Haute-Marne : à Langres, une boulangerie "trop bruyante" doit fermer ses portes

D'un côté, un voisin qui se plaint du bruit provenant d'une boulangerie, de l'autre la justice qui tranche. D'ici février 2020, Eric Gallien devra baisser le rideau de sa boulangerie à Langres en Haute-Marne. Quinze personnes devraient se retrouver sans travail. 

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"Je suis dégoûté, c'est une affaire familiale qui a 56 ans d'existence : Eric Gallien, boulanger". C'est en ces termes qu'Eric Gallien s'adresse à nous, alors que les galettes des rois pour l'épiphanie sont en train d'être préparées. Dépité, au terme de plusieurs années de procédure. Depuis 2012 précisément. Une plainte avait alors été déposée pour nuisances sonores. La justice a donné tort à ce boulanger de Langres en Haute-Marne, lui enjoignant de réaliser des travaux. Estimés à 125.000 euros, un coût trop élevé pour lui.

Beaucoup de clients sont venus soutenir l'artisan en cette fin décembre 2019, "c'est une injustice" explique cet habitant. Pour cette dame originaire de Langres visiblement très en colère, le constat est simple : "Il n'y aura plus de boulanger" et de s'interroger : "On veut faire revivre la ville de Langres ou pas ?". Pour information, la commune de Langres compte 7.700 habitants dont 1/3 de retraités. 

La plupart ne comprennent pas cette décision. Un soutien relayé d'ailleurs sur les réseaux sociaux. Ainsi un collectif a vu le jour il y a 4 ans sur Facebook. Sur twitter aussi avec des messages regrettant cette situation. Le boulanger lui-même a annoncé la fermeture prochaine dans un post publié le lendemain de Noël. "Bon voilà, je voulais vous tenir informé que le voisin avait gagné le procès et que nous avions perdu. la Boulangerie Gallien sera fermée le 28 janvier. Les 17 employés vont se retrouver sans-emploi mais ils vous remercient tous du soutien. Merci". 
 
L'affaire avait même pris un tournant politique dans le département de la Haute-Marne, en témoigne un tweet de Jean Rottner, le président de la région Grand Est, daté de juillet 2016. 
 


Aujourd'hui, le boulanger est obligé de s'exécuter, car s'il ne réalise pas ces travaux, la justice lui impose de payer une indemnité journalière à la partie adverse à partir du 28 janvier 2020. C'est donc un compte à rebours qui a commencé et à la clef, le licenciement d'une quinzaine d'employés. "Je dois verser 80.000 euros d'indemnités à mon personnel, explique le boulanger. Fin janvier ça va être compliqué, mais en février c'est certain ce sera terminé". 
 


Situations ubuesques

Une affaire qui est loin d'être isolée, même si cela est plus rare avec les boulangeries. On ne compte pas les problèmes de nuisances liées aux activités commerciales en zone urbaine. Un exemple parmi beaucoup d'autres, à Toulouse, ce n'est pas devant la justice que les riverains excédés ont porté plainte, mais ils ont choisi un moyen original. "À vendre très jolie place pour 1 €. " C'est une annonce publiée sur le Bon Coin où ils ont mis leur quartier en vente symboliquement. Nos confrères de France 3 avaient d'ailleurs consacré un reportage à cette situation ubuesque.

C'est sûr que ce genre d'annonces, ça ne correspond pas à la politique du Bon Coin qui les a dépubliées. C'est un happening, une manière symbolique de dire à la mairie que ça suffit !
- Philippe, un habitant du quartier et membre du collectif des riverains.


Pointées du doigt les terrasses bruyantes et débordantes qui sont symptomatiques de la difficile coexistence entre commerçants et riverains. Le plus souvent, les affaires prennent un tournant judiciaire. En la matière, la loi est d'ailleurs assez claire concernant les professionnels. Ainsi, il est dit que "toute activité bruyante exercée à proximité de logements peut être génératrice de nuisances. Pour une meilleure gestion de ces nuisances, une réglementation nationale s’est mise en place, de façon propre à chaque type d’activités."

Dans ce texte, on trouve notamment les boulangers. Et les sanctions peuvent être lourdes : "Toute entreprise peut voir sa responsabilité civile (Article L. 1382 du code civil) engagée si elle est à l’origine d’un dommage. Une entreprise dont la responsabilité pour troubles anormaux du voisinage est reconnue par le juge devra verser des dommages et intérêts aux victimes. Si le bruit à l’origine de la gêne est en outre constitutif d’une infraction (dépassement des émergences autorisées), l’entreprise est passible d’une sanction pénale."
 

Bien souvent les commerces, à l'image de la boulangerie Gallien, baissent les armes, incapables de mettre leur activité aux normes. Mais cette fermeture annoncée en Haute-Marne provoque d'inombrables réactions sur les réseaux sociaux. Plusieurs internautes appellent à une mobilisation générale, pour sauver ce commerce.

À l'image de cette habitante du secteur, Karine Remy-Fieutelot. Elle invite à partager l'information et surtout à venir en aide au boulanger. "J'ai appris qu'une boulangerie pâtisserie de Langres devait fermer fin janvier provoquant ainsi le licenciement de 15 salariés, si pour une fois Facebook servait à venir en aide à ce commerçant qui doit faire des travaux dans son entreprise pour pouvoir rester ouvert. La justice a décidé de faire fermer cette entreprise pour nuisances sonores suite à la plainte d'un seul plaignant. Soyons solidaires. Faites tourner un maximum, ça vaut largement mieux que de mettre un like sur toutes les mêmes conneries répétitives que l'on peut voir. Bonnes fêtes de fin d'année".
 

VIDÉO : notre reportage à Langres 
 
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