"On s’y attendait. Cela fait deux trois jours qu'on n'avait plus d’espoirs", témoigne Charles Lamarche, directeur de la compagnie Cirko Galop. Pas de réouverture des salles de spectacle avant janvier a annoncé le gouvernement. Son spectacle de Noël devait lui rapporter 96.000 euros.
"Ça ne va pas très bien", commence Charles Lamarche, directeur de la compagnie Cirko Galop, à Muizon, près de Reims. La décision du gouvernement de ne pas rouvrir les salles de spectacle avant le mois de janvier est un nouveau coup de massue.
"On s'y attendait. Cela faisait deux ou trois jours qu'on n'avait plus d'espoirs", souffle-t-il. Depuis une allocution du Premier ministre, le 24 novembre, le gouvernement laissait entrevoir une réouverture des salles de spectacle. Mais ces derniers jours, les prises de parole se voulaient plus prudentes. Jusqu'à annoncer, ce 3 décembre, que les conditions n'étaient pas réunies pour que la vie culturelle reprenne son cours.
"C'est la double peine"
La compagnie Cirko Galop avait prévu un spectacle de Noël. L'annulation des représentations est donc ressentie comme un coup dur car elles auraient permis de renflouer les caisses, bien affaiblies par la crise de la Covid. Ces derniers mois, l'entreprise ne pouvait vivre que de son activité de formation professionnelle, les autres ayant toutes été suspendues.
Pour Charles Lamarche, ce "couperet" annoncé par le gouvernement, c'est la "double peine". D'abord d'un point de vue financier : "Chaque spectacle est une création, il faut des effets spéciaux, gérer la communication, imprimer les affiches, les flyers, etc. Cela représente entre 5.000 et 8.000 euros. Et cela fait un an que je suis dans le rouge. J’ai dû apporter des fonds personnels, autour de 10.000 euros..."
En plus des investissements réalisés dans le vide, le manque à gagner est extrêmement important. "Nous avions programmé trente séances, pour un billet moyen à 16 euros. En comptant seulement 200 places par spectacle, cela représente 96.000 euros, au bas mot", se désole-t-il. Soit un tiers de leur chiffre d'affaires.
L'autre aspect de cette double peine, c'est l'investissement personnel de toute une équipe. "Depuis l’annonce de la possible ouverture des salles de spectacle [lors des annonces gouvernementales fin novembre, NDLR], on faisait travaillait chaque jour de 8 h à 20 h."
Des aides insuffisantes ?
Pour aider les entreprises dans ces situations de détresse financière, l'État a mis en place le Fonds d'Urgence pour le Spectacle vivant privé (FUSV). "J'ai obtenu 15 % d'indemnisation. C'est loin de couvrir l'entièreté des pertes", lance-t-il avant de nuancer : "Mais on n'est pas les seuls."
Il y a aussi le chômage partiel, qui est, "en France, un dispositif exceptionnel", reconnaît Charles Lamarche. Cela a permis d'assurer 70 % du salaire des 12 artistes. Toutes les cotisations sociales ont été supprimées... ou presque. Restent les congés spectacles, charges propres aux intermittents. "Cela représente encore 20 % de la rémunération brute", soit, rien que pour le mois de décembre "7.000 euros" à la seule charge de l'entreprise.
Pour Charles Lamarche, il faudrait annuler ces charges pour soulager le monde du spectacle. "Si cette crise dure trop, on devra mettre la clé sous la porte", lance-t-il, amer. Mais le chef d'entreprise voit tout de même un peu de lumière dans cette période sombre : "Les spectacles vont pouvoir reprendre au Royaume-Uni. Avec des conditions drastiques, certes, mais on va pouvoir de nouveau travailler au moins là-bas", relativise-t-il avant de conclure : "Parfois, on se demande pourquoi on fait ce métier-là..."