Les cavistes connaissent un beau succès dans les villages

Les cavistes se développent à la campagne. Dans le nord de l'Alsace, dans un rayon de 5 km, on en compte deux qui ne se font pas concurrence tant il y a de clients. Rencontre avec deux trentenaires passionnés par le vin et attachés à leur territoire.

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A Beinheim, même un mardi matin, il ne faut pas attendre plus de quelques minutes avant de voir arriver un client. "Bonjour, Claude ! Qu'est-ce que tu aimerais, aujourd'hui ?". Chloé Friedmann accueille beaucoup d'habitués au sein de sa cave, le Bacchus. "Je viens généralement avant les fêtes, mais aussi quand j'ai envie d'un bon verre de vin", s'exclame Claude Beyer. Et pour cela, il peut compter sur Chloé Friedmann. "Elle est toujours de bon conseil", assure-t-il. Yannick Timmel, habitant de Beinheim, confirme : "elle nous fait découvrir de nouveaux vins, qui sortent de l'ordinaire et qui viennent de petits producteurs par exemple".

Chloé Friedmann a repris le Bacchus fin 2016. Le vin a toujours été sa passion, si bien qu'elle a commencé à 15 ans dans le domaine, en tant qu'apprentie au Cheval blanc de Lembach. Elle fréquentait alors déjà le Bacchus. "Je venais ici chercher du vin, le goûter à la maison en famille, pour m'entraîner", raconte-t-elle. Alors qu'elle habitait et travaillait en Bourgogne depuis 11 ans, le Bacchus l'a fait revenir en Alsace. "Quand j'ai appris que le gérant cherchait un repreneur, je me suis dit que c'était une opportunité", poursuit-elle. 

En tant que jeune femme de 28 ans, elle s'est alors heurtée à des préjugés. "Au début, beaucoup de gens s'interrogeaient, se demandaient si je m'y connaissais... j'ai toujours dû me justifier, raconter mon parcours, pour qu'ils finissent par dire "d'accord, vous allez peut-être pouvoir nous conseiller, alors !". C'était assez difficile. Je dirais que ça a duré toute la première année". Sa maman, Sabine Christ, confie "avoir eu peur au début. Quand elle nous a dit à 15 ans qu'elle voulait travailler dans le vin, on l'a mise en garde. Dans ce domaine dominé par les hommes, elle allait devoir travailler deux fois plus pour faire ses preuves... mais Chloé a du caractère, elle a réussi, on peut en être d'autant plus fiers !". 

Une fierté accentuée par les bons résultats de la boutique. "Le chiffre d'affaires augmente de 8% chaque année. C'est important car quand j'ai repris le Bacchus, les habitués étaient déjà là. J'ai cherché à attirer une nouvelle clientèle, plus jeune notamment. A présent, beaucoup de personnes entre 25 et 40 ans viennent au Bacchus", précise Chloé Friedmann.

A peine à 5 km de Beinheim, Philippe Ball tient La Cave des Anges. Son commerce marche, lui aussi, très bien. En octobre, il s'est vu recevoir le titre de 4ème meilleur caviste de France, ce qui a fait bondir son chiffre d'affaires de 30%. "J'ai tout donné pendant deux ans pour ce concours, j'ai beaucoup travaillé, c'est donc une grande fierté d'être quatrième. C'est aussi bien pour mes clients de savoir que leur caviste est l'un des meilleurs de France", assure-t-il. 

Alors qu'il a travaillé pendant neuf ans dans un laboratoire pharmaceutique, il s'est décidé de vivre de sa passion pour le vin en 2017. "Mes amis, ma famille se sont étonnés, en me disant que j'avais un bon job, et ils ne voyaient pas l'intérêt d'un caviste à Forstfeld", explique-t-il. "Mais pour moi, il n'était pas envisageable d'ouvrir mon commerce ailleurs que dans mon village natal, que je n'ai jamais quitté !". Et à peine quelques années plus tard, Philippe Ball estime que "le pari est gagné". D'ailleurs, si depuis son titre de 4ème meilleur caviste de France, ses clients viennent de plus en plus loin, il peut toujours compter sur ses fidèles clients de son village de 700 habitants. Parmi eux, Gabriel Sutter. "Je connais la Cave des Anges car j'habite ici, alors j'y viens à titre privé mais aussi professionnel, me fournir en vin pour mon restaurant".

Tout comme Chloé Friedmann, Philippe Ball est aussi apprécié pour la qualité de ses conseils. Actuellement, il propose 120 références en vin. Il s'est également mis à vendre du fromage. "C'était une demande de ma clientèle. Je n'étais pas sûr que ça allait fonctionner. Mais depuis deux ans, ça marche de mieux en mieux ! J'ai commencé avec une vingtaine de fromages différents, et là, j'en suis à trente. La demande est là".

Pour ce jeune trentenaire, le bilan est plus que positif. Il ne regrette pas son choix. "Ce n'est plus un métier, ce n'est que du plaisir. Le matin, lorsque je viens ici, j'ai l'impression de retrouver mes jouets !" conclut-il, tout sourire.

 

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