Résultats de la présidentielle 2022 en Champagne-Ardenne : les scores de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélenchon menacent-ils les députés sortants ?

Les élections législatives sont parfois surnommées le troisième tour de la présidentielle. Elles auront lieu en juin. Les résultats de la présidentielle, notamment les scores importants du RN et de LFI menacent-ils les députés sortants ? Le politologue Olivier Dupéron nous répond.

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Le second tour de l'élection présidentielle 2022 a été remporté par Emmanuel Macron. Dans les départements de Champagne-Ardenne, le président sortant arrive en tête uniquement dans la Marne. En Haute-Marne, dans les Ardennes et dans l'Aube, Marine Le Pen devance Emmanuel Macron.

Ce scrutin n'est pas le dernier de 2022. Dans moins de deux mois, les 12 et 19 juin, il sera de nouveau question de se rendre aux urnes, cette fois-ci pour les élections législatives. Cela donnera-t-il lieu à des surprises en Champagne-Ardenne ? Olivier Dupéron, politologue et professeur de droit public à l'université de Reims, a bien voulu analyser pour nous les résultats du premier tour de la présidentielle par circonscription législative, pour nous éclairer sur ce qui pourrait arriver ou non dans la Marne, dans l'Aube, en Haute-Marne et dans les Ardennes.

Marine Le Pen en tête presque partout au premier tour

Au premier tour de la présidentielle 2022, Marine Le Pen est arrivée en tête dans 11 des 13 circonscriptions de Champagne-Ardenne. Emmanuel Macron ne la devance que dans deux d'entre elles, dans la Marne. Un résultat conforme à celui observé il y a cinq ans, où la candidate de ce qui s'appelait alors le Front national était en tête dans 12 circonscriptions.

"Les résultats [du premier tour] sont assez conformes aux tendances, surtout si on se met sur le temps assez court des dernières élections, note Olivier Dupéron.  La candidature d'Éric Zemmour n'a pas perturbé plus que ça Marine Le Pen dans les scores réalisés. Cela donne même une petite réserve de voix supplémentaires, qui aurait pu augmenter son score par exemple en Haute-Marne, ou dans quelques autres circonscriptions où elle réalisait déjà des scores très importants. Emmanuel Macron est soit deuxième soit premier. Et Jean-Luc Mélenchon ferme le trio de manière quasi-systématique. Là aussi, il n'y a rien de surprenant."

La forte régression du vote LR interroge

Comme au niveau national, le vote pour Les Républicains s'est effondré au premier tour de l'élection présidentielle 2022. Une donnée importante car 8 des 13 députés de Champagne-Ardenne ont été élus sous l'étiquette Les Républicains il y a cinq ans.

"En 2017, François Fillon faisait partie du trio. Il pouvait même assez fréquemment être en deuxième position. Là, on voit bien qu'Emmanuel Macron a pris une partie de ce vote républicain.  Ce sera une grande inconnue pour les élections législatives. Comment vont se comporter les électeurs ?", interroge Olivier Dupéron.

"Est-ce qu'ils reviendront vers des candidats qu'ils connaissent, qui sont le plus souvent au niveau local des candidats républicains. Est-ce que l'effet majorité présidentielle va jouer ?", indique-t-il. 

Depuis 2017, il y a eu du mouvement au sein des Républicains, avec des élus qui se sont rapprochés de la majorité présidentielle. C'est le cas par exemple de Lise Magnier, élue sous l'étiquette LR dans la quatrième circonscription de la Marne, et qui est aujourd'hui membre du parti Horizons, créé par l'ancien Premier ministre Édouard Philippe. 

Il y a aussi l'exemple de la première circonscription de la Marne, remportée il y a cinq ans par la LR Valérie Beauvais.  "La République en Marche avait fait le choix de ne pas envoyer de candidat, parce qu'on sentait bien qu'il y avait une volonté de ne pas entre guillemets agresser notamment Arnaud Robinet [le maire de Reims] dans cette circonscription, rappelle Olivier Dupéron. Cette fois-ci, si Valérie Beauvais est candidate pour Les Républicains, elle aura probablement face à elle un candidat clairement estampillé majorité présidentielle." Arnaud Robinet a lui-aussi rejoint Horizons.

Avec les mêmes noms au départ, on peut en réalité avoir des schémas politiques très différents.

Olivier Dupéron, politologue

"Là où vous aviez des candidats Les Républicains qui sont aujourd'hui des candidats majorité présidentielle, il peut apparaître en face d'autres candidats Les Républicains. Vers qui iront les électeurs ? C'est la campagne qui le déterminera", ajoute-t-il.

Beaucoup de questions restent donc encore en suspens. Surtout que les investitures sont loin d'être tranchées, avec par exemple des partis de gauche dont les états-majors disent vouloir s'entendre pour présenter des candidats communs.

"Il faut toujours avoir beaucoup de prudence quand on regarde les résultats d'un premier tour de présidentielle et qu'on essaie de reporter ça sur des législatives. Il y a vraiment beaucoup d'autres conditions qui entrent en ligne de compte et qui font que ça bouge les lignes assez fréquemment", insiste Olivier Dupéron.

Une élection à la fois nationale et locale

Les résultats des dernières élections ont renforcé la distinction entre vie politique nationale et vie politique locale, selon le politologue. "Aujourd'hui, le Rassemblement national, La France insoumise et La République en Marche dominent la vie politique nationale. Et ce sont trois partis qui ont des difficultés d'atterrissage local aux municipales, aux régionales ou aux départementales", indique-t-il.

Mais les élections législatives sont un savant mélange des deux, selon Olivier Dupéron. "C'est une élection qui reste nationale mais avec un ancrage local fort. Quelle est la part qui va l'emporter ? La dimension politique nationale ou l'ancrage local ? Ce sera une des inconnues".

Certaines personnalités implantées pourraient tirer leur épingle du jeu. On peut prendre l'exemple de Charles de Courson, élu avec l'étiquette UDI en 2017 et député de la 5e circonscription de la Marne depuis 1993. Il avait très largement dominé le candidat FN au second tour des législatives il y a cinq ans, avec plus de 71 % des voix. Les électeurs de sa circonscription ont pourtant placé Marine Le Pen en tête lors des deux tours de scrutin en 2017 et en 2022.

Des députés RN élus en Champagne-Ardenne ?

Malgré les scores importants de Marine Le Pen dans les circonscriptions de Champagne-Ardenne, le Rassemblement national n'a pour l'instant pas réussi à transformer l'essai lors des élections législatives en faisant élire des députés dans la région. 

"Quand on voit les scores de Marine Le Pen parfois à 40% parfois dans certaines circonscriptions, on se dit qu'on n'est vraiment pas très loin. Mais il y a une difficulté d'atterrissage, avec des candidats RN dans les circonscriptions qui manquent souvent de charisme, de crédibilité", indique Olivier Dupéron.

Est-ce qu'une circonscription pourrait cette fois-ci basculer entre les mains du RN ?  "Je resterai encore très prudent là-dessus", explique le politologue. Il y a cinq ans, le Front national était présent au second tour dans 6 des 13 circonscriptions de Champagne-Ardenne. Celui qui avait obtenu le meilleur score en Champagne-Ardenne était Baptiste Philippo, candidat dans la 3e circonscription de la Marne. Il avait obtenu le 18 juin 2017 40,4 % des voix, loin derrière Éric Girardin, élu avec l'étiquette de La République en Marche avec 59,6 %.

Le niveau de participation, donnée essentielle

Les élections législatives mobilisent habituellement bien moins les électeurs que l'élection présidentielle. Il y a cinq ans, le taux de participation au second tour des législatives plafonnait à  42,6 % au niveau national. 

"On a quand même l'impression que l'enjeu des législatives sera plus politisé cette fois-ci, pointe Olivier Dupéron. Il n'y aura pas l'effet découverte de La République en Marche  […] Il y a une politisation qui se fait dès maintenant autour des législatives et de ses enjeux, on le voit avec La France insoumise. Ça peut donner une mobilisation un peu plus forte pour les législatives en 2022."

En 2022, il y aura par ailleurs deux fois plus de temps entre l'élection présidentielle et les législatives qu'il y a cinq ans : 10 semaines contre 5 en 2017. "C'est une période qui va être très difficile à conduire pour l'exécutif. Face à ça, l'opposition un peu sonnée et déçue de l'élection présidentielle a le temps de se remobiliser et de reconstruire une campagne de manière un peu plus organisée que lorsque ça se fait en quelques semaines après une présidentielle."

"Quel est le camp qui saura le mieux mobiliser son électorat ? Il y a toujours un effet démobilisateur une fois la présidentielle passée. Mais il y a des familles politiques qui savent maintenir l'élan de la campagne, la mobilisation des militants et des électeurs."

Une première inconnue sera bientôt levée : celle des forces en présence. Les candidatures pour les élections législatives doivent être déposées en préfecture au plus tard le 20 mai 2022.

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