Tout plaquer et devenir torréfactrice de café à Saint-Dizier, c’est le pari que s'est lancée Lucile Galliot. Pari gagnant.
Dans son petit laboratoire improvisé à Saint-Dizier, en Haute-Marne, Lucile Galliot trie les grains de café qu’elle vient de torréfier. La jeune femme originaire de Roanne dans la Loire est désormais bragarde et fière de l’être. Et c’est pour cette raison qu’elle s’est lancée dans l’aventure Yuhma café : "Je voulais participer à la redynamisation de ma ville d’adoption. Je suis arrivée ici il y a deux ans lorsque j’ai rencontré mon compagnon qui est bragard et tout comme beaucoup de nos contacts jeunes, il se lançait dans une nouvelle entreprise. Il m’a entraîné dans cette dynamique."
Grande buveuse de café, Lucile n’était pas nécessairement destinée à participer à la préparation de cette boisson. "J’ai découvert la torréfaction avec mon compagnon qui avait décidé de reprendre l’entreprise « arômes café » avant que le propriétaire ne parte en retraite. Nous avons torréfié avec lui trois fois et nous nous sommes lancés. J’ai d’abord fait des petits stages pour aider mon conjoint. Mais j’y ai vite pris goût", précise la jeune femme.
Une appétence pour la torréfaction qu’elle ne soupçonnait pas lorsqu’elle a commencé. "J’apprends chaque jour seule, sur le terrain, je n’ai pas eu de réelle formation en dehors de ces trois séances avec le propriétaire d’ « Arômes café », j’ai un côté autodidacte. J’aimerais faire des formations, mais j’aime bien l’idée de m’être confrontée à la réalité du travail et de l’apprentissage seule avant de peaufiner ma technique," s’enthousiasme la jeune femme.
Une expérience sensuelle
Lorsqu’elle parle des processus de torréfaction du café, Lucile Gaillot semble presque décrire un rendez-vous amoureux : "c’est très sensuel comme activité. Tous les sens sont aux aguets."
D’abord, c’est la couleur, l’aspect, la beauté des grains qui titillent la rétine. Ensuite, c’est sa douceur que l’on sent sous la pulpe des doigts. Puis c’est son parfum qui taquine les narines. Selon le moment de la torréfaction, il gagne en puissance et devient de plus en plus enveloppant. Vient alors aux oreilles le murmure des grains s’entrechoquant dans les sacs de jute, et le crépitement provoqué par l’évaporation de l’eau hors des grains lors de la cuisson. Enfin, vient le goût, puissant et amer en bouche du grain de café parfaitement torréfié.
"Pour torréfier du café, il faut le cuir pendant 20 minutes à 180 degrés, mais ce sont les dernières minutes qui comptent le plus celles, où il peut brûler et avoir un goût infecte. Je reste donc extrêmement attentive en fin de cuisson. J’ai trouvé un rythme qui me permet lorsque je trie les grains à la main, de ne « perdre » qu’une vingtaine de grains sur plusieurs kilos" détaille-t-elle.
Ce que j’aime dans la torréfaction c'est de pouvoir prendre mon temps
Avant d’ajouter : "Je laisse refroidir les grains de café pendant 40 minutes. C’est l’une des périodes les plus importantes de la torréfaction. À ce moment-là, le café chaud évacue les gaz et arrête sa cuisson. Je le laisse donc s’aérer pendant 24 h dans son silo d’origine. Je crois que c’est ce que j’aime dans la torréfaction, le fait que je doive prendre mon temps. Je ne peux pas aller plus vite que la musique et en tant que perfectionniste, j’aime avoir ce temps pour travailler. Ça a quelque chose de relaxant pour moi."
Pour le moment, la jeune femme torréfie des mélanges de cafés verts, dont les grains sont donc simplement lavés, séchés et nettoyés, mais n’est pas satisfaite par les mélanges qu’elle fait. Elle ne désespère pas pour autant et sait qu’elle arrivera à proposer ses propres saveurs. Elle se donne le temps pour y arriver.
"Je veux vraiment faire de Yuhma une petite production locale de qualité. Je trie les grains à la main après cuisson, je travaille avec des revendeurs locaux qui proposent l’achat en vrac. J’ai une démarche écoresponsable. Mon but, n’est pas de produire à outrance. Mais je veux rester abordable. Je veux que même les personnes avec peu de moyens puissent boire un café de qualité. Raison pour laquelle je ne revends pas à prix d’or", précise la jeune torréfactrice.
Lorsqu’elle a décidé de se lancer à son compte, Lucile Gaillot a réfléchi longtemps au nom qu’elle donnerait à son entreprise. C’est comme ça que Yuhma Café est né : "Je voulais un nom simple, doux que l’on retienne facilement comme mon logo. Lorsqu’on le voit, on s’en rappelle. Il n’y a pas de signification particulière à ces choix ! J’avais juste envie de simplicité tout en marquant les esprits."
Pour le moment, la jeune femme travaille seule, mais n’est pas fermée à trouver un passionné de café qui aimerait autant le torréfier que le boire pour travailler ensemble. Face au succès des ventes à Bar-le-Duc, Saint-Dizier et désormais Chaumont, la jeune femme envisage d’agrandir son laboratoire de torréfaction. Elle recherche actuellement de nouveau locaux, toujours en territoire bragard.