Jean-Luc Westphal a démarré sa carrière comme agriculteur à Weinbourg (Bas-Rhin) avant de laisser parler son esprit créatif pour multiplier les innovations en tout genre. Ses centrales solaires ont fait sensation dans le monde entier. Il ambitionne désormais de produire de l'armagnac haut de gamme.
Jean-Luc Westphal nous accueille dans le Gers, où l'a mené sa dernière aventure : un domaine viticole de 200 hectares, dont 50 de vignes, qu'il a acheté avec son frère Daniel en 2014, le domaine de Saint-Aubin. Il y passe une semaine sur deux, loin de sa ferme alsacienne.
Le cadre est magnifique. Au milieu de kilomètres de verdure se dresse le château de Saint-Aubin. Le Roi Henri IV d’Angleterre l'a fait construire pour son fils, Edward II, comme propriété de chasse au XIIIe siècle. Trois siècles plus tard, "La Chartreuse" devenait la propriété d'Henri de Navarre, futur roi de France Henri IV.
Une histoire qui a séduit les frères Westphal. "On a eu un vrai coup de cœur, on est tombés immédiatement amoureux de la région et de cet endroit qu’on trouve magnifique. C’est notre petit paradis", confie Jean-Luc. "On a une passion pour le vin depuis tout petits. On a toujours fait du schnaps, on avait l'habitude de le goûter avant d'aller à l'école quand on distillait avec notre grand-père. Il y a 20 ans, on a planté quelques hectares en Alsace. C'était notre rêve d'acheter un domaine un jour", se souvient Daniel, dont Jean-Luc est inséparable et qui vit une grande partie de l'année à Saint-Aubin avec sa femme Linda.On a eu un vrai coup de cœur. C’est notre petit paradis.
Ils ont construit un nouveau chai tout en pierres de taille, replanté les vignes et réorganisé le domaine. Des travaux menés autant que possible à la sueur de leur front, pendant trois ans. L'investissement total s'élève à près de dix millions d'euros.
Grandes idées, hautes ambitions
Leur ambition est à la hauteur du décor : ils veulent produire du vin et surtout de l'armagnac - la spécialité de la région - haut de gamme. Les premières bouteilles d'armagnac devraient d'ailleurs être commercialisées avant la fin de l'année. Jean-Luc Westphal est persuadé que le nectar peut faire un tabac à l'étranger : "Un vrai connaisseur préfère boire de l’armagnac plutôt que du cognac. Mais les grandes maisons de cognac sont des structures puissantes qui ont beaucoup investi pour promouvoir le cognac partout dans le monde. Nous avons beaucoup à faire pour faire à notre tour la promotion de l'armagnac.""On essaye de se démarquer de ce qui se fait déjà ici, du début à la fin", assure-t-il. Une fois le raisin pressé, le jus est mis en cuve de refroidissement pendant quelques jours pour que les déchets puissent être filtrés avant la fermentation. Une étape dont se passent la plupart de leurs collègues.On essaye de se démarquer de ce qui se fait déjà.
C'est pour cela que le nouveau vigneron tient à vendanger tous les jours dès deux ou trois heures du matin, en pleine nuit : "Le raisin doit être bien frais, c’est fondamental pour faire de la qualité. En journée, les températures atteignent 35 degrés. Quand les raisins chauffent, ils entrent en fermentation, nous voulons éviter cela."
Pionnier dans l'énergie solaire
Jean-Luc et Daniel Westphal ne font jamais les choses à moitié : à Weinbourg, ils se sont essayés à de nombreuses activités sur leur exploitation familiale. Production de choux-fleurs, élevage de veaux de boucherie puis de poules pondeuses... toujours en suivant la tendance du moment. Ils cultivent encore des céréales, en parallèle de leurs vignes dans le Gers.Mais c’est surtout pour le photovoltaïque que Jean-Luc Westphal s’est fait un nom. En 2008, il a fait construire la centrale photovoltaïque intégrée en toiture la plus grande au monde, dont il a lui-même dessiné les plans : cinq hangars de 36.000 mètres carrés et 27.500 panneaux solaires.
Une réalisation qui a fait sa renommée : Jean-Luc Westphal a alors fondé la société « Hanau Énergies Concept ». Il est devenu l'un des grands acteurs du solaire en France où il a installé plusieurs centaines de centrales dans tout le pays, mais il a aussi travaillé ailleurs dans le monde, et notamment en Iran (où ses réalisations demeurent, mais il a cédé tous ses actifs dans le pays depuis les sanctions imposées par le président américain Donal Trump et son administration contre l'Iran en 2018).
Un "énergiculteur" infatigable
"Je suis persuadé que l’énergie solaire va sauver notre planète car elle est bon marché et renouvelable, martèle celui qui en plus d'être agriculteur se définit comme un "énergiculteur". Le soleil ne cesse jamais de briller. Pour l’avenir, nous misons sur le solaire : nous voulons notamment transformer l’énergie solaire en hydrogène. Les voitures rouleront peut-être bientôt à l’hydrogène. C’est l’un de nos axes de réflexion."Jean-Luc Westphal est infatigable, ses nuits se résument souvent à quelques heures de sommeil seulement. Le temps de recharger un peu ses batteries avant de repartir de l'avant. "On a parfois du mal à le suivre. Il a une idée à la seconde et il se projette vite très loin, tandis que nous sommes encore en train d’essayer de comprendre où il veut en venir et ce qu’il souhaite vraiment", sourit sa conjointe Caroline Fischer, également responsable administrative et commerciale du groupe Hanau.On a parfois du mal à le suivre. Il a une idée à la seconde.
"C'est monsieur 100.000 volts, complète Patrice Couturier, directeur financier du groupe. Il n'hésite pas à s'impliquer personnellement pour que les choses aillent vite et il sait trouver les mots. Par exemple avec un fournisseur, quand nous n'arrivons pas à obtenir le matériel dont nous avons besoin. Il me dit "Patrice, donne-moi le téléphone". Et il commence toujours par "Bon alors, je vous explique comment ça va se passer". Et en général, en face, ça répond rapidement. Mais il est en même temps quelqu'un de très humain, de très bon. Daniel et lui, ce sont des gens de la terre".
Jean-Luc Westphal est à la tête de 40 filiales. À 54 ans, il tient déjà à transmettre ses valeurs de "travail" et d'"humilité" à ses enfants et ses nièces pour qu'ils poursuivent la route démarrée avec son frère. Toute la famille est d'ailleurs mobilisée dans le Gers. La saga Westphal continue plus que jamais d'écrire son histoire.