Accessible sur le site de la préfecture de Haute-Marne, le rapport des commissaires enquêteurs sur le projet de blanchisserie nucléaire Unitech à Suzannecourt rendu le 30 janvier 2020 crée la polémique.
"A l’unanimité, la Commission d’enquête émet un avis favorable au projet de demande de réalisation et exploitation d’une blanchisserie industrielle destinée au secteur nucléaire sur le territoire de la commune de Suzannecourt assorti des réserves et recommandations", voilà la conclusion du rapport transmis le 30 janvier dernier par les trois commissaires enquêteurs ayant mené l’enquête publique à Suzannecourt et dans les communes alentours.Les commissaires enquêteurs ont toutefois émis huit réserves :
- les captages et la nappe phréatique
- la ressource en eau
- les rejets aqueux
- les rejets atmosphériques
- la sédimentation
- les risques accidentels de pollution par incendie
- l’activité de maintenance
- les avis des services de l’Etat auxquels Unitech devra se plier
Ce nombre de réserves émises par les commissaires enquêteurs fait tirer la sonnette d’alarme par les associations environnementales et antinucléaires mobilisées contre le projet depuis sa création. "Qu’il s’agisse des associations ou de la population que nous représentons nous ne comprenons pas comment un avis favorable a-t-il pu être rendu par les commissaires enquêteurs au vu du nombre négatifs que nous avons pu constater quand nous nous sommes déplacés lors de leur permanence ou sur le site internet de la préfecture consacrée à l’enquête. Nous n’avons jamais vu en France une telle mobilisation dans des petits villages et villes pour une enquête publique. Nous avons été exactement 712 à donner notre avis, à 90 % négatif d’après nos calculs !" S'insurge Michèle Labouille, de l’association Belles Forêts sur Marne.
Nous déposerons un recours si l'avis de la préfecture est lui aussi favorable !
Michèle Labouille, association Belles Forêts sur Marne
Maintenant que le rapport a été rendu à la préfecture, les associations attendent la décision de la préfète qui n’a pas souhaiter nous répondre. Cette dernière rendra sa décision suite à la réunion avec le Coderst, la commission environnementale départementale composée d’élus et d’experts du développement durable, qui aura lieu début mars. "Nous ne nous faisons pas d’illusion sur le futur avis de la préfecture. Nous avons déjà commencé à nous réunir avec des riverains qui ne veulent pas d’une cheminée de 15 mètres de haut qui rejettera des particules métalliques dans leur jardin pour entamer une procédure si la décision est positive. Après la décision, nous avons quatre mois pour poser un recours au tribunal administratif, ce que nous ne manquerons pas de faire si besoin" affirme Michèle Labouille.
Un recours attendu par Unitech
Un recours auquel s’attend Jacques Grisot, directeur général d’Unitech : "L’avis favorable est une étape supplémentaire dans l’avancement de notre projet, mais nous savons qu’il va être difficile à mettre en œuvre, même si l’avis de la préfecture est favorable. Les associations opposées à notre blanchisserie nucléaire n’ont jamais accepté la main tendue, les invitations aux réunions d’informations que nous leur avons envoyées, ils restent campés sur leur position. J’aimerais pour les rassurer sur mes attentions, mais le dialogue étant inexistant, c’est extrêmement difficile. Je ne suis pas là pour mener une guerre, je respecte la loi, j’entends les recommandations des services publics comme la MRAE pour améliorer mon projet selon leur directive. Je ne suis pas là pour polluer, mais pour permettre également la création d’emploi dans un bassin qui a grand besoin. Industriel ne signifie pas pollueur !"
Le directeur général d’Unitech se dit encore ouvert au dialogue bien qu’il se dise « choqué » du comportement qu’auraient eu certains opposants au projet de blanchisserie nucléaire lors de l’enquête publique : "Les personnes qui se sont déplacées ou ont écrit des avis favorables m’ont dit avoir reçues des menaces et des insultes. Comment voulez-vous que les personnes favorables à ce projet, s’expriment en toute sérénité ou donnent leur opinion avec ça. L’enquête publique n’était pas révélatrice du réel nombre d’avis favorables à mon sens."
Concernant la question des menaces et des insultes aux personnes ayant prononcé un avis favorable, les opposants au projet et notamment Michèle Labouille de l’association Belle Forêt sur Marne affirment ne pas être au courant : "la population contre ce projet se sent acculée depuis le début, et cet état d’esprit peut provoquer des mouvements d’humeurs sur lesquels nous n’avons en tant qu’associations aucune maitrise."
Le Coderst rendra son avis, seulement consultatif, mais pas décisionnaire courant mars, après ça, ce sera à la préfecture de Haute-Marne de rendre sa décision finale.