Caritas Mulhouse : redonner à chacun le pouvoir d'agir

L'espace Drouot à Mulhouse est l'une des antennes de l'association Caritas Alsace.
Un lieu où des personnes en situation de précarité peuvent trouver de l'aide et un accompagnement personnalisés. Afin de pouvoir retrouver leur autonomie et leur place dans la société.
 

Pousser la porte de l'espace Drouot à Mulhouse, c'est entrer dans une ruche : un grand guichet d'accueil tenu par de bénévoles, une salle d'attente bien remplie, des bureaux pour des entretiens individuels, une épicerie, des salles conviviales, une cuisine…
 



Parmi les 1.300 personnes qui, chaque année, viennent ici demander de l'aide, la majorité est envoyée par une assistante sociale. Mais chaque cas est différent, chaque situation, unique. Un premier entretien d'accueil aide à cerner la demande, puis la personne est orientée vers le service le plus adapté à y répondre.

Les coups de pouce financiers (impayés de loyer, d'une facture d'électricité…) pourront être accordés par une commission qui étudiera le dossier. Mais ce type de demande n'est souvent que la partie visible de l'iceberg, et appelle une réponse plus complète et appropriée qu'un simple chèque. D'où la nécessité, pour les accueillants, d'établir "un lien de confiance, et d'entendre les non-dits", selon Jean-Claude Schmitt, l'un des 200 bénévoles de l'espace Drouot.


Une aide alimentaire peut en cacher d'autres

Chaque semaine, une centaine de personnes, isolées ou en famille, viennent faire des courses à l'épicerie solidaire. Le principe est simple : on achète les produits dont on a besoin (aliments, produits de soins et d'entretien) dans le cadre d'une limite budgétaire liée à la composition familiale, mais on ne paie que 10% du prix réel. A titre d'exemple, une personne seule peut faire des achats à hauteur de 20 euros, mais ne débourse que 2 euros lorsqu'elle passe à la caisse.

"J'essaie de me tenir debout"
- Steven, bénéficiaire

"C'est un petit plus dans le quotidien. Ça peut paraître pas grand-chose, mais ça aide vraiment… une boîte de ratatouille, un steak", explique Steven, client de l'épicerie. L'argent ainsi économisé sur plusieurs semaines lui permettra de régler une facture. Et surtout, de ne plus subir certains frais d'impayés : "Avis d'impayé : 20 euros, et encore 20 euros… Sur une facture de 35 euros, j'ai 40 euros de frais", explique-t-il. Et ces frais fragilisent encore davantage son budget déjà très serré (il vit avec environ 500 euros par mois de l'ASS (allocation de solidarité spécifique).
 


En contrepartie des achats à l'épicerie solidaire, la personne signe un contrat qui l'engage à payer une facture en échange. Il lui est aussi demandé de participer au minimum à une séance de l'un des ateliers proposés par l'association : cuisine, bricolage, groupe d'hommes, groupe de femmes, activités du week-end, etc. En effet, la précarité budgétaire cache souvent d'autres soucis : solitude, désocialisation… auxquels ces ateliers tentent de remédier.

La cuisine, lieu de vie

Plusieurs fois par semaine, la cuisine de l'espace Drouot est en pleine effervescence. Avec des denrées reçues de la Banque alimentaire, les membres du groupe "cuisine conviviale" confectionnent un repas complet et équilibrés, pour le déguster ensemble. Echange de recettes, apprentissage du travail en groupe, rupture de l'isolement… les bénéfices d'une telle activité sont nombreux.
 


De même, le mercredi est consacré au groupe "confitures". Les fruits, également fournis par la Banque alimentaire, passent d'abord par l'épicerie solidaire. Puis ceux qui n'ont pas trouvé preneur, plus très présentables ou trop exotiques, finissent dans les pots de confiture. Mais il y a toujours de quoi faire, même s'il faut parfois expérimenter des mélanges inédits : mangue-melon-pitaya, ou banane-grenade, la créativité du groupe est sans limites. Et cette pratique régulière de la "chasse au gaspi" a des vertus pédagogiques. "Il y a plein de choses que je ne jette plus chez moi, que je conserve ou reproduis, comme ici, explique Dominique, l'une des participantes. C'est vraiment enrichissant." La vente des confitures lors des marchés (principalement de Noël) permet de financer les produits de soins et d'entretien proposés à l'épicerie solidaire, et chaque mercredi, un gros pot de confitures est réservé à une antenne strasbourgeoise de Caritas, qui offre des petits-déjeuners à des personnes sans domicile fixe. 


Un écrivain public pour faire reconnaître ses droits


L'espace Drouot propose aussi des ateliers plus techniques et formateurs : alphabétisation, informatique, accompagnement à la recherche d'emploi, aide au budget… Et un écrivain public, présent deux fois par semaine, aide à la rédaction de courriers – pas seulement des personnes analphabètes, mais surtout celles, bien plus nombreuses, qui n'arrivent pas à faire reconnaître leurs droits parce que certains jargons administratifs ou juridiques les dépassent.
 

Caritas Alsace est membre d'un réseau mondial, et représente le Secours catholique en Alsace. De Sarre-Union à Ferrette, 80 équipes sont actives sur le terrain. Grâce à l'engagement de plus de 2000 bénévoles, elles peuvent accueillir plus de 40 500 personnes par an.  


Un projet d'avenir


Au niveau alsacien, l'association s'est donné des objectifs précis pour les années à venir. C'est son "projet d'avenir 2019-2026", établi selon deux axes principaux. Le premier est d'aider chaque personne accueillie à redevenir actrice de sa propre vie - objectif donc totalement opposé à l'assistanat. "Notre projet est de donner à chacun du 'pouvoir d'agir', précise Blandine Riffard, coordinatrice de Caritas Alsace 68. Laisser les gens faire, les aider à révéler leurs compétences et leurs talents, pour que chacun puisse trouver sa place (…) dans la société."

Le second enjeu est l'accès aux droits pour tous : droit à un travail, à une bonne éducation, à une vie décente… Dans ce but, l'association développe de nombreux ateliers participatifs sur l'emploi, autour des mobilités, etc. afin de mieux accompagner les personnes en rupture sociale dans cette voie.


"On ne fait que révéler les besoins réels de cette société."
- Blandine Diffard, coordinatrice Caritas Alsace 68


Mais à l'espace Drouot comme dans les autres lieux alsaciens du réseau, bénévoles et salariés sont aussi des témoins irremplaçables du mal-être de notre société. Et lorsqu'ils constatent des dysfonctionnements institutionnels, ils n'hésitent pas à jouer la mouche du coche, et faire remonter l'information aux instances concernées (administrations, CAF (caisse d'allocations familiales) ou instances politiques locales.
 
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