Après le lynchage d'une collégienne à Reims, l'agresseur âgé de 13 ans, a été mis en examen pour violences volontaires aggravées ce jeudi 10 septembre. L'auteur des coups, ainsi que les trois autres personnes mineures qui ont enregistré et diffusé la vidéo, risquent des peines de prison.
Après l'agression d'une collégienne à Reims, quatre mineurs ont été déférés ce jeudi 10 septembre. Voici le verbatim de la conférence de presse de Matthieu Bourrette, le procureur de la république de Reims. Nous avons choisi de vous retranscrire en intégralité son communiqué de presse.
Le mardi 8 septembre 2020, en fin de matinée, une jeune fille de 14 ans s'est présenté au commissariat de Reims en compagnie de ses parents afin de déposer plainte pour violences aggravées. Elle expliquait que le samedi précédent, dans le cadre d'un échange Snapchat, avec un groupe de camarades, elle avait eu des mots et échangé des insultes avec une autre jeune fille pour un motif totalement futile lié à une plaisanterie faite sur cette autre jeune fille.
Un garçon de 13 ans, appartenant au même établissement scolaire que la plaignante, mais n’étant pas dans la même classe, avait été accepté dans ce groupe d’échanges et avait, le lendemain dimanche, pris fait et cause pour la jeune fille qui s’était sentie insultée. Il l'avait alors pris à partie dans ces messages et l’avait menacée à plusieurs reprises de s’en prendre physiquement à elle. L'adolescente n’avait pas jugé utile d’en parler à ses parents.
Des moqueries entre adolescents qui dégénèrent
Selon l'adolescente, le lundi matin 7 septembre, au collège Saint-Remi qu'elle fréquente uniquement depuis la rentrée 2020, en classe de 3e, elle a été prévenue par les camarades du garçon de 13 ans, que ce dernier voulait effectivement la frapper et passer à l’acte.Vers 15h30, à la sortie du collège, elle était attendue par son futur agresseur qui lui demandait de la suivre. Il voulait se battre avec elle, ce qu'elle refusa en attendant l’arrivée d’un membre de sa famille. Mais selon la victime, qui s’était mise à l’écart, l'adolescent a cherché à la provoquer à plusieurs reprises verbalement, avant de s’en prendre physiquement à elle. Il lui a porté plusieurs coups de poing, la faisait tomber au sol à plusieurs reprises, continuait à la frapper alors qu'elle se trouvait au sol en lui portant de violents coups de pied à la tête tout en lui écrasant le larynx.
Ses camarades l'ont prise en charge, avec un surveillant et les responsables de l’établissement scolaire. Pendant ce temps-là, l'agresseur prenait la fuite.
La jeune fille a été vue par un médecin et son ITT a été fixée à 7 jours, le certificat médical faisant état de plusieurs ecchymoses notamment au menton, au bras, de contractures, de céphalées.
Le médecin prescrit le port d’un collier cervical durant 16 jours, et indiquait que le retentissement psychologique de l’agression devrait être réévalué ultérieurement, laissant penser à une possible aggravation.
Arrestation de l'agresseur
Le lendemain des faits, dans l’après-midi, le principal mis en cause était appréhendé à son domicile par la sûreté départementale du commissariat de Reims en charge de l’enquête, et était placé en garde à vue pour des faits de violences volontaires aggravées par trois circonstances, la préméditation, le fait que la victime avait moins de 15 ans, et le fait que les violences avaient été commises aux abords d’un établissement scolaire.Il a reconnu et immédiatement entièrement les faits. Mais il était incapable d’expliquer son déchainement de violences, précisant simplement qu'il avait arrêté de porter des coups au moment où il avait constaté que la victime avait des difficultés pour respirer.
Il semblait en garde à vue peu ému par la situation de la victime, même s’il avait pu ponctuellement pleurer au cours de ses auditions. Expertisé par un psychiatre, ce dernier faisait état de la dangerosité objective de ce mineur, le risque important de récidive, l’absence de remords exprimés, et la nécessité d’un suivi psychiatrique et éducatif, tout en soulignant l’absence de pathologie psychiatrique.
Une vidéo de l’agression réalisée, puis diffusée sur les réseaux sociaux
Se sachant recherché, pour avoir procédé à cet enregistrement, un autre mineur âgé de 14 ans, camarade de classe de la victime, à la demande de la police, se présentait au commissariat de Reims le 8 septembre en fin d'après midi et était placé en garde à vue pour enregistrement d’agression physique et non-assistance à mineur en péril. Il donnait la même version des faits que la victime et le mis en cause principal, expliquant que, camarade de classe de la victime, il avait filmé l’agression pour pouvoir avoir une preuve de celle-ci, et indiquait l'avoir donné à une certaine "WB", également camarade de classe de la victime.Il soutenait que la diffusion sur les réseaux sociaux avait été réalisée par un autre adolescent. Il n'avait en revanche pas souhaité intervenir en prévenant le surveillant de l'agression en cours, mais admettait en garde à vue qu'il aurait dû le faire. Il était totalement inconnu des services de police et de justice.
Quatre mineurs déférés après l'agression de la collégienne
Ce jour sont déférés devant le juge des enfants, les quatre mineurs placés en garde à vue dont certains avaient vu leur garde à vue prolongée. Il est reproché à l'agresseur principal des faits de violences volontaires aggravées par trois circonstances ayant entraîné une ITT inférieure à huit jours.Il encourt sept ans d’emprisonnement, ramenés à trois ans et demi compte du principe d'excuse de minorité qui s'appliquera automatiquement en cas de condamnation. Son placement sous contrôle judiciaire a été requis :
- pour éviter le renouvellement des faits,
- pour éviter toute pression sur la victime compte tenu de la nature des faits et de leur caractère prémédité,
- pour protéger la personne mise en examen, dans la mesure où son identité, son adresse, ont été diffusées et où elle a fait l'objet de menaces de représailles sur les réseaux sociaux.
Le procureur a sollicité le placement du jeune individu en centre éducatif fermé afin de permettre son éloignement temporaire de Reims, outre une mesure d'interdiction de contact avec la victime.
Les trois autres mineurs qui sont déférés ce jour sont poursuivis :
- pour non-assistance à mineure en péril et enregistrement de faits de violences volontaires aggravées.
- diffusion de faits de violences volontaires aggravées.
- diffusion de faits de violences volontaires aggravées, et non-assistance à mineure en péril.
Ces trois autres mineurs sont également sous le coup de mesures dites de liberté surveillée préjudicielle, mesures pénales à visée éducative et préventive. Si mes réquisitions sont suivies par le juge des enfants, ils seront pris en charge par les services de la protection judiciaire de la jeunesse, par le biais d’éducateur, qui auront vocation à les suivre, à les encadrer et à les surveiller, durant tout le temps de l’enquête confiée à présent au juge des enfants.
Il appartient maintenant au juge des enfants, une fois les mises en examen réalisées qui sont en cours de décider quelles sont les mesures de contraintes les plus appropriées.