il subit des discriminations liées à l’invisibilité de son handicap. "Je ne suis pas en fauteuil roulant, alors certains ne comprennent pas lorsque je me gare sur une place réservée aux personnes handicapées", déplore-t-il. À plusieurs reprises, Thomas est insulté ou qualifié de "profiteur" lorsqu’il sort sa carte d’invalidité à la caisse prioritaire du supermarché. "C’est la raison pour laquelle je me bats pour sensibiliser tout le monde à cette maladie, car on ne se sent pas assez entendu par la population et les pouvoirs publics".
Un défi psychologique
En plus de la douleur physique quotidienne, Thomas doit encaisser les difficultés psychologiques liées à sa maladie : "Lorsque j’ai appris que j’étais malade, ça a été une énorme claque. J’ai eu de grosses angoisses pendant une période, car je n’arrivais plus à regarder vers l’avenir". Alors que les idées noires ne cessent de le hanter, le jeune homme décide de prendre rendez-vous chez le psychologue. "Ça m’a fait un bien fou et je continue encore aujourd’hui pour continuer à aller bien dans ma tête", affirme-t-il.
Toutefois, les consultations ne lui sont pas remboursées. En effet, aucun suivi psychologique n’est prévu pour les malades qui prennent connaissance du terrible diagnostique. "Avoir un handicap comme le mien, ça coûte de l’argent et ça affecte le moral. En plus de mes séances de psy, j’ai un reste à charge à payer lors de mes chirurgies orthopédiques, l’assurance est plus chère pour les emprunts bancaires, tout comme la mutuelle", regrette-t-il. Thomas a, en effet, subit trois chirurgies du genou, une du coude et l’autre de la colonne vertébrale. Elles lui permettent de soulager ses douleurs temporairement.
Soutenu par sa maman, infirmière, et son père, éducateur spécialisé, il envisage désormais d’avoir un enfant avec sa conjointe. "C’est encore une autre difficulté à surmonter. Nous devons avoir recours à une PMA, dont les délais sont d’un an environ. Puis, pour être certain que notre bébé ne sera pas atteint de la même maladie génétique, il faut réaliser un diagnostic préimplantatoire qui prend une année aussi", confie-t-il.
Pour améliorer ses conditions de vie, et celles d’autres personnes atteintes de maladies rares, Thomas continue chaque jour à sensibiliser sur sa pathologie grâce à l’association Un défi de taille dont il occupe le poste de trésorier. "C’est une petite association qui n’attire pas l’œil des grands donateurs, mais on essaye de faire notre maximum pour aider les personnes malades et les accompagner au mieux notamment dans la constitution du dossier MPDPH, qui est très difficile". Un pôle communication et entraide existe aussi afin de favoriser les échanges entre malades et leurs familles qui se sentent parfois désemparées.