Jaunisse de la betterave : un insecticide néfaste aux abeilles pourrait être à nouveau autorisé, les Alsaciens divisés

Le gouvernement a entendu le cri d'alarme des producteurs de betteraves sucrières, confontés à un virus qui attaque les plants. Pour sauver la filière, ils pourraient utiliser un insecticide nocif pour les abeilles. Les associations écologistes alsaciennes dénoncent un recul important.
 

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A deux mois de la récolte, les producteurs de betteraves alsaciens ne se font pas d'illusion : certains vont perdre jusqu'à 50% de rendement. La faute au puceron vert, venu attaquer les jeunes plants au printemps dernier : un puceron vecteur du virus de la jaunisse. En effet, les feuilles prennent une étrange couleur, symptomatique de la maladie. Et il n'y a rien à faire. La seule solution, selon les agriculteurs, aurait été d'enrober les semences d'un insecticide. Mais ce produit, un néonicotinoïde, est interdit depuis 2018. Et en ce qui concerne la récolte 2020, le mal est fait.

Une filière en danger

Avec 35 millions de tonnes de production annuelle, la France est le premier pays producteur de betteraves en Europe : dans 29 départements de l'hexagone, ce sont 26.000 planteurs qui disent aujourd'hui avoir le dos au mur. Car avec des rendements en berne et des cours mondiaux pas toujours favorables, cette culture risque de ne plus être attractive.
Hors, c'est dès aujourd'hui que les agriculteurs décident des semis de l'an prochain, et le risque est grand de les voir abandonner la betterave. "Ce qui se joue, c'est l'autonomie sucrière française" dit Gérard Lorber, producteur dans le centre Alsace, et membre du conseil de section Cristal Union de la sucrerie d'Erstein. 

Le gouvernement a entendu "l'urgence"

Alerté depuis plusieurs semaines, le ministère de l'agriculture propose d'autoriser à nouveau l'utilisation d'un néonicotinoïde, interdit depuis 2018 à l'échelle européenne à cause de substances néfastes pour les abeilles. Il s'agirait d'une dérogation temporaire : trois ans maximum, afin de permettre aux chercheurs de développer des plantes résistantes aux pucerons. "On y croit" affirme Franck Sander, le président national des planteurs de betteraves. "La filière va d'ailleurs investir un à deux millions d'euros par an pour la recherche. Si on n'y croyait pas, on ne s'obstinerait pas, car on sait bien que les insecticides ne sont pas la solution."
Il invite les différents acteurs à un débat pragmatique, et non pas idéologique. Un voeux pieux ? Cette mesure, qui doit être présentée au parlement à l'automne, va sans doute provoquer de vives réactions de la part des défenseurs de l'environnement. L'ONG "Générations futures" annonce déjà étudier toutes les voies de recours possibles.

Changer de modèle

"Je ne suis pas pour que des agriculteurs meurent de faim, mais on a besoin d'une transition de l'agriculture. Il faut cesser de sauver un système économique à bout de souffle", lâche Stéphane Jiraud, directeur d'Alsace Nature. "A un moment où toutes les annonces gouvernementales vont vers plus d'écologie, il faut se mettre en adéquation avec ses engagements" dit-il . Il relève par ailleurs que les infestations de pucerons ne sont sans doute pas le fruit du hasard, mais le résultat de rotations de cultures trop courtes, et de l'absence d'auxilliaires (comme les coccinelles qui se nourrissent des pucerons) dus à l'emploi systématique d'insecticides.
Anne Vonesch, en charge des questions agricoles à Alsace Nature, relève de son côté que la surconsommation de sucre est un désastre sanitaire dans les pays occidentaux. "Est-il néccessaire de produire autant ? s'interroge-t-elle. Dans tous les cas, la question qui se pose est celle du choix d'un système."

Des engagements fermes pour protéger les butineurs

45.000 emplois sont dans la balance dans toute la France, précise la confédération générale des planteurs de betteraves. En Alsace, cette culture porte sur 6.000 hectares et 500 planteurs, dont les récoltes font tourner la sucrerie d'Erstein trois mois par an, de septembre à novembre. A moins de 100 jours d'activité par an, le site n'est pas rentable, et si les rendements ne sont pas suffisants, c'est aussi l'existence de l'usine qui est menacée, expliquent les betteraviers de la région.
"La betterave n'est pas une plante mellifere. Et si nous obtenons cette dérogation pour utiliser un néonicotinoïde, uniquement par enrobage des semis, nous nous engageons à ne pas planter de cultures melliferes l'année suivante non plus, afin d'éviter tout risque de contamination" . Nous prenons des engagements forts, mais il faut que l'agriculture soit reconnue comme un secteur stratégique" affirme Franck Sander, qui a été à toutes les négociations avec le ministère de l'Agriculture. Pour cette filière, la décision du gouvernement de revenir sur la loi biodiversité de 2016 est une première étape rassurante... Mais rien n'est encore acquis dans ce dossier à forte charge symbolique. 
 
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