L’association Alsace Nature a annoncé vouloir porter plainte contre X au cours d’une conférence de presse tenue devant le site de Stocamine à Wittelsheim, dans le Haut-Rhin. L'objectif est de pouvoir faire l'inventaire exhaustif de ce qui stocké avant qu'il ne soit trop tard.
Les déchets dangereux stockés sur le site de Stocamine, une ancienne mine de potasse située à Wittelsheim dans le Haut-Rhin, ne seront pas extraits. Ainsi en a décidé Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, le 18 janvier 2021. Stocamine conservera les 42.000 tonnes de déchets dangereux qui y sont stockées à 550 mètres de profondeur depuis 1999. Les déchets industriels dangereux encore enfouis dans le site vont être confinés définitivement (voir la localisation sur la carte ci-dessous).
L'association Alsace Nature, sur la base de témoignages relayées par la presse, dit avoir des doutes sur la nature exacte de certains déchets enfouis. Avant qu'il ne soit trop tard, l'association veut faire toute la lumière sur ce qui est vraiment stocké. C'est du moins ce que son avocat, François Zind, a annoncé au cours d'une conférence de presse devant le site de Stocamine. Nous lui avons posé quatre questions.
Pourquoi déposer une plainte concernant Stocamine ?
Il s'agit d'une plainte pénale contre X - tous les acteurs impliqués ne sont pas encore connus - pour informations inexactes sur la nature et la quantité des déchets entreposés depuis 1997. Maintenant qu’on a des pôles régionaux environnementaux spécialisés, créés par la loi du 24 décembre 2020, ce sera soit auprès du tribunal judiciaire de Strasbourg, compétents pour les infractions à la loi sur l’eau, soit celui de Nancy pour celles des déchets.
Je suis en train de peaufiner quelques considérations techniques pour déposer la plainte en début de semaine prochaine.
Quels sont les éléments dont vous disposez ?
Le point de départ date de 2017. Des éléments posaient déjà question, notamment sur le caractère complet de l’inventaire des déchets. Ce qui a été vraiment révélateur ce sont des articles de presse parus dans Reporterre, Rue 89 Strasbourg et la Badische Zeitung (voir la publication d'Alsace Nature sur leur page facebook ci-dessous). Ces organes de presse ont relaté des témoignages directs oculaires, à la fois pendant la période de stockage, de 1997 jusqu’à l’incendie de 2002 puis pendant la période de déstockage.
Ces témoignages ne correspondent pas du tout à ce qui est affiché. Ils révèlent notamment la présence de déchets médicaux et arseniques. Cela fait écho à ce que j’ai déjà pu voir dans le dossier. On a là matière à déposer plainte, l’objectif étant d’avoir un inventaire vraiment exhaustif, complet et objectif de ce qui stocké en-dessous.
Qu’est-ce que cela doit déclencher ?
Le parquet a la possibilité de poursuivre ou pas. Ils peuvent classer sans suite, auquel cas on se constituerait partie civile. Là, on a suffisamment de matière pour que le juge d’instruction se saisisse du dossier. Le but est de faire un éclairage complet sur ce qui est stocké. Si les déclarations sont conformes, au moins le public sera informé sur la nature exacte des déchets, mais en faisant le deuil, pour les générations futures, de 42.000 tonnes de déchets toxiques stockés sous terre.
Si cela révèle qu’il y a bien autre chose que ce qui a été déclaré, là il faudra voir ce que la justice peut engager contre les producteurs de déchets.
Pourquoi l’annoncer à la veille du deuxième tour des élections ?
Les MDPA ont annoncé qu’ils allaient commencer sous peu à couler le béton [béton devant servir à la construction d'un bouchon isolant les galeries de la nappe phréatique, NDLR]. Une fois que le béton est coulé, c’est fini, on aura plus accès aux galeries. Ce que je ne voudrais pas c’est qu’ils organisent l’enfouissement définitif et que finalement on ne saura jamais ce qui est enfoui. D’autre part, on a peu de possibilité avant la période estivale où il y a une sorte d’inertie générale d’accès à l’information pour le public.
Pour nous, c’était important de le faire à cette date. Au niveau départemental et régional, l’ensemble des élus sont contre le projet donc, finalement, on est sur une problématique d’intérêt général.
François Zind précise que les peines encourues par les personnes à l'origine de fausses informations peuvent aller jusqu'à sept ans d'emprisonnement et 750.00 euros d'amende.