Municipales 2020 : qui est Eric Straumann, le nouveau maire de Colmar

La liste menée par le député Eric Straumann est arrivée en tête ce dimanche 28 juin. Le candidat LR l'emporte  face au candidat écologiste Frédéric Hilbert. Une victoire en l'absence du maire sortant Gilbert Meyer qui avait renoncé à se maintenir au second tour.

Eric Straumann n’aura pas eu le plaisir de battre son meilleur ennemi. Gilbert Meyer lui a fait faux bond à l’entre-deux tours, excédé par l’attitude de ses colistiers divisés. Il a préféré jeter l’éponge. Pourtant Eric Straumann aurait sûrement savouré autrement sa victoire si le maire sortant de Colmar était allé au bout de sa candidature. Car les deux hommes s’affrontent depuis 15 ans sur le territoire colmarien. Une rivalité au sein de la même famille politique. Une rivalité de personnes. De cadors. Gilbert Meyer défendant son fief. Eric Straumann avançant à pas de loup avant d’attraper vivement  sa proie. Aux législatives d’abord. En 2007 il ravit à Gilbert Meyer son poste de député. « Meyer ne le lui a jamais pardonné » affirme Christian Klinger qui a succédé à Eric Straumann à la mairie de Houssen. « Eric Straumann est entré par effraction. Les législatives pour lui c’était le Graal. Il a progressé très vite en politique et il y a pris goût. Maire, conseiller général puis député, c’était une suite logique. » Cette fois Eric Straumann s’installe dans le fauteuil de maire de Gilbert Meyer. Après 4 mandats de règne sans partage.

Le duel des frères ennemis

La succession se fait dans la douleur. « Les deux hommes ne se parlaient pas beaucoup. Ils se croisaient sur des événements officiels. Vous savez un fauteuil pour deux ça n’existe pas. Imaginer une transmission n’était pas envisageable », précise Christian Klinger. Gilbert Meyer, affaibli physiquement et hors course, a pourtant en dernier recours apporté son soutien à Eric Straumann avant le second tour. Un acte de bravoure ? Sur l’antenne de France 3 Alsace Eric Straumann a commenté ce soutien très sobrement : « Il m’a beaucoup combattu ces dernières années mais il est vrai qu’il a su placer l’intérêt de Colmar et l’avenir de la ville au-dessus d’un ressentiment personnel qu’il aurait pu avoir à mon égard. Il a pris de la hauteur »

Eric Straumann, patron des LR du Haut-Rhin, est un homme à qui tout semble réussir. Et il vient de gagner là une nouvelle bataille. « Il a un sens politique inné, il fonctionne à l’instinct », confie Brigitte Klinkert, présidente du Conseil départemental du Haut-Rhin. Elle lui doit ce poste. « Il voit l’avenir. Il a une vision. Je n’ai rencontré personne d’autre comme lui. » Christian Klinger renchérit : « C’est un joueur d’échecs. Il a toujours un coup d’avance. » Considère-t-il la politique comme un jeu? « Je ne sais pas… mais en tout cas ça lui plait. C’est un mordu. Et puis c’est un caméléon, il est bon partout. »

Vous savez un fauteuil pour deux ça n’existe pas

Christian Klinger

L'homme à qui tout réussit

Le nouveau maire de Colmar est un habitué des scores élogieux. Réélu conseiller général en 2011 avec 75,8 % des suffrages. Réélu conseiller en 2015 avec 71,45 % des voix. L’agrégé d’économie et de gestion est un stratège confirmé en politique. Aux dernières législatives le parti qu’il pilote dans le Haut-Rhin avait emporté 4 des 6 sièges de députés du département. Belle résistance face à la vague LREM. Un homme sûr de lui ? C’est l’image qu’il donne. La carrure solide. De la trempe qu’on n’ébranle pas. « Il a quand même des doutes », nuance Brigitte Klinkert qui est aussi sa suppléante à l’assemblée nationale. « Il ne les exprime jamais en public mais c’est important pour moi qu’il ait cette qualité de ne pas toujours tout savoir d’emblée. Avoir des doutes cela oblige à travailler. Et puis c’est un élu qui a une parole. On peut compter sur lui. C’est pas si courant ». Des qualités humaines qu’on ne lui devine pas forcément. Christian Klinger est pourtant formel : « Travailler avec lui est plaisant. Il n’y a pas de relation de chef à subordonné. Quand il fait confiance, il délègue. Une vraie délégation, large. Et puis il donne le feu vert final. »

Avec l’élection d’Éric Straumann une petite révolution se joue Colmar. Gilbert Meyer était connu pour son autoritarisme et sa volonté de tout diriger, tout maîtriser. Le nouveau maire et son équipe vont désormais écrire une nouvelle page de l’histoire de la préfecture du Haut-Rhin. « C’est une chance pour Colmar », affirme Brigitte Klinkert. « A Colmar on sent que ça se détend déjà, et pas qu’à la mairie. Il y avait une chape de plomb sur la ville. C’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour Colmar et les Colmariens.» Il est quasi certain qu’une législative partielle se tiendra dans les prochaines semaines. Eric Straumann, élu maire, doit renoncer à son poste de député. Sa suppléante Brigitte Klinkert, engagée dans la création de la Communauté européenne d’Alsace (CEA) ne le remplacera pas. Et c’est Eric Straumann, en chef du parti, qui désignera stratégiquement son potentiel successeur à l’Assemblée nationale.

En octobre 2013, Eric Straumann s'illustre, lors d'un débat nocturne sur les retraites, par sa participation à une bronca faite de caquètements jugés particulièrement sexistes à l'endroit de la députée écologiste de la Vienne Véronique Massonneau, comme vous pouvez le constater sur la vidéo ci-dessous.

Le nouvel élu colmarien fait donc chemin arrière. Retour à l’échelle de la commune. « Je pense que deux mandats de député ça lui a plu mais il a ce syndrome des gens actifs qui veulent revenir sur le terrain. Et puis il a le contact facile et sincère», explique Christian Klinger. « C’est un homme proche des gens », complète Brigitte Klinkert. Un homme cependant discret sur sa vie privée. Marié, père de trois enfants. C’est parait-il un bon vivant. « Oh oui c’est un jovial ! » assure Christian Klinger, « il a un bon coup de fourchette et avec lui les repas se terminent toujours par de bonnes blagues. Bon, des blagues de fin de repas, vous voyez ce que je veux dire ? » De bonnes blagues comme celle qui l’a fait rire à l’Assemblée Nationale, le jour où un de ses collègues a imité le bruit de la poule pendant l’intervention d’une députée écologiste ?  « Un effet de groupe sûrement… » tempère, un peu gêné, son fidèle allié.