La chambre commerciale du tribunal de Mulhouse a rendu ce jeudi 28 septembre sa décision sur l'avenir du groupe Pierre Schmitt, spécialisé dans la filière industrielle textile dans le Haut-Rhin : deux de ses entreprises sont liquidées, la troisième devient une Scop, portée par les salariés. Pierre Schmitt annonce faire appel.
Les 145 salariés du groupe Pierre Schmitt, basé à Saint-Amarin et Hirsingue, dans le Haut-Rhin, attendaient depuis le 2 juin, et le placement en redressement judicaire de leur entreprise, de quoi serait fait leur avenir. La chambre commerciale du tribunal de Mulhouse a rendu sa décision ce jeudi 28 septembre : le groupe, constitué de trois entreprises, va disparaître, et seule Velcorex, spécialisée dans le prêt-à-porter et l'annoblissement de tissu, va perdurer, sous la forme d'une Scop (société coopérative de production), portée donc par les salariés eux-mêmes.
Ce projet, porté par 52 salariés, devrait donc permettre de sauver une partie des 85 emplois du site de la vallée de la Thur, tandis que les deux autres entreprises du groupe vont disparaître : la liquidation judiciaire de Philéa, dans le secteur du luxe, et d'Emanuel Lang, dans la filature du lin, devrait être actée le 18 octobre 2023. Ces deux entreprises, basées à Hirsingue, emploient une soixantaine de personnes.
Aussitôt la décision rendue, le PDG du groupe, Pierre Schmitt, a annoncé faire appel, avec demande de sursis à exécution, afin de bloquer la constitution de la Scop Velcorex et la liquidation de Philéa et Emanuel Lang. "C'est un gâchis total. On sacrifie toute une filière au profit d'une société (Velcorex) qui ne pourra agir que sur un tout petit périmètre, estime le chef d'entreprise. Pour moi, c'est un rétro-pédalage : avec ces 3 entreprises, on maîtrisait toute une filière".
Pierre Schmitt avait déjà demandé, le 13 septembre dernier, un délai de deux semaines que la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Mulhouse lui avait accordé pour obtenir les financements nécessaires à la survie du groupe dont il est le PDG. À la suite de difficultés de trésorerie, une procédure de redressement judiciaire avait été ouverte le 2 juin, à l'égard des trois entreprises du groupe basées dans le Haut-Rhin : Velcorex à Saint-Amarin, Emanuel Lang et Philéa à Hirsingue. Sous la houlette de Pierre Schmitt, toute une filière industrielle textile s'était reconstituée en Alsace grâce à ces trois entreprises.
40 millions d'euros à réunir
Entre redressement avec apport de nouveaux capitaux, cession ou liquidation, trois possibilités se présentaient quant à l'avenir du groupe, sur lequel le tribunal de Mulhouse devait se prononcer. S'agissant d'une possible reprise, le principal candidat, Big Investment, a retiré son offre la semaine dernière. Cette société de fonds d’investissement, basée en Suisse, annonçait pouvoir injecter 15 millions d’euros. Il s’est avéré que le porteur du projet, en plus de son incapacité à réunir les fonds annoncés, avait été interdit de gestion d’entreprise à la suite d’une condamnation pénale.
Ne restait plus donc potentiellement que le projet de reprise de Velcorex par ses salariés, passant par la création d'une Scop. Les salariés étaient dans l'attente d'une réponse rapide. "L’état d’esprit est catastrophique, on a réuni tout le personnel hier. Il y a des gens qui ne dorment plus, tout le monde est stressé. L’objectif est d’avoir une réponse, que ce soit pour une liquidation, une scop ou que ce soit une continuité de M. Schmitt s’il a 40 millions. Il faut qu’il décide aujourd’hui parce que, nous, on ne pourra pas continuer dans ces conditions", déclarait Jean-Jacques Kubler, représentant CFE CGC Velcorex, à notre équipe.
Entre l'option Big Investment et la Scop, Pierre Schmitt en défendait une troisième : celle de pouvoir réunir les capitaux nécessaires pour sauver son groupe. Il a utilisé les deux semaines de sursis accordé le 13 septembre pour poursuivre sa quête de fonds et annonçait être sur le point de réunir 40 millions d'euros grâce à un emprunt réalisé au Koweït via un établissement basé en Europe. En faisant appel de la décision du tribunal de Mulhouse, il espère encore obtenir du temps. Sa volonté de maintenir une filière textile industrielle dans le Haut-Rhin reste intacte.