Jacques Frering, photographe passionné d'argentique

Photographe professionnel, Jacques Frering ne jure que par l'argentique. Il développe lui-même ses photos en noir et blanc, et expose actuellement à Klingenthal une série sur "La ligne des Vosges".

S'il est profondément réfractaire aux photos numériques, ce n'est pas faute d'avoir testé. Simplement, pour Jacques Frering, travailler en digital serait une immense frustration, qui le priverait de son plus grand plaisir : passer des heures dans son laboratoire. "Ma chambre noire me plaît. Les petites lumières, l'odeur des produits chimiques, ma musique... Je suis tranquille, et j'adore ça."
 



Tout comme il adore sortir dans la nature, montagne, vignes ou prés, avec son appareil photo, et le déclencher au gré de son inspiration du moment. "Mes images sont toujours celles d'un homme qui se promène, reconnaît-il. Mes photos sont rarement prévues d'avance, je les fais sur le tas." Courbes douces de collines, contours d'une feuille de vigne, entrelacs graphiques des branches… tout l'inspire. Au premier regard, il perçoit le cadrage idéal, et les éléments de décor à éviter. Oui, son appareil est "presque soudé" à son œil, avoue-t-il en riant.    


Un visionnaire en noir et blanc

Son œil perçoit aussi d'emblée le noir et blanc de la future photographie. "Je ne vois pas tout en noir et blanc, précise-t-il, mais je me l'imagine." Et s'il affectionne les photos en bi-chrome, ce n'est pas uniquement pour le plaisir de pouvoir les développer et les tirer lui-même : "Souvent, le noir et blanc exprime bien davantage que la couleur. Une photo en couleur donne parfois trop d'informations, ou l'une des teintes domine les autres. Alors qu'avec le noir et blanc, l'imagination est ouverte à l'infini."
 


Pour un meilleur rendu, il recherche des ambiances de contre-jour. Ou joue avec la vaste palette des gris. Ses gros plans, fleurs ou feuilles, sont magnifiés par un jeu de flou-net : "L'image est bien plus intéressante si on ne sait pas immédiatement ce qu'elle représente. On y entre mieux."


La magie de la chambre noire

De retour chez lui commence la seconde partie du travail, tout aussi créative. Dans le noir complet, il place le film dans une boîte, qu'il remplit ensuite successivement remplie de divers bains chimiques : révélateur, bain d'arrêt puis fixateur. Une fois sec, le film, image après image, est placé dans l'agrandisseur qui permet de l'impressionner en négatif sur du papier photo.

A ce stade, il reste encore "pas mal de travail" pour que chaque photo puisse exprimer le meilleur d'elle-même. Comme le contraste du film n'est pas le même que celui du papier, une grande mer de brouillard pourrait ressortir en blanc uniforme, et une montagne sombre créer une masse noire sans détails. Pour éviter ces écueils, il faut éclairer davantage certaines zones et en occulter d'autres, afin que "chaque information visuelle du négatif se retrouve sur le papier", et rende l'image homogène.
 


Vient ensuite l'étape magique du bain du révélateur, où le papier laisse apparaître peu à peu l'image définitive, qu'il s'agira encore de fixer. "Ce travail est une grande joie" pour Jacques Frering, qui a découvert l'univers de la chambre noire tout jeune, grâce au club photo de son collège.


Le sport automobile, une bonne école

A seize ans, il a commencé par travailler dans une imprimerie, mais s'est offert un agrandisseur avec son premier salaire. Et dix ans et une série de petits boulots plus tard, il a compris que la photographie était sa vocation… grâce au sport automobile. "Déjà tout petit, je m'intéressais aux voitures, et mon plus grand rêve de gosse était d'en conduire une", se souvient-il. Plus tard, il est parti "à vélo ou en mobylette" suivre les courses automobiles, et s'est acheté son premier appareil photo pour en immortaliser le souvenir. C'est en montrant ses photos aux pilotes qui les lui ont achetées que, peu à peu, sa carrière de photographe a démarré.   
 


Cet autodidacte s'est formé par des stages, et sur le tas. Durant quelques années, il avait un studio photo à Erstein, puis il s'est spécialisé dans la photographie scolaire. Il immortalise toujours les groupes d'élèves en extérieur, dans un décor naturel. Là, il travaille en couleur, mais reste fidèle à l'argentique, et fait appel à un laboratoire extérieur pour les tirages.   


L'exposition "La ligne des Vosges"

Régulièrement, il expose l'une ou l'autre de ses séries en noir et blanc : "De branches à brins" sur la géométrie des branches d'arbres, "Les dentelles de la vigne" sur des feuilles en très gros plan… et, actuellement, "La ligne des Vosges" à la Maison de la manufacture de Klingenthal, et ce jusqu'au 27 octobre prochain.

Ces expositions lui offrent aussi l'occasion de pouvoir expliquer les procédés du développement argentique à un public souvent non averti. "Ils croient qu'on prend simplement un négatif et qu'on l'agrandit." Mais il constate de plus en plus que l'intérêt est réel.

Car au fil des ans, ce "dinosaure" de la photo a senti les regards changer. "Il y a dix ans, les collègues se moquaient presque de moi, et mes clients aussi." Maintenant, avec une forme d'admiration dans la voix, ils disent : "Ah, vous faites encore des photos argentiques !"

Jacques Frering va consciemment à contre-courant, mais peut-être est-il aussi un peu prophète. Du moins un passionné, qui ne s'agrippe pas désespérément à un art en voie de disparition, mais contribue à le maintenir vivant.  




 
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