L’association Cœur paysan, qui regroupe une quarantaine de producteurs alsaciens, s’offre un deuxième magasin. Après Colmar en 2016, c’est au tour de Mulhouse, sept ans plus tard, de proposer à la vente des produits frais et de saison, directement du producteur au consommateur.
A la veille de l’ouverture de ses portes aux premiers clients mulhousiens, le mercredi 3 mai, l’heure est aux derniers préparatifs dans le magasin flambant neuf de Cœur paysan. Asperges, oignons, radis, navets et autres produits frais de saison, tout doit trouver sa place. Au bon rayon. Et harmonieusement, si possible.
"C’est tout beau tout neuf, on va essayer de faire ça joliment". Le livreur de la charcuterie de gibier Nemrod, Frédéric Jordan, met du cœur à l’ouvrage face aux étals encore vides du magasin. Dans ses cartons, dix sortes de terrines, sanglier, cerf, chevreuil et autant de bocaux avec de nouvelles recettes. "Bolognaise, chili con carne, et moins traditionnelles, des tajines. C’est important de se diversifier".
Le magasin, implanté rue de Bâle à Mulhouse, va permettre à la charcuterie ainsi qu’à une quarantaine de producteurs locaux d’élargir leur clientèle et de gagner en visibilité. Important aussi.
45 fermes en vente directe
Parmi eux, le maraîcher de Sélestat, Denis Digel. Le président de Cœur paysan a ouvert le magasin de producteurs locaux à Colmar, fin 2016. Le premier du genre. Le succès a été immédiat. "Ça répondait à une attente, on espère que ce sera le cas à Mulhouse. Regrouper une quarantaine de producteurs au même endroit en vente directe, c’est nouveau ici". Un nouveau départ, une nouvelle aventure humaine, une entreprise commerciale motivante, il n’en fallait pas plus à Denis Digel pour se lancer. "On espère avoir les clients pour faire tourner le magasin et leur proposer nos produits".
Ange Loing, producteur laitier à Lapoutroie et partie prenante de l’aventure, est confiant. Comme plus des deux tiers des producteurs déjà présents à Colmar, il va lui aussi vendre ses produits à Mulhouse. "L’objectif est de capter tous les gens qui ont envie de connaître l’origine de leur alimentation, de manger sainement et de faire découvrir à nos clients nos produits le plus localement possible. A Mulhouse, ça nous donnait envie d’y aller car le concept n’existait pas encore".
Et les résultats seront là, il n’en doute pas. Satisfaire la clientèle potentielle, c’est rentable. L’exemple de Colmar, où le chiffre d’affaires a plus que doublé en quatre ans, l’a démontré. "A Mulhouse, on mise sur au moins trois millions de chiffres d’affaires", veut bien lâcher Ange Loing, prudent malgré tout. La clientèle a évolué dans ses habitudes, mais les projections tablent raisonnablement sur environ 1500 clients par semaine pour un panier moyen de 35 euros.
Jusque là, l’expérience a plutôt réussi à ceux qui ont adhéré au concept de Cœur paysan. Pour la plupart des producteurs, cela s’est traduit par la création d’emplois dans leur exploitation. Dans sa ferme, Ange Loing a pu ainsi embaucher six salariés.
Les clés du succès
Seul contre-exemple, celui de Sochaux où le concept importé en 2021 n’a pas eu le succès escompté. "Sans le contact direct avec le consommateur, ça ne peut pas marcher. Le magasin Cœur paysan se conjugue à la première personne : c’est mon magasin, je dois le faire marcher et amener mes légumes frais auprès des clients du secteur", avance Denis Digel pour tenter d'expliquer l'échec de Sochaux. Les consommateurs n'y auraient pas rencontré les producteurs. Et vice versa. "On est là pour répondre à leurs questions", martèle le président de l'association de producteurs.
Aux côtés des huit salariés dévolus à la vente, au moins un producteur par jour sera présent dans le magasin pour faire le lien avec les consommateurs.
Autre clé du succès : l'organisation structurelle de l'association. Tous les producteurs sont aussi actionnaires du magasin. "Cela incite les producteurs à participer à la vie du magasin", explique Ange Loing.
Petit détail important : l'entrée du magasin est signalée par une carotte géante parée de 20.000 pièces de mosaïque. Difficile de la louper. "Elle symbolise les pieds dans la terre et la tête dans les étoiles, c’est comme un lien entre le monde paysan et celui des artistes", expliquait son créateur Didier Stein lors de son installation quelques jours avant l'ouverture du magasin.
Le magasin Cœur paysan de Mulhouse sera ouvert du mardi au samedi, de 9 à 19 heures.