Certains pays ont déjà commencé la vaccination de la population contre la Covid-19. En France, cela se fera à partir de janvier, sans aucune obligation. Faut-il se faire vacciner ? Nous avons interrogé le Pr. Laurent Andreoletti, du CHU de Reims, et le Dr Hervé Ruinart, médecin généraliste.
Le Royaume-Uni a lancé officiellement sa campagne de vaccination contre la Covid-19 le 9 décembre. En France, les premières doses vont être injectées à partir de janvier 2021, de manière progressive selon ce qu'a indiqué le Premier ministre, Jean Castex, lors d'une conférence de presse donnée le 3 décembre dernier.
Manque de recul ?
Mais certains scientifiques, à l'image du Pr. Éric Caumes, pointent déjà du doigt le manque de recul sur ces vaccins, notamment celui fonctionnant avec l'ARN messager, une technologie encore jamais utilisée.
"Il faut que des publications scientifiques sortent", affirme Laurent Andreoletti, professeur spécialisé en virologie médicale au CHU de Reims. "On en saura plus dans les semaines à venir. Mais il ne faut pas oublier que la Covid-19 est une nouvelle maladie. On n'a jamais fait de vaccin contre un virus qui ressemble à ça." La vaccination au Royaume-Uni permettra d'en connaître davantage sur le terrain et de ne pas se contenter des données livrées par les laboratoires.
Selon Hervé Ruinart, médecin généraliste à Reims et président de la section Marne du syndicat des médecins généralistes de France, ces informations sont essentielles, car ce sont ces professionnels de santé qui "vont endosser la responsabilité sur des produits sur lesquels ils n'ont pas de recul."
Va-t-on trop vite ?
En France, la Haute autorité de Santé (HAS) doit donner son accord sur chacun des vaccins proposés avant leur utilisation. "Ce sont des experts qui n’ont pas de conflit d’intérêt et donneront leur avis", plaide le professeur Andreoletti.
Car sur les réseaux sociaux, nombreux sont les internautes à s'inquiéter de la rapidité avec laquelle ont été créés ces vaccins, brandissant l'exemple du VIH contre lequel des dizaines d'années ne suffisent toujours pas à en trouver un. "C'est incomparable. Le VIH a un cycle complétement différent chez l'homme, sourit le professeur. Ce sont deux virus qui n'ont strictement rien à voir."
Qui vacciner ?
Selon les deux médecins, il n'est pas question de vacciner toute la population. "Chez les enfants, la Covid est asymptomatique, voire un simple rhume. Chez les ados, peu voire pas grave. Il faudra donc vacciner graduellement les gens à risque", plaide le médecin généraliste.
Les premiers à se voir injecter des doses seront les personnes fragiles. Une stratégie justifiée selon le professeur Andreoletti. "Pour eux, la balance bénéfices-risques est favorable", affirme-t-il.
Les personnes qui ont déjà contracté la Covid ne sont pas pour autant à l'abri. "Il y a des patients qui ont eu la maladie pendant la première vague et qui ont encore des anticorps, d'autres non. Donc on ne sait pas."
Le vaccin ne signifie pas la fin du virus
Pour annuler la transmission du virus, "il faudrait que 70 à 85 % de la population soit vaccinée. On n'a jamais vacciné autant de personnes dans l'histoire." Or seuls 6 Français sur 10 sont partants pour se faire vacciner contre le coronavirus selon un récent sondage.
De plus, "le vaccin n'empêche pas de tomber malade." Il permet de ne pas développer de maladies graves. "Le vaccin va atténuer l'épidémie, mais il va falloir continuer les gestes barrière. Combien de gens vont se faire vacciner ? Combien de temps dureront les anticorps ? Le virus va-t-il muter ? On n'en sait rien", insiste le Dr Hervé Ruinart. Pour entrevoir la fin de la Covid, "il faudrait également développer un traitement", affirme le Pr. Laurent Andreoletti.
Mais les deux médecins sont formels : il faut se faire vacciner. "Il faut se battre contre ce virus", martèle le Dr Ruinart. Et pour ceux qui ont des doutes, le professeur Laurent Andreoletti a une réponse toute prête : "Si tu n’aimes pas les vaccins, essaie la maladie."