Il n'est pas encore majeur et se rêve déjà docteur en intelligence artificielle. Théo Gachet, 17 ans, élève au lycée Charles De Gaulle, vient d'obtenir son bac à Chaumont, avec une moyenne générale de 20,60/20. Rencontre avec un futur docteur en intelligence artificielle.
Sa voix est assurée. Ce jeune bachelier a de quoi. Il a obtenu 20/20 en 2020. Une mention très (très, très) bien, qu'il reçoit avec le calme de ceux qui connaissent leurs ressources intellectuelles, mais sans forfanterie. "Cette année, je viens d’obtenir mon Bac S à Charles de Gaulle avec une moyenne de 20,60 ! Je vous propose donc un entretien afin d’échanger", a -t-il écrit sobrement à la rédaction de France 3 Champagne-Ardenne. Qu'à cela ne tienne, le jeune homme répond à tout, avec assurance.
Né il y a un peu plus de 17 ans, le 3 octobre 2002, à Chaumont en Haute-Marne, Théo Gachet a été collégien à La Rochotte, puis il est entré au lycée polyvalent Charles de Gaulle de Chaumont. Son parcours dans le secondaire a donc pris fin avec les résultats du bac, le 7 juillet : 20,60 de moyenne en terminale. Avec la crise sanitaire, certes, il n'a pas passé l'examen, ce rite de passage vers les études supérieures, mais il est désormais bachelier avec des notes qui donnent le tournis. 20 en maths, 20 en philo, 19 en Histoire et en sport. Même si les réusssites sont plus nombreuses en cette année particulière, dans l'académie de Reims comme partout en France. Le résultat est sans bavure.
"Cette réussite n’est pas vraiment une surprise, avoue le Chaumontais, avec le contrôle continu cette année. J’avais eu 18 à l’écrit et 19 l’oral en Français, en TPE j’ai obtenu 20/20, il s'agit de travaux pratiques encadrés. Je n'avais pas accès aux détails des autres résultats. Donc j'ignorais ma moyenne générale jusqu'à hier. Je suis content, je m’attendais à avoir une note élevée, mais j’ai été surpris d'obtenir 20,60". Le travail a donc porté ses fruits, dit-il sans trop y croire. Car justement, il affirme ne pas trop travailler, au sens scolaire du terme. "Je comprend très vite, je n’ai pas besoin d’apprendre par coeur, raconte-t-il simplement. Je lis des livres qui m’intéressent, et étant en section européenne, j’avais des cours scientifiques en anglais".
"Il s'est mobilisé pendant le confinement"
La proviseure adjointe du lycée De Gaulle n'a pas de mot suffisants pour qualifier le travail et l'attitude de Théo. Même si elle a eu d’autres élèves presque aussi excellents. "C’est un pur esprit scientifique et il collabore avec ses camarades de classes, pendant le confinement il a participé et donné des solutions informatiques aux autres pour avancer. Pour les classes virtuelles, il s’est mobilisé. Il est impressionnant, confirme Sandrine Doyon. Les enseignants sont unanimes, mais il n’est pas le seul. Il y a eu des mentions TB avec des moyennes très hautes".
Elle ne cache pas sa fierté. Ce résultat rejaillit forcément sur le lycée et son aura. "Je lui ai donné un avis parcoursup, d'excellence, il est remarquable, à l'écrit comme à l'oral". Loin des clichés du génie solitaire. Théo cherche toujours à approfondir, et à progresser. Autonome et apprécié de tous pour l’aide qu’il apporte aux autres. "20,60, c’est le cumul des options. Il est excellent partout. Il a aussi beaucoup travaillé. Ses profs le distinguaient déjà, son professeur de maths ne tarit pas d’éloges. Et modeste avec ça. En plus c’est un bon camarade. Pas un intello qui travaille dans son coin. Il est en interaction avec ses professeurs. On a eu aussi Nathan Bourguignon qui a décroché une bourse Potter, pour les élèves défavorisés".
Alors, quel est donc le secret du lycée, pour obtenir de tels résultats ? "Ce sont des élèves avant tout travailleurs, entourés par des enseignants qui travaillent ensemble, avec une très bonne ambiance. Souvent, (hors covid) des élèves sont invités chez un enseignant pour un barbecue. On essaye de créer des ambiances. Une équipe stable. Avec un ADN scientifique". Le lycée ressemble à un campus. Pendant le confinement, toutes les classes ont bénéficié de séances virtuelles à des créneaux horaires réguliers et identifiés. L’emploi du temps a été modifié pour ça. Selon la proviseure, "la plupart étaient déçus de ne pas passer le bac. C’est un rite de passage. Et il n’y a pas eu la liesse des résultats. Il savaient à quoi s’attendre".
Passionné par l'intelligence artificielle
Théo lit de tout. Des biographies, de la philosophie, des livres de sciences et même des publications scientifiques, en anglais, bien entendu. Alors que ses congénères sont accros à leurs smartphones. "Ma famille n’est pas spécialement connue pour être scolaire ni surdiplômée. Mon père a réagit avec fierté, à l'annonce des résultats. Il s’en doutait, mais il est vraiment très fier. Il m’a dit bravo, mais on n’a pas encore fêté ça, explique-t-il au lendemain de l'annonce. Mais ça va rester une formalité". Sur son vaste bureau noir et impeccablement rangé, on distingue une biographie de Steve Jobs, le fondateur d'Apple, ou encore un livre de Michio Kaku, un physicien théoricien et futurologue américain. Derrière lui, un autre bureau dédié à ses loisirs, un écran de jeux vidéos et imprimante 3D. Je viens d'être admis au camp d'été de l'École @Polytechnique et de @TelecomParis_ ! Hâte d'assister aux cours de mathématiques, physique et méthodologie encadrés par les étudiants ! ? https://t.co/srgSbA20K3
— Theo Gachet ➐ (@theo_gachet) July 3, 2020
L’année scolaire prochaine, en septembre 2020, Théo a été admis en prépa au lycée St Louis en MPSI (maths, physique, sciences de l'ingénieur) à Paris. L’une des meilleures prépas de France. Ensuite, il aimerait intégrer l'école Polytechnique ou Normale sup ou bien encore Centrale Paris. L'élite. Pour suivre ensuite un doctorat aux Etats-Unis. Car le jeune homme sait parfaitement où il va. Son rêve est de devenir docteur en intelligence artificielle. "C’est un domaine qui va exploser prochainement. Elle est juste une nouvelle façon de concevoir les données, la bulle internet l’a montrée. Dans le domaine de la médecine, une intelligence artificielle a des meilleurs résultats que les meilleurs radiologues ou neurologues".
Est-il conscient de vouloir travailler à améliorer le savoir informatique, au détriment de certains métiers réalisés par des humains ? "Non, pour moi cela ne nuit pas aux savoirs humains, cela reste une suite de codes".
L'intelligence artificielle ne réfléchit pas par elle même, si on ne la programme pas pour détruire l’humanité ou le savoir humain, elle ne le fera pas.
"On a une vision apocalyptique de cette IA, poursuit le bachelier. Certains entrepreneurs américains comme Elon Musk ou Mark Zuckerberg (président directeur général et fondateur de Facebook) disent qu’il ne faut pas en avoir peur, il faut juste s’y préparer". Ces deux figures américaines, aujourd'hui pourtant souvent contestées, restent pour lui des modèles du genre.
Les parents du jeune homme se disent très fiers de son parcours et de ses résultats, "On s'y attendait et on est sûr que notre fils va accomplir de grandes choses dans le futur". Plus jeune, il aimait déjà les jeux de construction et de logique, "c'est sûrement de ça que je tiens mon raisonnement mathématique, analyse-t-il. Je lisais beaucoup de science-fiction, notamment les livres de Michio Kaku. Je lis également aujourd'hui de la philosophie, des biographies (Steve Jobs, Bill Gates ou Elon Musk) mais également des livres d'auteurs plus contemporains (Stephen Hawking, Yuval Noah Harari ou Peter Thiel)". Ils ajoutent que leur fils a toujours été très ambitieux, sans avoir peur de l'échec.
Je considère l'échec comme une façon de recommencer de manière plus intelligente.
Un parcours sans faute. "Lorsque j'étais jeune, j'ai toujours rêvé de la Silicon Valley et je compte bien, après mes études, commencer un doctorat aux États-Unis et probablement y travailler, car c'est le cœur névralgique de l'innovation". Et cela sans oublier de maintenir la forme physique. Ses parents l'ont toujours encouragé à pratiquer du sport." J'ai fait du judo au grade de quatrième Kyu, ainsi que de la natation. J'ai aussi fait quatre années de tennis et je suis aujourd'hui l'attaquant (au poste de central) de l'équipe régionale du CVB52 , je pratique le volley depuis environ six ans. "
Bac au rabais ?
Puisque Théo répond du tac-au-tac, on n'a pas pu s'empêcher de lui poser la question du bac version 2020, teintée de coronavirus. "Bac au rabais" pour certains, puisque sans épreuve finales. "Je leur répondrais qu'ils se trompent et que c'est même tout l'inverse, lance le futur étudiant. Habituellement, les notes obtenues au bac dépendent, certes, du travail de l'élève, mais également du sujet qui est donné. Si un élève a fait une impasse sur un chapitre en particulier ou qu'il n'est pas inspiré par le sujet, il va obtenir une note plus faible que celle qu'il mérite".Poursuivant son analyse de cette édition sans examen sur table à la fin de l'année, sans stress de l'affichage sur le panneau, ou de l'attente de la note sur Internet, Théo se réjouit que "grâce au Covid, le contrôle continu a été mis en place et c'est une bonne nouvelle, ça récompense les élèves qui ont travaillé dur tout au long de l'année et reflète leur véritable niveau scolaire, qui est au final ce qu'on cherche à évaluer. Le contrôle continu de cette année est une bonne chose qui pourrait encore être améliorée dans les années à venir, notamment pour garantir une égalité des chances entre les candidats de classes et lycées différente ainsi qu'une réelle revalorisation du Baccalauréat qui, ce n'est que mon opinion, perd de la valeur chaque année".
En général, les amis de Théo, le prennent pour un extra-terrestre et le comparent à Elon Musk. Il se dit juste passionné et curieux. Son conseil à ceux qui n’y arrivent pas à l'école : essayer de trouver son centre d’intérêt et se lancer là-dedans. Pour envisager le futur. "Pas grave si ils ne sont pas satisfaits par le système actuellement". Pendant les vacances, ce bachelier va travailler. "Je vais faire un camp d’été scientifique de l'école Polytechnique, on est 40 sélectionnés en France. A cause du covid, ce sera à distance. Pour aborder sereinement la rentrée". Un cursus de deux semaines intensives pour se préparer. L’école a choisi les plus méritants de France. Théo Gachet vise loin. Son parcours de la Haute-Marne à la Silicon Valley semble déjà une probabilité plus que certaine. Quant au lycée De Gaulle de Chaumont, l'établissement enchaîne les bons résultats. En 2019, Joséphine Joffrin, une lycéenne, avait obtenu 19,85/20 de moyenne au bac.